Le retour au pays d'André Øvredal

Doté de pouvoirs dangereux qu'il ne parvient à contrôler, Eric erre seul dans l'immensité des forêts norvégiennes. À la suite d'un tragique concours de circonstances dans une petite ville, le jeune homme d'origine américaine se retrouve pourchassé par les autorités. Épaulé par une psychologue dans sa cavale, il tente de maîtriser et de comprendre la nature extraordinaire de ses dons...


Fort de ses expériences américaines ("The Jane Doe Identity" et "Scary Stories"), André Øvredal revient poser sa caméra sur ses terres natales ! Dans ses bagages d'outre-Atlantique, le réalisateur révélé par le génial "Troll Hunter" a ramené, en plus de la langue anglaise, l'acteur américain Nat Wolff afin de lui offrir le rôle-titre de ce "Torden" ("Mortal" à l'international), un retour aux sources forcément attendu au tournant...


Autant y aller franchement, si vous aimez les partis pris souvent intrigants du cinéaste, la première partie de "Mortal" risque de faire office d'une sacrée douche froide.
L'introduction silencieuse du film où l'on suit la souffrance de son héros perdu en pleine forêt a beau attiser notre curiosité, lorsque celui-ci entre en contact avec la civilisation, "Mortal" se met dangereusement à ressembler à n'importe quelle adaptation lambda d'un best-seller de la littérature young adult. Certes, les magnifiques paysages nordiques et une approche européenne plus intimiste vont rapidement vouloir inscrire les débuts de cette histoire dans un cadre plus réaliste et un ton bien plus sombre que toutes les productions mainstream de cet acabit mais, sur le fond, cela n'empêche pas le film de passer en revue les situations les plus stéréotypées du genre.
Pour un spectateur rôdé à tous ces ressorts, il est ainsi vite compliqué de s'impliquer entièrement dans l'énième destinée d'un jeune homme torturé par la puissance de ses super-pouvoirs et cherchant à échapper à un monde qui n'est évidemment pas préparé à accepter sa différence (le manque d'épaisseur de Nat Wolff dans le rôle n'aide pas), difficile de croire à la naissance préfabriquée de sentiments entre lui et la seule personnage féminine de son âge mise sur sa route, dur de percevoir un réel danger autour de deux menaces (une sur un plan personnel, l'autre plus globale) aux développements basiques et uniquement conçus pour servir l'évolution de leur adversaire hors-normes le moment venu...
En définitive, malgré un style européen plus appuyé, rien ne semble jamais parvenir à détourner "Mortal" d'un parcours que l'on sait ultra-balisé, même ses scènes les plus spectaculaires ne nous font pas vraiment tomber à la renverse...


Cependant, à mi-parcours, la patte d'André Øvredal va tenter de renverser la vapeur avec l'introduction d'un certain folklore pour expliquer l'origine des pouvoirs du héros. Par certaines visions peu à peu révélées au spectateur, le mystère n'en sera pas vraiment un (on aura également une sorte de "cours pour les nuls" en la matière afin de bien l'expliciter grâce à un personnage secondaire) mais, comme dans toute sa filmographie, l'habilité assez incroyable d'Øvredal à réveiller notre fascination autour des légendes dont il s'empare va une fois de plus se manifester avec brio pour enfin donner du relief à "Mortal".
Quelques interrogations pertinentes sur la place d'un tel être dans notre monde voient d'abord le jour (elles sont effleurées à défaut d'être approfondies), puis, au fur et à mesure que le personnage de Nat Wolff se rapproche des fondations de son identité, le film va retrouver un véritable nouvel élan ne pouvant que captiver par l'ampleur de ce qui est soudainement mis à jour. Pratiquement tout dans la dernière partie de "Mortal" s'en retrouve littéralement transfiguré (Nat Wolff inclus, visiblement conscient de la nouvelle dimension que lui offre le rôle) et, lorsque un rebondissement final survient (un brin facile, ok), cela permet même à André Øvredal de conclure son film sur une note d'une noirceur terriblement attractive, nous entraînant complètement à revers d'un dénouement dont on croyait tout connaître par avance !


Cela dit, cet enthousiasme aura été de courte durée, le générique de fin venant bien trop vite y mettre terme avec fracas, sans doute pour nous laisser en bouche le goût d'une potentielle suite beaucoup plus sombre.
Peut-être qu'à elle seule, cette dernière partie ne permet pas de sauver totalement "Mortal", probablement le film le plus mineur d'André Øvredal mais, bon sang,


la promesse d'une franchise prenant des allures d'anti-Percy Jackson nordique qu'elle nous laisse espérer vaut à elle seule le détour...

RedArrow
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le 12 juil. 2020

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