Viva Mexico !
Connue également sous le titre « Barbarous Mexico », cette énième anthologie de sketchs horrifiques n’échappera pas au fait que l’ensemble est inégal et que donc certaines histoires sont plus...
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le 14 avr. 2017
Film de Gigi Saul Guerrero, Aaron Soto, Lex Ortega, Edgar Nito, Ulises Guzman, Jorge Michel Grau, Laurette Flores Bornn et Isaac Ezban (2014)
México Bárbaro est une anthologie présentant huit courts-métrages réalisés par huit cinéastes mexicains: Laurette Flores Bornn, Edgar Nito, Aaron Soto, Isaac Ezban, Lex Ortega, Jorge Michel Grau, Ulises Guzman et Gigi Saul Guerrero. La qualité des courts est plutôt inégale, car si certains sont de franches réussites, d'autres sont des ratages complets. Etonnamment, on est jamais dans l'entre-deux, ce qui peut être vu à la fois comme une qualité et comme un défaut.
Les anthologies horrifiques semblent effectuer un retour en force au cours des dernières années. Tendance qui a commencé aux Etats-Unis avec la minisérie Masters of Horror en 2005, pour aboutir aujourd'hui à une flopée de petites productions indé, comme ABCs of Death, Southbound, et s'étendant même à d'autres pays, avec notamment México Bárbaro. Le monde du film d'horreur recèle un grand nombre de productions à petit budget efficaces, de qualité assez variable, allant de l'excellence au bousin infâme. Cette anthologie mexicaine est un exemple frappant de cet état de fait.
Etant donné le format de ce film, il serait bien inutile de parler de ses scénarios, ou de détailler chaque court un par un, une vision d'ensemble s'impose pour juger l’œuvre. México Bárbaro est loin d'être parfait, mais il s'agit d'une anthologie solide.
Le Mexique est un pays au folklore riche et étrange, rempli de terribles légendes emplies de surnaturel et de fantaisie; les traditions syncrétiques s'y mélangent sans autre avec l'horreur, particulièrement avec les nouvelles formes de communication modernes.
L'intérêt de cette anthologie est justement qu'elle parvient sans mal à mêler les époques entre elles, à parler aussi bien du présent que du passé, un bon exemple nous est offert dès le premier des huit courts, posant son intrigue en 2015, avec une histoire de journaliste enquêtant sur une affaire d'enlèvements, qui rencontre un membre d'un cartel et parvient à lui arracher quelques détails sanglants au sujet de son affaire. On est clairement en plein dans le Mexique moderne: Un journaliste menant son enquête; un rendez-vous dans l'ombre d'un motel poussiéreux, une rencontre avec des gangsters menaçants, conduisant bien souvent à une mort prématurée.
Cependant, ce court-métrage nous parle également du Mexique pré-colonial, un pays d'un autre temps, mais où existaient déjà la terreur et les bains de sang. En nous présentant de jeunes gens prostrés, les genoux ensanglantés, entourés par une horde d'hommes portant fièrement leurs tatouages tribals, murmurant des incantations en signe d'offrande aux dieux aztèques. Dans le mélange de la violence actuelle et de celle d'il y a 500 ans, ce court fait étrangement communiquer les sacrifices indigènes sanglants et les effrayants meurtres du crime organisé du Mexique d'aujourd'hui.
L'anthologie ne se limite toutefois pas à un simple conte sur l'histoire du Mexique, chaque court aborde un thème bien distinct, et emploie des techniques cinématographiques différentes, on y parle aussi bien d'histoires de fantômes que de meurtres d'enfants, ou de créatures démoniaques propres au folklore mexicain, et l'ensemble du vocabulaire horrifique est passé en revue, à travers la couleur, la déformation de l'image, du son, le montage et la suggestion. Les courts abordent également des genres parfois surprenants, comme la comédie horrifique, ou le film d'horreur urbain, l'ensemble du film semble toutefois traversé par un thème commun à tous les courts-métrages, à savoir la perversion sexuelle.
Ce thème prend de plus en plus d'importance au fur et à mesure de l'avancée dans le visionnage de l'anthologie, jusqu'à être poussé à l'extrême dans le tableau final, qui nous raconte l'histoire d'un club de pole-dance, dirigé par une femme qui torture ses strip-teaseuses. Tourné comme un réquisitoire violent et choquant contre le machisme omniprésent au Mexique, en jouant sans peine sur les thèmes de la tradition religieuse et de la politique.
Pour résumer, cette anthologie traite l'horreur comme un personnage à part entière, le rapport très particulier des mexicains avec le monde du surnaturel est fascinant, on est littéralement plongé dans un monde de carnage et de déviance, un monde de bruits et de pressentiments étonnants, qui proviennent de l'intérieur même de nos êtres et nous prennent aux tripes. Une part de nos craintes sont ici enracinées dans une vision corrompue du monde que nous connaissons; l'autre moitié représente l'égarement dans un cauchemar totalement étranger. México Bárbaro présente un montage de ces thèmes entrelacés avec le gore et la peur de certaines des légendes les plus troublantes du Mexique, ainsi que des versants les plus sordides de son histoire.
Dans l'ensemble, un film qui n'est de loin pas exempt de tout reproche, mais un effort louable découlant de l'union de cinéastes indépendants, nous racontant chacun à leur manière leur vision du Mexique et de ses mythes, une anthologie qui mériterait de se voir attribuer une ou plusieurs suites, à la manière de V/H/S ou ABCs of Death, tant cela contribuerait à donner une vitrine crédible au cinéma indépendant d'Amérique Centrale.
Créée
le 5 nov. 2016
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