Eva Ionesco connue pour avoir posé nue à l’âge pré pubère dans les années 70 devant l’appareil photographique de sa mère Irina Ionesco raconte son histoire de petite fille « modèle » dans « My little princess », présenté au festival de Cannes 2011; en dévoilant la relation de haine et d’amour qu’elle partagea avec sa génitrice.
Dans une ambiance très glauque mais toujours fascinante, ce film est porté par l’interprétation extraordinaire d’Isabelle Huppert pour rendre l’excentricité de cette femme sans doute trop jugée dans son enfance par sa Grand-Mère très pieuse qui a choisi de sacrifier celle de sa fille en la revêtant de satin noir et en l’exhibant comme objet érotique pour arriver à se tracer un chemin dans le monde de l’art parisien. Face à elle, la petite Anamaria Vartolomei est déconcertante de naturelle et de maturité.
Ionesco qui se livre à une sorte d’exorcisme dépeint de manière fidèle le milieu artistique branché des années 70 qui sous couvert de laisser libre cours à l’inspiration des artistes de toutes les initiatives, a encouragé des démarches parfois douteuses. Mais les choses sont souvent plus complexes qu’on le croit au premier abord. Si le réflexe immédiat du spectateur est de condamner cette mère égocentrique et immature, il faut reconnaître à Eva Ionesco le mérite d’admettre implicitement s’être accommodée de la grande liberté offerte par l’éducation baroque et anarchique prodiguée par sa mère.
Malgré tout, la scène très ambigüe en Angleterre où Irina laisse sa fille en proie aux fantasmes pédophiles d’un jeune lord anglais montre clairement que la protection de l’adulte s’est plusieurs fois effacée devant l’appât du gain ou de la notoriété.

L’histoire est calée sur le système des allers et des retours. La mère va et vient, vitupère et papillonne. La fille oscille entre la grand-mère courage et l’inconséquence maternelle. Ce systématisme rassure ou agace dans le sens où il plante ses personnages : on les cerne mais on les voit aussi enraciné dans un rôle fonctionnel, et donc artificiel. Si la mère Hannah attrape un intérêt, c’est dans son absence de déterminisme. Elle est pathologiquement atteinte ; mais dommage que le film n'apporte pas d'explication sur ce détail justement.

Pourtant on accroche! on est comme hypnotisé par la magie des décors, des symboles , des réflexions que l'intrigue et la mise en scène nous dévoile. Ce film m'a énormément plu !

Eva Ionesco parle d’elle et de son enfance escamotée. Elle précise avoir édulcoré pour moins choquer et se concentrer davantage sur la narration. On ne peut attaquer le film et sa créatrice sur le thème de la sincérité, évidente. On peut par contre s’interroger sur la volonté autarcique de ne parler que de soi-même. Les références au monde extérieur ne sont qu’apparats de circonstance, rien ne compte plus que la bonne bouille de Violetta. On tient là, aussi, une des qualités du film : l’adéquation entre un univers formel clos et oppressant et un autisme assez sidérant. Quelle est la place du spectateur dans cette célébration du Moi dévasté ? Eva Ionesco a-t-elle quelque chose à partager avec son public ?
Le public sert d'intermédiaire, de spectateur devant cette cure psychanalytique d'une mère et sa fille.

L’autre intérêt de ce film est la collection de tenues plus extravagantes les unes que les autres portées par les deux actrices et nous montre aussi les coulisses de l'art photographique. ( l'ère où l'argentique était roi). La dimension autobiographique du film est appuyée par les jeux des couleurs noir et blanc des photos et des prises de vue et l’imaginaire fétichiste évoquant l’univers visuel de Pierre Molinier.

Narré sous forme de conte, “My Little princess est un récit de transition. Et ce faisant, dans un film, de faire de son tyran sa créature, la petite poupée devient à son tour une artiste accomplie.
AudreyAnzu
9
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le 7 févr. 2013

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AudreyAnzu

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