Douloureux
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le 20 sept. 2011
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Le film, datant de 1998, nous entraîne dans l'esprit de Max Cohen, mathématicien de génie mais aussi et surtout, nous dit Aronofsky, inlassable obsessionnel. Le thriller, brillamment mené, s'appuie fortement sur ce point de vue dans son efficacité : L'intrigue est mentale, les nombreuses illusions entraînent le spectateur dans une spirale (c'est le cas de le dire) infinie de malaises et d'éclairs, créant de véritables points forts du film dans un fond d'irréel. La grande question du film finalement, est le rapport d'un homme singulier au monde, aux autres. Se croisent les mathématiques, sujet explicite du film, et la philosophie : mais la véritable issue est la Beauté, à travers la mise en scène extraordinaire d'Aronofsky.
Le croisement de thématiques du film est extrêmement fécond : les finances, la religion, les mathématiques, sont regroupés sous la coupelle du monde incarnée par la quête de Max, la séquence de l'univers, qui prend au fur à mesure que l'on avance dans le film, des allures mystiques, fortement appuyées par le personnage de Lenny. Ce point de l'histoire semble plus appuyé que celui des finances, en témoigne les derniers moments du film. L'intrigue spirituelle est beaucoup plus développée, à mon sens, que l'intrigue Wall Street : on peut vraisemblablement penser qu'il s'agit d'une insistance sur l'aspect métaphysique de la quête.
En effet, si elle se concentrait sur un point de vue strictement scientifique, l'intrigue ne prendrait pas autant : parce qu'elle est enrichie, et surtout parce qu'elle s'appuie sur un personnage précis et fortement mis en profondeur. La récurrence des séquences de cauchemar, d'illusion, renforcent ce rapprochement du personnage et du spectateur, plongeant ce dernier dans un état presque aussi obsessionnel que celui de Max. L'importance de sa quête pour lui, combinée à cette adhérence de point de vue, crée l'angoisse, le suspens, l'attente, de manière très intense, ce à quoi je ne m'attendais pas du tout lorsque j'ai lancé la lecture de film. « Un thriller mathématique ». Notre vision de la recherche scientifique au quotidien, est ébranlée par ce film et ce regard particulier. La respiration forte, le spectateur haletant prend peu à peu conscience d'une urgence à trouver la réponse, cette urgence naissant de la plongée dans la folie de Max, et dans le déclin accéléré de ses capacités physiques : la mort menace. Les quelques temps de pauses rythmiques, offerts notamment par les séquences de discussion et jeu de go avec l'ancien professeur de Max, explicitent par le dialogue et l'image l'impossibilité de sortir de la spirale.
Le film fonctionne en effet comme une spirale, par l'accumulation scénaristique et visuelle : La récurrence de séquences et de plans clés (le métro, les cachets, les visites chez l'ancien professeur, les rencontres avec Lenny, l'appel téléphonique de Marcy, la fermeture de la porte, les apparitions de la voisine...) et leurs variations, ajoutées à des images fortes, un contraste fort qui conduit parfois à des quasi-surexpositions du visage, constituent un univers propre, un univers mental et cauchemardesque, capable de hanter le spectateur après la vision du film. La force de la mise en scène, à travers un jeu entre dépouillement et accumulation, entre réalité et illusion, jusque dans l'issue finale du film.
Pas un instant de répit pour le spectateur jusqu'à la fin, qui finalement ne fait que poursuivre la spirale infinie, devant la finitude humaine, incapable de saisir pleinement son monde sans la menace constante de la névrose, comme une mort mentale, et même comme une mort physique, loin de l'héroïsme du sacrifice, dans une entreprise de voyance aux accents rimbaldiens : « épuiser en soi tous les poisons ».
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Créée
le 4 juin 2015
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