En 1988, un référendum est organisé au Chili pour définir si Pinochet, au pouvoir depuis un coup d'état en 1973, doit rester à la tête du gouvernement. C'est la première fois que la campagne politique passe aussi par la télévision, et les partisans du "No" entreprennent la tâche de motiver leurs concitoyens à s'opposer à la présidence de Pinochet, malgré leur peur, le sentiment d'inutilité et leur désespoir. "No" raconte cette campagne, menée par René Saavedra, publicitaire.
Le film place donc son récit à une époque de grandes mutations, idéologiques et technologiques. L'intérêt est de montrer l'union de ces deux concepts : avec la télévision, il est possible d'appliquer des principes publicitaires pour motiver le votant à choisir le "No", qui devient un produit à faire vendre. Cette idée et ce qu'elle implique se trouvent être passionnants, bien qu'on regrette souvent que les choses n'aillent pas plus loin, que l'on n'explore pas ou peu les dérives de cette adéquation nouvelle. D'ailleurs, le film semble constamment hésiter sur son focus, peinant à trouver la bonne distance dans une histoire à la fois nationale, concrète et personnelle.
La même chose peut en être dite de sa réalisation : souvent approximative, une caméra tremblante s'allie à des choix peu justifiés de mise en scène, comme ces brusques changements de décor lors des conversations, qui font tâche dans un film montrant peu d'autre ambition artistique. On appréciera cependant ce grain intrinsèquement latin de l'image, et qui est parfaitement construit ici, ainsi que la reconstitution amusée des années 80 chiliennes.
Au total, si "No" peine à formuler pleinement son propos, son idée de base restera bonne, et on saura en savourer les moments d'humour, de suspense, de paranoïa ou d'injustice. Le jeu de Gael García Bernal est bien sûr impeccable, dans un rôle plus confiant qu'habituellement, et le suivi de son personnage tout au long d'un moment historique peu enseigné en France reste très intéressant.