MANDARINES (16,4) (Zaza Urushadze, EST/GEO, 2016, 87min) :
Ce conte éloquent et humaniste dépeint le destin d'Ivo, vieil homme menuisier aidant son voisin producteur de mandarines, vivant seuls dans un village de la région d'Abkhazie (province de la Georgie) complètement déserté depuis l'éclatement d'une guerre en 1990. Zaza Urushadze nous entraîne dès les premiers plans sur ces terres trop souvent délaissées par l'actualité pour nous offrir un huis-clos souvent extérieur où les racines sont remises en question. La mise en scène sobre au cadre bien maîtrisé, parfois accompagnée par de lents travellings nous fait penser à certains tableaux iconiques et repose essentiellement sur un récit puissant. Une œuvre s'appuyant sur un dispositif efficace, un décor dépouillé, qui donne toute sa force et sa poésie dans certains plans évocateurs. Ce pamphlet anti-guerre un peu théâtral repose sur un scénario intelligemment agencé et sur des dialogues justes et brillants, laissant également place à l'ubuesque. Cette fable émouvante (qui fait penser au "No man's land" (2001) de Danis Tanovic) est envoûtée par la somptueuse musique de Niaz Diasamidze et fait la part belle aux jeux des acteurs tous excellents, mention spéciale à Lembit Ulfsak (élu meilleur comédien estonien du siècle) qui interprète Ivo. Venez vite découvrir cette pépite amère qui épluche l'absurdité des conflits interethniques dans "Mandarines". Un grand "petit film", cynique, beau, salutaire et bouleversant.