Comment c’est bien
Le cinéma français n’a pas beaucoup besoin d’être défendu, il se porte plutôt bien ; on n’en dira pas tant de l’animation, qui émerge depuis quelques années avec de jolis projets et commence à se...
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Le Festival de Cannes 2018 vient de fermer ses portes et les sorties cinéma en salles hexagonales reprennent leurs cours. Mutafukaz, film d’animation franco-japonais, réalisé par Shōjirō Nishimi et « Run », est un défouloir hybride et violent qui voit s’entremêler les univers hétéroclites de GTA, Clerks et d’Akira.
Après la parution de The Lastman de Jérémie Périn, c’est au tour de Mutafukaz, présenté précédemment au festival Gérardmer 2018, de mettre une pierre à l’édifice de l’animation française et de le faire avec punch et adrénaline. Adaptant le comics du même nom, le long métrage exacerbe toutes les fulgurances des traits de Guillaume Renard (Run) dans un monde post apocalyptique américanisé et bariolé, où l’humanité court de plus en plus à sa perte. Dans la ville miteuse de Dark Meat City, sorte de « GTA San Andreas » sous acide, lieu aux allures west coast ensoleillé où tous les gangs latinos s’affrontent pour avoir la suprématie, environnement délétère où la misère des petites ruelles fait rage, Lino et Vinz, aux physiques des plus particuliers (petits et grosses têtes noires ou de squelettes enflammés), vont voir leurs vies basculer suite à l’accident de scooter de Lino.
Suite à cela, il commencera à faire des cauchemars alambiqués et ils se verront poursuivre par une étrange société secrète. De prime abord, leur script ne parait pas des plus originaux : ce n’est pas à travers ce pitch voyant un enfant ou un adolescent avec des pouvoirs dissimulés hors du commun qui se verra être la cible d’une entité secrète qui souhaiterait conquérir la Terre que Mutafukaz sort des sentiers battus. Même si des thèmes comme l’humanité, la politique, le complotisme, la tolérance et le fait d’être soi même dans un monde stéréotypé et sanguinolent permettent au film de prendre de l’ampleur et une profondeur parfois inattendue, c’est avant tout pour ses graphismes urbains et son rythme haletant que Mutafukaz vaut le détour.
Ce qui fait du bien avec The Last Man ou Mutafukaz, c’est qu’enfin animation française ne rime pas forcément avec film pour enfant. La pelloche qui nous est présentée, défile à toute berzingue, passe au mixeur influences hip hop et japonaise, et mêle avec un certain brio l’enchaînement du récit et les déflagrations visuelles, souvent ultra violentes. Ça cogne, ça tabasse dans un bordel communicatif. Dans un style qui mélange les errements noctambules du road movie et les saccades du survival, Mutafukaz n’évite pourtant pas toujours les répétitions : Lino et Vinz arrivent à un point A et tout de suite après, leurs ennemis arrivent au pied levé pour les tuer ou les kidnapper.
C’est parfois un peu trop schématique comme façon de faire, mais ce sont des codes inhérents au genre. Sauf, que l’intérêt, outre cette histoire d’amitié rafraîchissante et parfaitement utilisée, n’est pas forcément dans l’emphase même du récit et ses digressions trop référencées (John Carpenter et Assaut) comme peut le faire aussi une série telle que Stranger Things, mais se concentre plus sur sa farandole de rides d’actions multivitaminés et sa mosaïque de personnages tous plus badass les unes que les autres, que cela soit des catcheurs mexicains, des « Men In Black » armés jusqu’aux dents ou des militaires à la « Killzone » sortant l’artillerie lourde.
Avec une animation fluide qui change de styles avec ferveur, sous les voix laconiques d’Orelsan et Gringe et le pulse de la bande son technoïde de Toxic Avenger, Mutakukaz est un divertissement aussi bringuebalant que jouissif, qui tire dans les sens sans forcément toujours toucher sa cible. Mais passé les défauts juvéniles et régressifs, le long métrage se savoure avec un certain appétit.
Créée
le 26 mai 2018
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