Prime Cut
On pourrait jurer qu'il s'agit d'une énième itération du film low budget nippon comico-gore de zombies mais bien heureusement, c'est plus que ça *. Le bon buzz galopant, de son succès au Japon...
Par
le 26 déc. 2018
49 j'aime
3
Il faut faire preuve d’une certaine patience pour apprécier ce curieux objet à sa juste valeur. Les formalistes pourront déjà, dans le premier segment, reconnaître un certain talent à l’équipe qui réalise un unique plan-séquence de 37 minutes, d’un film intitulé O*ne cut of the Dead*, et qui imagine un tournage fauché sur un film de zombies durant lequel déboulent de véritables zombies.
La mise en abyme suppose donc déjà deux niveaux de visionnage : le tournage encadré, particulièrement nul en termes de jeu et d’effets spéciaux, sur lequel s’énerve le réalisateur qui n’obtient pas ce qu’il veut, et qui brille en effet par son manque de qualité, mais semble pouvoir s’excuser dans la mesure où elle serait volontaire. Le deuxième niveau ne relève pas excessivement le niveau, les « vrais » zombies n’étant pas véritablement plus convaincants, les comédiens un peu en roue libre, le scénar très flottant et le plan séquence assez foireux par moments,
Au bout des 37 minutes, le film reprend un mois auparavant pour nous présenter un troisième niveau, à savoir le tournage du plan-séquence en question par un réalisateur qui n’est pas en position de refuser une telle proposition. On apprend alors que le plan unique sera diffusé en live, ce qui interdit toute coupure dans la prise, ajoutant un défi à une entreprise déjà sacrément compromise.
A partir de cet instant, tout fait sens. Si les ressorts comiques (un technicien bourré, l’autre en proie à une gastro, une comédienne qui prend trop son rôle à cœur, un père qui veut reconquérir l’estime de sa fille…) sont éculés au possible, la relecture intégrale du premier plan-séquence explique tout ce qui semblait raté dans la première mouture : la longueur démesurée d’un plan, l’impossibilité d’un contre-champ, l’improvisation des acteurs (pendant qu’on leur brandit des cartons pour les intimer à la patience). L’effet Rashômon se fait donc ici à la faveur d’un moyen métrage entier, assez jubilatoire dans l’évocation d’un bordel à gérer dans l’instantanéité, le bricolage et l’improvisation.
En résulte un amusant exercice de style, qui sait donc transcender son manque de moyen (le film, issu d’abord d’un atelier d’acteurs et de réalisation, aurait été réalisé pour 25000 $ - sans cachet pour les comédiens qui au contraire payaient pour intégrer le stage, malin… avant d’en remporter 25 millions) par une inventivité de chaque instant, alliée à une belle déclaration d’amour au cinéma d’artisan.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Cinéma, Les meilleurs films de zombies, Effet Rashomon et Vu en 2021
Créée
le 1 juin 2021
Critique lue 1.2K fois
30 j'aime
2 commentaires
D'autres avis sur Ne coupez pas !
On pourrait jurer qu'il s'agit d'une énième itération du film low budget nippon comico-gore de zombies mais bien heureusement, c'est plus que ça *. Le bon buzz galopant, de son succès au Japon...
Par
le 26 déc. 2018
49 j'aime
3
A l'heure où quelques pingouins mondains se tapent sur les cuisses devant un zombie movie amorphe qui radote, histoire de dire qu'eux aussi, ils aiment (hypocritement) le film de genre, il y a de...
le 18 juil. 2019
31 j'aime
6
Il faut faire preuve d’une certaine patience pour apprécier ce curieux objet à sa juste valeur. Les formalistes pourront déjà, dans le premier segment, reconnaître un certain talent à l’équipe qui...
le 1 juin 2021
30 j'aime
2
Du même critique
Cantine d’EuropaCorp, dans la file le long du buffet à volonté. Et donc, il prend sa bagnole, se venge et les descend tous. - D’accord, Luc. Je lance la production. On a de toute façon l’accord...
le 6 déc. 2014
774 j'aime
107
Il y a là un savoureux paradoxe : le film le plus attendu de l’année, pierre angulaire de la production 2019 et climax du dernier Festival de Cannes, est un chant nostalgique d’une singulière...
le 14 août 2019
715 j'aime
55
La lumière qui baigne la majorité des plans de Her est rassurante. Les intérieurs sont clairs, les dégagements spacieux. Les écrans vastes et discrets, intégrés dans un mobilier pastel. Plus de...
le 30 mars 2014
617 j'aime
53