Perdues dans New York est peut être paradoxalement le film le plus hermétique mais aussi le plus compréhensible des films expérimentaux de Jean Rollin. Concentré sur 52 petites minutes ce moyen métrage de 1989 est une sorte de long poème fantastique à la gloire de l'évasion et de l'imaginaire mettant en scène deux femmes et amies aux différents âges de leurs vies. Si le film ne perd pas trop le spectateurs dans les méandres sinueuse de son univers onirique c'est que Jean Rollin lui même accompagne tout le film de sa voix off afin d'expliquer plus ou moins ce qui se passe à l'écran.


Perdues dans New York c'est donc l'histoire de Marie et Michelle qui se rencontrent enfants et qui possèdent la même faculté à s'évader par le rêve et la fiction à travers le monde et différents univers. Avec l'aide d'une amulette magique les deux femmes semblent pouvoir vagabonder, se perdre et se retrouver au fil d'errance poétique et fantastique et à travers le temps et l'espace.


Si Jean Rollin livre les grandes clefs de son récit fantasmagorique, il faudra toutefois se laisser une nouvelle fois porter par l'univers si particuliers du réalisateur qui nous entraine ici pour un long rêve entre Rome, New York et la plage de Pourville-sur-Mer qui est l'endroit presque symbolique et emblématique de sa filmographie . Si l'on connaissait déjà la fascination du réalisateur pour les vieilles pierres, les châteaux et les cimetière, on lui découvre ici une nouvelle passion pour l'univers urbain de New York qu'il filme avec un évident amour et émerveillement. Certes Jean Rollin ne réinvente pas New York mais il en donne une image étrange entre le regard d'un poète et celui d'un touriste de base. Nous n'échapperons donc pas à l'immensité des buildings filmés en contre plongé, aux taxis jaunes et aux néons publicitaires mais Jean Rollin s'attarde aussi à filmer des choses plus singulières comme des fresques murales, des affiches déchirées, les fameux escaliers métalliques extérieurs et bien sûr quelques tombes dans le jardin du presbytère de Manhattan. Le voyage n'est donc pas désagréable en soit, il réserve même quelques très jolis images même si on ne se plaindra pas non plus de la si courte durée du film.


Perdues dans New York raconte donc l'histoire d'une vielle femme seule qui se remémore sa vie en compagnie d'une amie rencontrée alors qu'elle était une petite fille et perdue ensuite entre rêve et réalité dans l'univers urbain de New York. Les deux petites filles avec l'aide d'une amulette magique, de leur imagination et de récits fantastiques pouvaient ainsi voyager à travers le monde et le temps. L'occasion pour Jean Rollin de citer copieusement ses références littéraires et cinématographiques qui vont de Claude Miller à Orson Welles en passant par Chaplin, Peter Weir, Fritz Lang, Jean Vigo ou Franju. Bon on notera que Jean Rollin en profite pour se citer aussi copieusement que un peu prétentieusement au milieu de ses illustres réalisateurs, mais après tout on est jamais aussi bien servi que par soit même. Sans être basé sur un récit linéaire et structuré Perdues dans New York se suit sans déplaisir et parvient même à susciter une certaine émotion lors de très joli son final. On retrouve avec plaisir en personnage principale la comédienne et fidèle complice du réalisateur Nathalie Perrey , quant aux autres actrices elles ont l'avantage de n'avoir presque pas de dialogue ce qui estompe un peu la direction d'acteur si particulière de Jean Rollin. On notera toutefois que le réalisateur réussira à faire mentir cet adage que les enfants jouent toujours justes puisque l'une des deux petites filles (super mimi au demeurant) semble se foutre royalement de ce qu'elle joue mais s'amuser beaucoup à être là. Quant aux amateurs des obsession de Jean Rollin ils seront sans doute heureux d'apprendre qu'il y-a tout de même dans ce film un peu en marge une femme vampire et une sculpturale prêtresse vaudou qui danse longuement toute nue.


Je ne connaissais pas du tout ce Perdues dans New York, l'occasion de saluer Kowalski et sa liste Pour une fois que cela coûte que tchi, ce serait con de pas en profiter, non? qui m'a permis de découvrir ce joli petit film. Je crois même que c'est le Jean Rollin le plus touchant que j'ai eu l'occasion de voir.

freddyK
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le 21 oct. 2021

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