Le papa spirituel d'Hendrix ?
Nitaboh est le genre de film qui se regarde par simple curiosité, sans en attendre grand-chose. La véritable plus value de cette oeuvre est son thème : la musique. Et plus précisément la vie d’un des maîtres de shamisen, fondateur du style Tsuguru. En somme un rythme relativement lent, intimiste, laissant place à la musique est la direction qu’on peut supposer de ce film.
Malheureusement le chemin suivit n’est pas celui-ci, du moins pas seulement… Car la réalisation est hétéroclite, sans doute une obligation des producteurs voulant toucher un public très large. Et ainsi d’atteindre également un public habitué au shönen, c’est véritablement ici que le problème réside, tel un poison dans la réalisation. Cela s’illustre par l’ajout d’un personnage lourd et inutile dont la mission est d’apporter un ton décalé. Mais aussi par des scènes qui cassent totalement le rythme, et bien sûr l’introduction de musiques épiques qui ne sont pas du tout en phase avec les images… J’oubliais également la présence de passages qui agacent par leurs formes, comme la mort du père de Nitaro… Qui frise le ridicule.
D’autres défauts plus pardonnables sont présents, cela concerne surtout l’atmosphère. À mon humble avis le rythme pourri complètement l’ambiance, et vu le thème c’est bien dommage. Car j’aurai préféré un montage beaucoup plus contemplatif, et qui laisse apprécier la musique de Nitaro, cela aurait rendu véritablement hommage au maître. Ce qui agace donc c’est le choix de vouloir rendre épique, ce qui n’a pas lieu d’être. Malgré tout dans certaines scènes l’hommage est au rendez-vous, le plus réussi est celle ou Nirato apprend le shamisen. C’est un très beau moment ou la musique prend les devants, donnant la possibilité de jouer sur l’émotion par le biais des images. Pourquoi cette remarque ? Car ce qui dérange le plus dans Nitaboh c’est que la musique shamisen n’est pas suffisamment exploitée… Car les passages l’usant sont très vite expédiés au profit d’un drame de bas étage, et autres facilités scénaristique. Même le final étant un duel entre un jeune moine talentueux (Personnage par ailleurs très caricatural) et Nitaro, qui est pourtant l’apothéose du film, (du moins dès que le maître livre au monde son Art) donne un goût très amer… À l’instar du film beaucoup trop court, et usant constamment de la facilité.
C’est donc un véritable problème d’ambition qui ressort, d’ailleurs très lisible par la direction artistique choisie. Les paysages et les décors sont appréciables, sans être extraordinaires, par contre le point noir est dans le design des personnages très commun, caricaturaux, et surtout très mal animés. En gros un film d’animation très proche de la qualité d’une série d’animation…
Dans la même idée, le contexte historique concernant le passage du Japon de l’ère Edo à l’ère Meiji impliquant un bouleversement culturel et surtout de nombreuses réformes, n’est que vaguement explicité. Disons qu’il est relégué comme un thème utile pour justifier la révolution que va apporter Nirato dans la musique traditionnelle, auparavant réservé aux moines, et donc à l’élite. Ce point n’est pas complètement anecdotique, car utilisé par un personnage moderne qui va être l’un de ses plus grands fans de Nirato. Et sera d’ailleurs l’un des moteurs lui permettant d’atteindre le sommet de son art. Toute fois quelques regrets résident, car l’oeuvre se veut éducative, de ce fait sur ce point on est en droit d’en attendre un peu plus.
En somme Nitaboh aurait pu être une belle fresque historique et éducative avec une réalisation plus ambitieuse et prenant un peu plus de risques. Et non pas un petit film banal, sans magie et poésie, et par conséquent vite oublié…