Midori
6.5
Midori

Moyen-métrage d'animation de Hiroshi Harada (1992)

Midori est un moyen métrage d'animation de 1992 réalisé par Hiroshi Harada d'après le livre La Jeune Fille Aux Camélias de Suehiro Maruo qui appartient à la veine du manga Ero guro (mélange d'érotisme, de macabre et de grotesque). Durant 48 minutes aux images puissantes et évocatrices Hiroshi Harada nous embarque dans le destin tragique d'une gamine de douze ans plongée dans un univers entre Lewis Carroll, Hans Christian Andersen et Tod Browning.


Midori raconte donc l'histoire d'une jeune fille dont le père est mort et qui vend des camélias dans la rue afin d'aider sa mère mourante. Lorsque la jeune fille se retrouve seule elle trouve refuge auprès de M. Arashi un forain qui s'occupe d'une troupe de monstres de foire. La jeune Midori devient la servante et la souffre douleur de la troupe jusqu'à l'arrivée d'un mystérieux nain magicien dont elle tombe amoureuse.


Midori est un film d'animation dont la plus grande puissance vient de son graphisme très brut et sec servant à merveille les visions grotesques, malaisantes et cauchemardesque de son récit. Midori ressemble à l'un de ses contes cruel et sombre à la Andersen plongé dans le réalisme cru d'un drame sociale du japon des années 50 et qui se serait invité dans La Monstrueuse Parade de Tod Browning. Cette pauvre jeune fille ne trouvera pas une joyeuse famille de substitution auprès de ses monstres pour une fois presque aussi laids à l'intérieur qu'à l'extérieur et même si les faits sont bien plus suggérés que complaisamment montrés on comprend aisément que la gamine devra subir violence, sévices sexuels et servir de servante à cette troupe de freaks. Des monstres parmi lesquels on retrouve un home tronc rampant très inspiré encore une fois par le film de Browning, mais aussi un travesti cracheur de feu, une créature toute tordu et grotesque, un manchot recouvert de bandage renvoyant aux victimes de la guerre, un géant borgne et une mystérieuse femme qui avale des serpents. L'aspect purement sexuel de cette troupe de monstres de foire n'est absolument pas caché donnant lieu à des tableaux grotesques d'étreintes bizarres avec des plans à trois et des léchouilles de globe oculaire franchement étranges.


Dans ce contexte l'arrivée de Wonder Masamitsu, ce nain magicien aux allures de Méphisto, apportera à Midori la possibilité d'entrevoir l'amour même si l'espoir et les jolies choses ne durent jamais bien longtemps dans cet univers transformant les rares envolées oniriques en cauchemars lorsque Wonder Masamitsu se révélera finalement dangereusement possessif et violent. Le film est ainsi bourré de visions étranges, surréalistes et horrifiques comme lorsque dans un cauchemar Midori voit son corps se tordre et se déformer ou que vexé par son public Wonder Masamitsu transforme toute son audience en monstres dans un délire de déformations, d'explosions de viscères et de démembrements, le tout étant sublimé par le graphisme si particulier du film. Des visions fascinantes comme seuls l'animation peut nous en offrir et nous rendre crédibles. Il existe d'ailleurs une version de Midori live avec des acteurs et pour avoir regarder la bande annonce, tout ce qui étonne et subjugue dans l'animé semble totalement ridicule à l'image en vraie.


Quant à l'animation il est vrai que Midori semble souvent un peu rigide et statique , le réalisateur utilise parfois plusieurs plans fixes avec des fondus enchainés pour donner l'illusion du mouvement et ne s'embarrasse pas toujours de faire bouger les lèvres de ses personnages quand ils parlent. Rien toutefois qui ne plombe totalement le récit et empêche de se plonger dans les abîmes de ce sombre et poétique diamant brut et tranchant réservé à un public averti. Car bien sûr Midori s'adresse à un public adulte et demeure par exemple très fortement déconseillé à celles et ceux qui aiment les chiens autrement qu'en ragout.


Midori offre 48 minutes d'un trip hallucinant aux pays non pas des merveilles mais des monstres et de la misère du Japon de l'après guerre . Un film qui sublime la laideur d'un monde sans espoirs en quelque chose de fascinant et grotesque, en quelque chose de presque beau.

freddyK
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le 21 mars 2022

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