Pour commencer, les trois documentaires de Depardon qui s'appellent Profils Paysans constituent bel et bien un seul et unique film. Un film auquel j'attribue la note de 9/10.
Depardon va donc voir des paysans de moyenne montagne, dans des zones désertées, en Lozère et en Haute-Loire essentiellement. Il va les filmer au quotidien et les interroger sur la pratique de leur métier.
Bien entendu, il s'agit de petits paysans, pas de ces industriels qui produisent dans des conditions souvent inhumaines. Non, ici, nous passons 4h30 avec des paysans à l'ancienne.
Un monde dans lequel il est difficile de pénétrer, d'ailleurs. Depardon ne le cache pas : même s'il connaît certaines des personnes depuis des années, il lui a été très difficile de les convaincre de les filmer. Et difficile de les faire parler aussi : bien souvent, les réponses à ses questions se limitent à des "Oui" ou "Non". Mais ça ne fait rien, même les silences sont éloquents.
Il n'y a pas que pour lui que le monde paysan est difficile à pénétrer, d'ailleurs. On y voit l'exemple d'une femme qui vient de loin épouser un des fermiers ; l'accueil qui lui sera réservé sera pour le moins froid. Le monde paysan est très renfermé sur lui-même. Un monde de solitaires et de taiseux.
Bien souvent, ce documentaire prend des allures de requiem. Villages qui sont en voie de désertification, hameaux qui n'abritent que deux ou trois habitants octogénaires, fermes qui ne sont pas reprises, le constat est triste. Et correspond bien à la sublime et déchirante musique choisie en générique, L'Elégie de Gabriel Fauré. Une ambiance mélancolique de fin d'un monde.
Car ces paysans ont peur de toutes les transformations qui se jouent autour d'eux. Primauté de l'économie sur la qualité, regroupement des fermes en d'immenses exploitation, absence de succession, solitude, etc.
Tout en restant pudique, Depardon ne nous cache rien. Ce n'est pas un de ces indécrottables romantiques pour qui la vie à la campagne comporte tous les avantages. Il en montre la dureté, la difficulté, la rudesse. Mais il le fait toujours avec humanité. Et c'est cela qui fait de ce film un véritable chef d'oeuvre. Par le travail lent d'un cinéaste qui aime les hommes et les femmes qu'il filme. Un amour qui transparaît dans chaque image, dans chaque question, dans chaque plan.
Justement, les plans ! Les images sont d'une grande beauté. Le film est essentiellement constitué de plans fixes. Le rythme est lent mais jamais ennuyeux.
SanFelice
9
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le 7 mai 2013

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