Nuit et brouillard est un dialogue face à l’indicible.
Court, désincarné, c’est un film avant tout sur la foule et le nombre, sur la masse et l’étendue du chaos. Une introduction à l’abime, qui du fait même de sa densité nous confirme les gouffres de notre histoire.
Un va et vient entre les images d’archives et le silence assourdissant du présent en couleur, inerte, des lieux sur lesquels l’herbe a repoussé et dont on ne peut « montrer que l’écorce ».
Un documentaire sur l’ingénierie humaine, l’intelligence au service du rendement, la micro structure d’une société à l’intérieur du camp, sa hiérarchie et son fonctionnement. Un procédé pragmatique qui n’est pas sans rappeler celui de Merle dans le tout aussi éprouvant La mort est mon métier.
Nuit et brouillard est une voix, un texte qui avec la plus grande pudeur possible, se contente d’aligner les faits, dans un catalogue à l’horreur croissante.
Nuit et brouillard est un film sur l’épouvante sans fiction.
La nuit de l’Histoire, le brouillard d’une mémoire qui préférerait l’occulter.
Nuit et brouillard est une question sur la responsabilité et la nature même du mal qui s’élargit en réflexion effrayante sur l’homme et ce dont il est capable.
Un appel, enfin, à la prudence face au silence et aux ruines sous lesquelles la braise est encore chaude.