Un beau jour, le directeur des films de la Paramount entendit son fils de quatre ans prononcer les mots "monstre" et voiture" dans une même phrase. Soudain, grâce à une étincelle encore scientifiquement inexpliquée au niveau de son activité neuronale, l'idée lui vint de faire un film avec un monstre dans une voiture ! Ben oui !
Aussi incroyable que véridique, le bonhomme poursuivit ce projet fou jusqu'à son terme et "Monster Cars" naquit. La suite, on la connaît : tourné en 2014, la sortie du film sera repoussée à trois reprises (!) jusqu'en janvier 2017 où, pas aidé par une promotion a minima, le public l'accueillera avec un magnifique flop retentissant (la Paramount y a perdu plus de 120 millions de dollars), brisant ainsi le doux rêve des studios hollywoodiens d'exploiter l'imagination débordante des enfants en bas-âge à des fins commerciales.
Avec une telle réputation de désastre ambulant qui lui colle à la carrosserie, il faut être désormais un peu suicidaire pour avoir envie de se lancer dans l'aventure "Monster Cars". Ça tombe bien, on l'est ! Et, croyez-le ou non, les bras et autres tentacules nous en sont tombés parce que force est de constater qu'on n'a pas passé un si mauvais moment...
Dans une petite ville du fin fond des États-Unis, une exploitation pétrolière libère par accident des créatures souterraines inconnues. Dans la casse où il travaille, le jeune Tripp recueille une de ces étranges bestioles (une sorte de mini-cachalot couvert de tentacules) et se rend compte qu'une fois abritée dans la carcasse de voiture sur laquelle il bricole, elle constitue une sorte de moteur biologique d'un tout nouveau genre. Avec ce monster truck littéralement vivant et aidé de la belle Meredith, il tente de contrecarrer les plans d'un roi du pétrole et de ses sbires prêts à tout pour éradiquer les créatures afin de poursuivre leur forage...
Le pitch est évidemment difficile à gober pour tout esprit cartésien mais, pour peu que votre naïveté enfantine soit encore active, vous voilà embarqués dans un divertissement essayant de retrouver la saveur des productions Amblin d'une époque révolue. Pour son premier long-métrage en prises réelles, Chris Wedge convoque donc les références et l'imagerie d'une certaine idée du cinéma familial qui avait encore la capacité à émerveiller tout autant les enfants que les adultes. Ceux ayant grandi avec ce type de films se retrouveront en terrain agréablement connu : l'ambiance typique de petite ville américaine, des lycéens interprétés par des acteurs de vingt-cinq ans minimum affrontant des adultes bien entendu très très méchants, l'amitié avec une créature attachante, la jolie fille (Jane Levy est à tomber), un humour bon enfant, les têtes éternelles de Rob Lowe, Barry Pepper ou Danny Glover en seconds rôles,... Tout est là pour recréer une sorte de succès anachronique, au risque parfois de faire ressentir un manque réel de surprises à cause d'un excès naïf de manichéisme propre à cet esprit et d'un récit balisé qui colle trop au plus près de ses codes.
Heureusement, "Monster Cars" compense le déroulement prévisible de son intrigue par une vraie générosité de péripéties sur un rythme où la notion d'ennui est bannie, le film n'oublie pas non plus de délivrer quelques messages sur la préservation de l'environnement (dont la crédibilité est mise à mal par les monster trucks et autres 4x4 qui roulent à toute berzingue aux quatre coins de l'écran mais bon...) ou sur la notion de figure paternelle, et, surtout, fait souvent mouche à chaque fois que l'émotion, l'humour ou les cascades improbables émanant de sa créature et de ses compagnons humains jouent leur propre partition dans ce spectacle amusant et efficace.
Les plus petits se régaleront, l'âme d'enfant des plus grands vibrera... Et le contrat sera donc pleinement et, il faut le dire, étonnamment rempli avec ce "Monster Cars" dont l'origine provient de l'esprit d'un enfant de quatre ans. À croire qu'ils sont plus inspirés que certains scénaristes hollywoodiens finalement...