Considéré comme le chef de file du cinéma philippin, Lino Brocka tournera toujours avec des moyens limités ses nombreux films. Il est un des premiers réalisateurs de son pays a avoir osé sortir des sentiers battus des films nationaux commerciaux, souvent copies de succès étrangers, à base d'actions et/ou de sexe. Surveillé de près par la dictature des Marcos dans son pays, il joue l'anguille en alternant des sujets souvent innocents, mais parviendra tout de même à réaliser quelques pamphlets sociaux sur la vraie situation aux Philippines.
Ainsi, lorsque "Manille" sortira en 1975, il s'attire les foudres du pouvoir, en montrant la misère, la prostitution et la corruption qui gangrènent le pays. Loin de l'image que le gouvernement veut promouvoir dans le cinéma national. Il est assez remarquable de noter que ce film est sorti à peu près à la même époque que "Taxi driver" de Scorsese. Deux films aux deux extrémités de la planète, qui ont le même profil. Evidement Lino Brocka n'a pas les mêmes moyens techniques que son confrère américain. Mais cette limitation financière donne à son film son aspect documentaire et lui ouvre les portes des ghettos filmés avec un réalisme effrayant.
Le réalisateur tournera par la suite d'autres films dans la même veine que celui-ci, qui lui vaudront beaucoup de problèmes. Mais encore aujourd'hui "Manille" est considéré par la communauté internationale, comme le meilleur film philippin jamais tourné.