Au-delà de rendre un bel hommage à son personnage éponyme, Madame Claude a l’avantage d’incarner par l’image ce qu’est une maison close, bien qu’il s’agisse ici davantage d’une agence de recrutement formant, plus que des prostituées, des agents de terrain : un lieu fermé où les secrets, qu’ils soient d’ordre personnel ou étatique, restent sous clef. Car le film a l’intelligence de traiter la dissidence comme attaque aux mœurs et danger pour la sécurité nationale, dans la mesure où ces femmes sont envoyées aux quatre coins du monde selon des contrats qui, bien entendu, les dépassent. Elles symbolisent ainsi l’hypocrisie de gouvernements soucieux de moraliser leur peuple tout en nourrissant leur politique étrangère de ces appâts irrésistibles. Œuvre provocatrice parce que peinture d’un certain état de la France et de la libération sexuelle dans les années 70, Madame Claude est aussi un film érotique : ses scènes de sexe bénéficient d’une composition esthétique à la fois très belle et très sensuelle. Jamais vulgaire, toujours intriguant, le long-métrage de Just Jaeckin mériterait aujourd’hui une reconsidération tant historique que cinématographique.