Woody Allen c'est comme le Beaujolais, on l'attend chaque année. A presque 80 ans, le réalisateur new-yorkais ne semble pas prêt à prendre sa retraite et nous présente sa nouvelle cuvée 2014 du nom de Magic in the Moonlight. Et c'est en France que nous retournons, trois ans après un succulent Minuit à Paris qui m'avait vraiment transporté. Ce qui n'est pas forcément le cas de tous les Allen, tantôt géniaux, tantôt "seulement" bons (cela dit ne faisons pas la fine bouche vu la tronche de la majorité des films qui sortent au cinéma...). Nous voilà alors en droit de nous attendre à un film de qualité sans savoir à l'avance si ce nouveau cru nous marquera comme étant un incontournable de son auteur. Ce 49ème long-métrage de Woody Allen sera-t-il haut placé dans le top des films du cinéaste à l'heure où l'on fera les comptes finaux d'une carrière très bien remplie?



Son avant-dernier film Blue Jasmine m'a autant déprimé que ce Magic in the Moonlight m'a réjoui. C'est là qu'on voit aussi le talent de Woody Allen, capable de réussir dans les registres comiques et dramatiques. Et cette dernière cuvée du réalisateur est l'exemple-même de la comédie légère et très rafraîchissante.
Pas besoin d'en faire des tonnes. Le film dure 1h30, le scénario et les dialogues sont bien ciselés, la mise en scène est très bonne et les acteurs excellents. Que demander de plus après tout? Allen n'a rien perdu de ses qualités d'écriture, à croire d'ailleurs qu'il sort un film par an pour ne pas perdre la main. Nous revoilà donc servis par un petit plaisir de cinéma à la fois simple et efficace.

Colin Firth incarne ici un personnage qui reprend beaucoup de facettes du personnage que Woody lui-même a souvent incarné. Le côté rationnel, sarcastique et cynique qui se retrouve chamboulé par le simple sourire d'une jolie femme (en même temps qui ne succomberait pas face au sourire d'Emma Stone?). J'y ai d'ailleurs retrouvé un peu de moi dans ce personnage, ce qui a fait que j'ai pleinement adhéré au film. Et comme à son habitude, Allen sort un vrai film de personnages qui gravite autour d'un duo savoureux.

On a donc d'un côté ce personnage arrogant (le côté so british de Firth lui sied parfaitement d'ailleurs) qui est destabilisé par la fraîcheur et la joie de vivre d'une (prétendue?) médium incarnée à merveille par Emma Stone. Et ça fait réellement du bien de trouver un duo qui fonctionne réellement dans une comédie romantique, où une véritable alchimie se ressent à l'écran. D'autant plus qu'il y a ce mystère qui plane sur les réelles attentions de la jeune femme, ce qui amplifie le dilemme pour le personnage de Firth qui lutte contre ses sentiments pour garder un semblant de raison.

La relation des deux personnages est d'ailleurs déterminée par le dilemme. Choisir entre la passion et la raison, que ce soit pour Firth ou pour Stone qui a le choix de se marier avec un autre homme aussi riche que bête. Si l'issue de la relation est relativement prévisible, l'écriture reste tout de même remarquable avec des personnages pas parfaits mais juste humains. Et on ne va sûrement pas se plaindre de voir des personnages qui existent vraiment, c'est tellement plaisant. En ça, Magic in the Moonlight apparaît comme étant un parfait feel-good movie. Rien de tel pour se regonfler le moral.



D'un point de vue purement technique, ce dernier Allen est remarquable. La photographie est un régal avec ces couleurs feutrées en intérieur et cet éclairage naturel en extérieur qui met si bien en avant les belles couleurs de la Provence. Woody Allen n'a jamais vraiment fait dans le contemplatif mais il soigne tellement bien ses cadres qu'il est capable de proposer des plans proches de tableaux. Je trouve notamment magnifique ce plan où le grand benêt joue un air d'ukulélé face à la mer.

L'humour de Woody Allen est toujours présent. Un humour cynique sans être cruel qui fonctionne bien grâce aux dialogues et à l'interprétation. D'ailleurs pour revenir succinctement sur ce point, ça fait du bien de voir Emma Stone dans un bon film car elle est vraiment charmante et pétillante. Ça tranche vraiment avec The Amazing Spider-Man où elle joue avec son mec dans la vraie vie sans qu'il y ait d'alchimie à l'écran, un comble!

Le contraste entre les deux personnages principaux est justement la source de cet humour avec toutes les contradictions qui en découlent. Et Firth est particulièrement bon avec sa diction du parfait aristocrate anglais qui rend le personnage encore plus cynique. Et j'aime ce genre de personnage: désagréable sur le papier mais sympathique dans le fond. La relation entre Firth et Stone est juste envoûtante bien que basée sur des illusions et des mensonges. Le petit message du film sur l'amour est également appréciable car tellement vrai. L'amour rend bête, aveugle mais heureux. Et c'est le principal.

Magic in the Moonlight est, pour ma part, un film abouti qui fait partie du haut du panier de la filmographie de Woody Allen. Bon certes je n'en ai pas vu des masses mais en tout cas il fait partie de mes préférés chez le cinéaste new-yorkais. Car sa recette est toute simple mais elle est pure, magnifique. Ça met du baume au coeur et on en ressort le sourire aux lèvres. Un très beau film.

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le 21 nov. 2014

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Moorhuhn

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