Une comédie romantique libre et indépendante

Trois ans après Les Vilains, le duo de réalisateurs récidive avec PARTENAIRES PARTICULIERS, une comédie romantique incisive.


Thibault Turcas & Nicolas Vert remettent le couvert et se lancent une nouvelle fois dans l’aventure du cinéma indépendant. On les avait quitté il y a trois ans avec la sortie VOD de leur premier long-métrage Les Vilains, ils décident d’approfondir leur expérience du genre avec ce deuxième essai réussi.


Arthur et Noëllie sont ensemble depuis longtemps, trop longtemps. Il décident de se laisser une dernière chance à l’occasion d’un week-end dans les Alpes en compagnie de Baudouin et Athéna. Mais au cours de la première soirée, un troisième couple, un tantinet relou, s’invite dans la partie histoire de bouleverser les plans. Les deux réalisateurs continuent leur exploration satyrique et générationnelle des relations amoureuses.


Le film s’inscrit dès lors dans la pure tradition farcesque faisant reposer la mécanique du récit sur un comique de situation bien huilé. Dans le premier tiers du film, les auteurs s’empressent de composer leurs personnages, définissent les rôles de chacun en s’amusant des clichés. Un décor bâti tel un château de cartes que Thibault Turcas & Nicolas Vert prennent plaisir à déconstruire afin de mieux redistribuer le jeu. Les auteurs s’amusent avec une caractérisation des couples et des individus pour faire voler en éclat les représentations. Les rôles et les fonctions se bousculent, s’échangent pour permettre aux personnages de se révéler.


Points forts essentiels de cette comédie, les dialogues aiguisés et les punchlines percutantes. Car c’est dans cet exercice que le talent des deux réalisateurs se fait vibrant. Une démonstration de leur capacité virtuose à écrire et mettre en scène des joutes verbales absolument tordantes ainsi que de longues tirades hilarantes. Avec une science précise du rythme et de la scène, Thibault Turcas & Nicolas Vert laissent le comique s’installer et s’intensifier à mesure que l’intrigue progresse. Les deux compères font littéralement exploser le ratio des vannes par minute.


Évidemment chaque farce réclame son Bouffon, et c’est à travers le personnage d’Anthony que le potentiel comique du film peut enfin jaillir. Principal ressort burlesque, le personnage fonctionne comme un révélateur, il sert à la fois d’élément déclencheur et de moteur dramaturgique. Le personnage endosse peu à peu le rôle d’antagoniste principal qui fait avancer l’intrigue en s’opposant systématiquement au reste du groupe. Un motif que les réalisateurs s’amusent à décliner séquences après séquences dans des jeux de ping-pong où Anthony se confronte seul à l’assemblée. Les metteurs en scène trouvent chez Anthony Darche la palette adéquate de l’acteur comique leur permettant de pousser toujours plus loin les curseurs du film.


Quelques part entre Marivaux et la trilogie Cornetto. Le film brille par la justesse de son déploiement et la gestion de son rythme, prenant son temps avec des préliminaires aguicheurs avant d’augmenter petit à petit son intensité jusqu’à se répandre dans un final inéluctable et jubilatoire.


PARTENAIRES PARTICULIERS c’est aussi et avant toute chose le deuxième volet d’une incursion dans le cinéma indépendant de deux jeunes réalisateurs chevronnés. Tirant les leçons de leur premier long-métrage, Thibault Turcas & Nicolas Vert approfondissent leur geste en creusant les forces de ce qui compose leur cinéma. Pragmatiques et ingénieux, ils mettent en place une économie de moyens qui permet l’émergence d’un réel savoir-faire. En optant pour le quasi huis clos, ils se concentrent sur la mécanique du récit et ses dialogues pour faire évoluer leurs ambitions cinématographiques.


Mais les problématiques du cinéma indépendant ne s’arrêtent pas à la production, c’est un circuit qui impose l’invention de nouveaux modèles d’exploitation et de distribution. Là encore nos deux compères se montrent inventifs et imaginent des dispositifs alternatifs. C’est sur le pouvoir du collectif qu’ils s’appuient en fédérant autour du film une communauté de spectateurs. Une tournée de projections-rencontres dans des lieux parfois atypiques, disruptifs, qui nous amène à repenser notre rapport à la salle de cinéma ainsi que nos modes de consommations des films parfois trop standardisés. Un élan vivifiant qui démontre tout le potentiel et la clairvoyance d’une nouvelle génération de créateurs désireux de façonner leurs propres paysages cinématographiques.


Aurélien Milhaud


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le 15 févr. 2019

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