J'avais lue la BD quand elle était sortie et elle m'avait vaguement ennuyée, mais je voyais qu'il y avait des qualités. Ce film répare la vaste majorité des problèmes narratifs dont souffrait Nimona la BD, ce qui en fait une animation avec un scénario bien construit. C'est un peu la problématique de Superman : comment créer un personnage invincible et surpuissant, et quand même lui donner des problèmes ? C'est possible, et c'est réussit. Il y a des choix rebelles et novateurs que j'apprécie : le 3ème rôle asiatique, une relation gay au premier plan, le choix des couleurs inhabituel pour sortir des clichés et des a priori. Tout ça c'est très bien.
Bon, voilà pour les bonnes choses. Maintenant, les mauvaises :
- C'est très bien animé, mais la texture des personnages est vraiment vide, avec un cell shading très évident. Accompagné des gros yeux style Disney/Pixar, c'est... pas très joli. Je suppose que c'est une histoire de budget aussi tout simplement, et c'est dur de faire de la compétition à Pixar sur ce plan, mais il y a sûrement d'autre moyens de faire quelque chose de joli sans faire... ça.
- Le monde médiéval et simultanément haut en technologie semble vide et pas très joli non plus. Le worldbuilding ne semble pas très vivant. Ce n'est pas le but de l'histoire manifestement mais il y a un arrière-goût de pauvreté.
- On ne révèle jamais ce qu'est le personnage de Nimona. Dans la BD c'était encore plus gênant car toute l'histoire repose sans cesse cette question, "Qu'est-ce que Nimona ?" pour finalement donner une grosse claque au lecteur en ne lui révélant strictement rien. Je suppose que c'est la morale de l'histoire : Nimona n'a pas besoin d'être catégorisée pour exister, être Nimona suffit et devrait suffir amplement. Cette question est moins présente dans le film même s'il y a quand même des allusions, de sorte qu'on est moins frustré sur la fin quand comme prévu, rien n'est révélé. Mais il y a à mon sens une confusion entre les attentes du lecteur de la part du worldbuilding et la métaphore de transidentité qui est, bien que louable, pas franchement jouissive ni très intéressante. L'histoire se contente d'être une métaphore et n'explore absolument rien quant au monde ou aux circonstances des personnages, ce qui en fait juste une sorte de salve LGBT au lieu d'une histoire à part entière qui tient sur ses deux pieds. J'aurais trouvé ça plus intéressant qu'ils trouvent d'où vienne Nimona et lui inventent une nouvelle catégorie si besoin, au lieu de refuser toute information comme si elle n'existait pas. Tout le monde a des parents, tout le monde vient de quelque part, c'est un peu idiot de présenter ça comme sortant de nulle part.
- Dans la même veine, les personnages sont très deux dimensionnels. Nimona est définie par le fait que personne ne l'aime, l'autre est défini par le fait qu'il est une victime et qu'il accepte Nimona, ça ne va pas beaucoup plus loin.
- Les péripéties des protagonistes, qui consistent à retourner plusieurs fois dans un gros immeuble gris pour tout casser, sont assez inintéressantes, visuellement et narrativement (c'est bien animé par contre).
Je mets un gros 6 parce que c'est bien de faire des choses inclusives et que c'est bien fait globalement, et aussi que c'est pour les enfants. Après, narrativement il y a des choses qui font que ce n'est pas très intéressant à regarder, et on reste vraiment sur sa faim pour un résultat plus ou moins désagréable. Les métaphores d'inclusivité, même si elles ne sont pas aussi explicites sur la question trans, il y en a déjà plein, donc peut-être faire un effort sur la partie qui donne envie de regarder le film.