Postcards from London a l’audace certaine d’aborder la prostitution masculine – thématique déjà rare au cinéma – par le prisme de l’histoire des arts, essentiellement picturaux, en composant un personnage principal innocent et extérieur à Londres qui va s’initier à la culture à mesure qu’il apprend le plus vieux métier du monde. La trajectoire identitaire de Jim se double ainsi d’une trajectoire esthétique qui le conduit, à terme, à s’écarter de l’allégeance aux modèles pour « créer sa propre beauté », comme il l’affirme explicitement. Voilà une façon intelligente et plutôt culottée de regarder une profession que l’on dénigre souvent au nom d’une dégradation de l’honneur de la personne ; elle apparaît plutôt comme une reconquête de son intériorité après une socialisation primaire que le réalisateur stérilise et uniformise à outrance.
Le long métrage épouse l’appétit d’érudition de ses protagonistes et multiplie les références, de la peinture religieuse de la Renaissance aux films de Rainer Werner Fassbinder – on pense beaucoup à Querelle (1982) pour les marins dans le bar et l’homosexualité –, quitte à tomber parfois dans une surenchère assez vaine et lourde. Nous retiendrons néanmoins le bagout d’une œuvre qui n’hésite pas à consacrer un nouveau Christ gay – dans la mesure où le « syndrome de Stendhal » éprouvé par Jim intervient dans la contemplation du Christ souffrant – et qui propose une forme inventive et colorée empruntant à l’iconographie homosexuelle, Pierre et Gilles en tête, pour investir la solitude et la tristesse contemporaines.