Qui de l'homme ou de la bête...

La lumière diminue pour disparaître de la salle obscure, les chuchotements meurent... Ca y est, ça commence. L'écran noir s'illumine de phrases soulignant que les grands espaces de l'Ouest américain se réduisent comme peau de chagrin, piétinés par la surpopulation et la surexploitation. Les chevaux sauvages qui y régnaient sont donc menacés par l'homme, qui, pour garder le contrôle, a décidé de capturer ces créatures de manière à réduire leurs populations. Ces animaux indomptés sont donc enfermés au sein des prisons pour intégrer des programmes où ils sont domestiqués par des prisonniers. La finalité de leur sort est d'être euthanasiés pour les plus farouches, ou encore de servir aux policiers patrouillant le long de la frontière avec le Mexique...un comble. Le contexte est posé. On observe alors peu à peu Roman Coleman, prisonnier. On ne peut le définir qu'ainsi cet homme silencieux et impénétrable. Le mutisme de cet homme qui ne se plie pas, le pousse d'isolement en isolement. Après son arrivé dans cette prison, une sorte de psy/conseillère, devant ce mûr qu'est Roman le force à intégrer le programme de domestication des mustangs.


On voit alors peu à peu Roman évolué au contact de ces chevaux fougueux. Il grimpe peu à peu les échelons, passant du nettoyage de crottins à la monte de ces créatures magnifiques. Dès le début, il est irrésistiblement attiré par le plus "fou" et un parallèle entre ces deux êtres mystérieux est fait. Etres incompris, impétueux, qu'il faut calmer (je dirai même mater) : l'un l'est à l'aide de kétamine, l'autre à l'aide des menottes et des gardiens. Ces deux êtres peuvent basculer, perdre le contrôle en quelques secondes. En effet, une réunion avec la conseillère, où Roman décide pour la première fois de s'ouvrir (le changement opère) accompagné d'autres prisonniers, nous fait prendre conscience que la vie des ces hommes a tourné au cauchemar en l'espace de quelques instants.


L'apprivoisement de cet animal repose sur un dialogue mais ça Roman ne le comprend pas, il ne parle pas, ne s'exprime pas. Il ne comprend que l'usage de la force, ce qui lui vaut d'être expulsé du programme. Et oui, on ne passe pas ses nerfs sur un animal parce que celui-ci ne fait pas ce qu'on veut, ne le comprend pas. Après tout, il n'a rien demandé à personne, il n'a pas demandé à être arraché de son environnement naturel. Et lui, à la différence des autres prisonniers, n'a commis aucun crime. Roman doit s'ouvrir et être à l'écoute du cheval, c'est ce que l'isolement va lui faire comprendre. Il continue à penser à son cheval, son double. Il s'instruit et va donc comprendre que s'il veut absolument entrer en contact avec Marquis (et oui, en plus il lui donne même un nom ! Ce n'est plus seulement une bête...), il doit être patient, doux et communiquer. Ce film baigne un peu dans le cliché : le cheval qui, après l'énervement de Roman qui perd patience "Rhâ ce foutu canasson qui n'entend rien, ne comprend rien", semble tout d'un coup comprendre que Roman ne lui veut aucun mal et entre alors en contact avec lui. Le cheval qui fuyait l'homme cherche soudainement le contact... Cela manque de crédibilité et c'est un peu cucul la praline avouons le.


Le film met donc l'accent sur la relation homme-cheval, mais pourquoi oublier les relations de Roman avec les autres. Sa relation avec sa fille, par exemple, n'est pas assez poussée. Alors certes, on peut comprendre que développer un lien entre un détenu et une personne extérieure à la prison soit compliqué, mais il en est de même avec les autres personnages : le maître-chanteur, l'ami... C'est bien joli mais cela ne va pas bien loin, tout cela manque un peu de psychologie et on se demande à quoi cela sert à part ajouter des péripéties.


L'esprit de liberté (assez paradoxal en effet) que reflètent de belles scènes de chevauchées fantastiques, de paysages sauvages servent l'esthétique du film. La prestation de Matthias Schoenaerts n'est pas pour rien dans la réussite de ce film et sa puissance. Il réussit à nous transmettre des émotions et à nous faire oublier le côté gnangnan. J'avoue avoir eu de petits frissons lors de la fin du film devant ce geste de Roman qui veut, pour cet animal qu'il respecte, ce que lui ne peut avoir, il ne veut pas de cette injustice, d'une punition imméritée.
La démonstration du lien indéfectible qui unit parfois l'animal et l'homme clôture en beauté ce film.

Alexa-Lou
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le 3 juil. 2019

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