Film somme toute très sobre dans son déroulement et ses enjeux, Mixed Kebab vaut surtout pour le naturel avec lequel il s’attache à dépeindre le contexte musulman d’un homosexuel et de sa famille, et ses personnages impeccables. Il est d’ailleurs surprenant que le portrait le plus développé n’est pas celui de Bram (qui reste à sa simple place, assumant son orientation et vivant pleinement sa romance malgré les aménagements et concessions qu’il doit faire), mais celui de son ordure de petit frère. Cliché du wesh-wesh fréquemment auteur de petite délinquance, le film cerne avec une précision exemplaire ses sentiments et son état d’esprit, tentant désespérément de se distinguer et de sortir de sa condition de « petit frère », et d’abaisser ce grand frère qu’on lui a toujours montré comme exemple malgré un secret qu’il a réussi à percer. L’absence d’estime, les petites magouilles et la défiance vis-à-vis des normes qu’on lui a imposé, puis le revirement musulman intégriste, quand il rejoint à la suite d’une arrestation une association musulmane focalisée sur la diffusion d’infos sur les bavures policières et la dénonciation des oppressions de liberté de culte, laissé à leur propre appréciation (le film est sans concession concernant leurs objectifs, immédiatement perçus comme néfastes). Revirement intégriste qui enferme davantage Furkan dans sa posture de petit dernier pas crédible, dont les revirements sont perçus comme des caprices, et que la détermination à prouver sa valeur pousse à rabaisser son grand frère ou à empoisonner la vie de ses proches. Excellent personnage de petite ordure, brillamment dépeint tout au long du film, il est clairement la bonne surprise du long métrage. Le reste coule un peu de source, associant des fiançailles entre Bram et une de ses lointaines cousines encore installée en Turquie qui se rompent peu à peu, ainsi que l’idylle homo promise par le pitch. Rien de bien nouveau à ajouter, si ce n’est que le film respecte la pudeur de ses personnages et n’éprouve pas le besoin de filmer davantage que quelques caresses. Et que le drame évite la cruauté tragique, notamment avec une fin inattendue qui prône enfin un rapprochement plutôt qu’une scission indélébile. Sans gros budget, mais s’appuyant sur les interprétations sans failles de ses acteurs, Guy Lee Thys peint donc un drame convaincant, vivant (le contexte musulman est dépeint sans fard, et la distinction avec l’intégrisme est faite avec justesse) et empreint de plus de légèreté qu’à l’habitude, ce qui contribue donc à hisser vers le haut de la pile cette production tout à fait honorable.
Voracinéphile
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le 8 févr. 2014

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