Never Sleep Again The Elm Street Legacy est un gros morceau à ronger pour tous les fans de la saga de ce bon vieux Freddy Krueger. Un documentaire de presque quatre heures réalisé par Daniel Farrands et Andrew Kasch qui revient sur quasiment tout ce que la saga compte de films et d'interrogations. Il faut toutefois préciser que ce n'est pas un documentaire totalement original et nouveau et qu'il ressemble à un immense collage des bonus présents sur les éditions de l'intégrale de la saga horrifique, mais pas uniquement.
Introduit par un très chouette générique en stop motion reprenant quelques séquences culte du premier film Never Sleep Again The Elm Street Legacy va ensuite dérouler une mécanique un peu répétitive en égrainant de façon chronologique les différents films du croquemitaine au chapeau mou et aux griffes dures. Forcément le tout premier film prend une place de choix avec près d'un quart de la durée totale du film. On revient sur les origines du personnage inventé par Wes Craven à partir d'un authentique fait divers d'un adolescent mort durant son sommeil alors qu'il refusait de dormir depuis plusieurs jours. Cette première partie pose d'ailleurs toute la mécanique qui accompagnera l'évocation des différents films de la saga à travers des thématiques successives comme l'écriture du scénario, le choix du réalisateur, l'élaboration du casting, le tournage, les effets spéciaux et finalement l’accueil critique et public du film. Tout ceci pourrait sembler très répétitif mais la profusion d'intervenants, la diversité des anecdotes et surtout le fait qu'ils ne pratiquent pas trop la langue de bois donne à ce documentaire la consistance d'un gros morceau de bravoure indispensable aux fans de la saga. Les intervenants du second volet (qui a faillit se faire sans Robert Englund) reviennent largement et avec beaucoup d'humour sur l'aspect gay du film qui, si il n'était pas toujours conscient sur le tournage, leur saute aux yeux aujourd'hui faisant du film le Top Gun de l'horror movie et le classant toujours numéros un des films d'horreur gay friendly. Le film sera un joli succès en dépit de nombreux contresens vis à vis de la mythologie mise en place par Craven et d'effets spéciaux parfois un peu limite avec un concepteur d'effets visuels qui avoue même qu'il avait un peu la tête ailleurs. Le troisième volet qui va sans définitivement poser les ressorts de la franchise avec son humour noir et une sorte de surenchère à trouver des morts de plus en plus graphique et visuellement fantastique fait entrer le personnage de Freddy dans sa dimense iconique de la pop culture. Le film n'élude pas pour autant la réalité d'un tournage très rude et tendu pour les comédiens et comédiennes justifié par Chuck Russel par une volonté de maintenir son casting dans un état de tension, de fatigue et de peur. Ce troisième volet plus léger comporte toutefois des scènes fortes qui remette Freddy dans sa dimension de prédateur sexuel avec adolescent attaché sur un lit et vision cauchemardesque d'un Freddy en forme de serpent mais qui dans un premier temps ressemblait à un énorme pénis.
On apprend que pour le quatrième volet le studio a engagé Renny Harlin qui était à l'époque au fond du trou à tel point qu'il ressemblait à un viking clochard et puant venant quémander du boulot chez New Line. Le film écrit pas Brian Helgeland est orienté vers la culture HK ne sera une nouvelle fois pas de tout repos pour le casting, on voit d'ailleurs dans une courte séquence Robert Englund exprimé son ras le bol lors du tournage. Le film évoque aussi largement les effets spéciaux artisanaux du film comme la scène de la pizza qui est en fait une pizza géante avec les acteurs qui passent leurs têtes par en dessous (un rappel amusant au maquillage de Freddy dans le premier film dont le visage est inspirées par une pizza peppéronis). Ce même procédé de gigantisme sera repris avec un buste de plusieurs mètres de Freddy dans lequel se débattent des acteurs et qui s'écroulera par accident lors du tournage. Une nouvelle fois le film est un immense succès qui permettra la résurrection de Renny Harlin qui encore aujourd'hui reconnaît qu'il doit énormément à ce film. On continue fatalement par le cinquième volet dans lequel le désir de revenir vers un aspect plus sombre ne sera pas tout à fait respecter même si le film aborde à nouveau en sous texte des thématiques forte comme l'avortement. Le film connaîtra de nombreuses coupes de la censure et sonnera surtout un peu le déclin de la saga auprès de fans qui commencent à se lasser du concept.
Le retour sur le sixième volet intitulé La Fin de Freddy est assez passionnant même si c'est paradoxalement le moins bon film de la saga. Cet ultime volet (du moins au moment de sa conception) est surtout un immense rendez vous râté avec Peter Jackson qui travailla un temps sur le film avec un script dont les embryons étaient diablement prometteur puisque l'on retrouvait un Freddy quasiment devenu clochard car plus personne n'avait peur de lui et que tout le monde le considérait comme un guignol (Ce qui était effectivement devenu le cas). Il se retrouvait persécuté par des jeunes violents qui prenaient des cachés pour s'endormir afin de venir le tabasser et se foutre de lui, avant bien sûr qu'il ne trouve un moyen de venger. Franchement cette idée de script plus Peter Jackson à la barre moi j'aurai signé tout de suite. Finalement le film assez insipide sera réalisé par Rachel Talalay et l'on sent pour une fois un soupçon de langue de bois chez les intervenants ne souhaitant pas trop charger la réalisatrice. Robert Englund avoue tout juste que le film est trop humoristique et qu'il n'est pas totalement dans la mythologie du personnage mais que l'aspect explosion et déconstruction du mythe justifie presque l'ensemble. Parmi les nombreuses anecdotes on retiendra que Divine devait figurer dans le film, que Nintendio refusera d'être cité dans la scène du jeu vidéo et que la comédienne Lezlie Deane est devenue une sorte d'artiste gothique au look assez impressionnant.
Ensuite le documentaire évoque le comeback du griffu sous l'impulsion de Wes Craven lui même qui révisait ici ces gammes de méta-slasher qui serviront plus tard pour Scream. L'aspect grande réunion de famille, les interrogations sur le genre, l'intellectualisation du mythe le surtout retour de Wes Craven aux commandes donnent la sensation que personne parmi les intervenants semble vouloir emmètre de réserves sur le résultat du film. Robert Englund confesse même que c'est pour lui le meilleur film de la saga. Puis vient le dernier opus en forme de récréation et de fantasme de geek boutonneux avec la rencontre entre Jason et Freddy sous la caméra d'un Ronnie Yu qui avoue ne pas aimé les deux franchises. On revient sur les dizaines de scripts et la vingtaine de scénaristes qui ont tentés de matérialiser ce cross-over avec des idées complètements tordus comme le fait que Freddy aurait violer la mère de Jason ou qu'ils s'affronteraient dans un combat de boxe. L'immense Kane Hodder revient un poil désabusé sur le choix de New Line de l'écarter du projet au profit d'un acteur plus grand, mais le plus amusant concerne la comédienne Monica Keene totalement traumatisée à 8 ans par Les Griffes de la Nuit et qui s'est retrouvée toute heureuse de pouvoir décapiter le croque mitaine dans le film. Si l'on apprend que Pinhead devait apparaître à la fin et que l'idée d'un Jason VS Freddy VS Ash a un temps circulé, le mot de la fin reviendra à Robert Englund qui d'un ton amusé reconnaîtra qu'il est un peu vieux pour ses conneries en disant que le prochain devrait être Freddy Meets Viagra.
Never Sleep Again The Elm Street Legacy est un documentaire extrêmement riche et pas trop complaisant. Le film remet en lumières les thématiques sombres et fortes de la mythologie de Freddy Krueger tueur d'enfants sadique se nourrissant des peurs et des tourments de l'adolescence en abordant des sujets tels que le suicide, la drogue, l'avortement, l'identité sexuel et le tout sous le regard d'adultes qui ont du mal à les croire et simplement les écouter. Le documentaire remet aussi en lumière l'opportunité offerte à de jeunes réalisateurs de faire leur armes avec Jack Sholder, Chuck Russel, Renny Harlin et Stephen Hopkins mais aussi à quel point les Freddy ont permis à New Line de devenir un studio majeur tout en restant longtemps indépendant. Même si c'est trop rapide à mon goût le documentaire aborde aussi la série télévisée Les Cauchemars de Freddy, une sorte de Twilight Zone avec Freddy en maître de cérémonie qui carburait au gore et au sexe et dont quelques rares épisodes exploraient les origines de Freddy. Le film évoque aussi sommairement le merchandising et toute la portée iconique d'un Freddy partiellement dévitalisé de son aura maléfique à l'image de ces pyjamas Freddy Krueger pour gosses symbolisant toutes les contradictions d'un monde ou l'on habille ses gamins des oripeaux d'un tueur pédophile.
Si l'on excepte les absences en intervenants direct de Johnny Depp et Patricia Arquette et un sujet qui manque sur influence de Freddy Krueger sur l’industrie du cinéma horrifique avec la naissance de nombreux ersatz comme le Wismaster ce Never Sleep Again The Elm Street Legacy très riche en informations s'impose comme un incontournable pour les fans de la saga. Et puis en guise de dernier cadeau les nombreux intervenants du documentaire s'amusent à reprendre quelques célèbres dialogues de la saga lors du générique de fin.