A la recherche d'une comédie sympa sur Disney+, je suis retombé sur Mrs. Doubtfire, énorme succès populaire que j'avais vu à l'époque de sa sortie en famille (ma soeur avait l'âge de Mara Wilson) et que ma compagne n'avait pas vu. Du coup, je me suis retapé ce film en mode "Madeleine de Proust."

Et si effectivement ça reste le même film que j'avais apprécié enfant, il y a des tas de trucs qui m'ont vraiment plus résonné en moi qu'à l'époque. Je l'ai raconté dans mes dernières critiques : ma copine et moi attendons notre premier enfant. Et quelques heures avant on avait chez la sage femme, une discussion sur le fait qu'un enfant démultiplie les taches ménagères et les disputes de couple, avec parfois un des deux conjoints qui a l'impression d'être le seul à trimer. Et en revoyant le film BIM, on est en plein dedans !

Pour un film comique certaines situations font mal par leur côté "vrai" : le divorce entre Daniel et Miranda sonne juste tant on comprend que s'ils se sont aimés, ils ne peuvent plus fonctionner à deux. Le film raconte comment Daniel fait aussi le deuil de son couple : il est longtemps dans le déni et c'est au final le fait d'être devenu Miss Doubtfire qui lui permet d'avoir la discussion avec son ex-femme qu'il n'avait jamais pu avoir.

Si le film sait être vraiment être une comédie familiale par moment, il fait mouche sur la partie dramatique qu'il réussit à traiter de manière crédible et surtout il ne tente pas de remettre les personnages ensemble à la fin, en mode "happy end hollywoodienne" et se permet de finir sur un speech sur les familles atypiques qui sont des familles quand même. Apparemment c'était une volonté de Colombus, de Williams et Field, divorcés eux-même (Sally Field était même en plein dans le sien pendant le tournage du film) qui se disaient qu'encourager les enfants de divorcé à croire que leur parents peuvent se remettre ensemble n'était pas une bonne chose.

Après, il y a ces moments Daniel apparait comme un gros connard, notamment lorsqu'il tente de manipuler son ex-femme en lui donnant des conseils par la voix de Madame Doubtfire, mais au final, ça me perturbe pas plus que ça, vu que Miranda à juste l'air de se dire "ok, c'est les conseils d'une vieille femme de soixante ans, je vais pas en tenir compte."

Mais surtout, si je le trouve un peu connard de faire ce genre de coup... il y a une scène où il voit ses enfants et Miranda jouer avec le nouveau copain de son ex. Et je comprends le ressentiment complet du gars qui se sent effacé du tableau et condamné à regarder les gens qui l'aiment s'amuser sans lui. Bonne idée, au passage, d'avoir fait de Pete, une sorte de "John Bogoss" et d'avoir échappé aussi au cliché du nouveau mec "qui en fait est un connard." Mieux : le mec découvre qu'il adore les enfants.

Bon, lui filer de la bouffe à laquelle il est allergique, là, c'est carrément une tentative de meurtre. Mais au fond, y a une justice karmique : c'est un peu cet acte qui va causer sa perte.

Devenir Mrs Doubtfire :

Ce film, c'est surtout l'histoire d'un acteur qui est tellement à fond dans la méthode Stanislavski que le personnage qu'il a créé fini par le changer lui aussi. En effet, c'est d'abord afin d'être crédible en gouvernante qu'il commence par apprendre des trucs qu'il aurait jamais appris autrement (la bouffe) puis à agir sur ses enfants de manière plus stricte... et ça fonctionne. Au point, comme dit au dessus, de réussir à avoir des conversations qu'il n'aurait jamais eu autrement, et qu'il porte le personnage pour finir par continuer à incarner le personnage après que la supercherie ai été éventée. Bon, je ne sais pas trop comment réagirait une chaine de télé des années 90 si elle apprenait que la vieille dame de l'émission pour enfant était en fait un travesti. (Déjà qu'en 2023 ça passe pas trop)

Après, contrairement à pas mal de films où c'est visible que c'est le même acteur déguisé, pour le coup, la transformation fonctionne vraiment bien : on se dit que oui, ça passe de manière crédible. A vrai dire Robin Williams s'était amusé à faire le test en se faisant passer pour une vieille dame dans un magasin.

Alors, le film aurait limite pu être pris pour un film sur la transidentité... s'il ne coinçait pas par-ci par-là quelques blagues transphobes sur les gens qui changent de sexe. Après, c'est un film de 1992 et ça reflète le point de vue que la société avait à l'époque : ce sont des détraqués sexuels. (Les mentalités ont sacrément évoluées depuis 30 ans.) Après le film réussi à présenter aussi un couple de gay comme des personnages positifs ET que tout le monde accepte comme tel, ce qui était loin d'être gagné à l'époque.

Robin Williams superstar :

Après, on ne va pas se mentir, c'est un film dont le but est de déployer la palette des talents de Robin Williams, notamment certaines scènes où il fait des voix devant une assistante sociale coincée, emmerde son ex-femme avec tout un tas de personnages créés pour l'occasion, s'amuse à changer des perruques. Et qui a droit à une partie dramatique et larmoyante sur le père auquel on ôte ses enfants.

Le casting autour de Williams est réussi. J'avais de Sally Field une image un peu caricaturale de maman quadra hyper sage, mais il y a des scènes où elle tire son épingle du jeu (à la fin de la scène du restaurant, elle tire 5 tronches différentes à la fois, je sais même pas comment c'est possible.) On a des comédiens enfants qui jouent bien (dont Mara Wilson qui est chou dans chacune de ses scènes) ainsi que Pierce Brosnan et Harvey Fierstein.

Rétrospectivement, je sens la patte Chris Columbus dans certaines scènes : a chaque fois qu'il y a un truc un peu "merveilleux" qui arrive (lorsque la porte s'ouvre sur Mrs Doubtfire par exemple) on a un petit effet de clochette qui teinte la scène. Au passage, c'est marrant de voir Howard Shore à la composition (et ça se sent sur le générique de fin) ce qui en fait un film du réalisateur du premier Harry Potter dont la musique est faite par le compositeur du Seigneur des Anneaux. Je comprends pourquoi le film avait un air de "film de Noel" sans l'être.

Donc, oui, même s'il reste un peu daté, le film est encore chouette à regarder actuellement... par contre, pourquoi les jaquettes DVD et affiche de ce film sont-elles systématiquement ratés ?

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le 26 oct. 2023

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