PUPILLE (Jeanne Herry, FRA, 2018, 107min) :


Magnifique plongée émotionnelle sur le long parcours de l'adoption, à travers tous les intervenants, de la naissance de l'enfant sous X, à la famille d'accueil. Une œuvre Lumière, qui met un formidable coup de projecteur sensible sur des héros sociaux de l'ombre.

Pour son deuxième long métrage, après l'étonnant Elle l'adore (2014), la jeune réalisatrice française s'attaque à un sujet rarement évoqué au cinéma : le moment où l'enfant est remis à l'adoption. Un thème délicat à traiter sans tomber dans le pathos, mais dont le titre pertinent indique directement le regard bienveillant de l'auteur, envers ce pupille de la nation dont le destin incertain va se décliner sous nos yeux humides, chavirés de belles émotions lacrymales.

À travers une colonne vertébrale scénaristique très documentée, la caméra délicate de Jeanne Herry dépeint sous la forme d'un suspense affectif, à la limite du thriller psychologique, tout le processus minutieux de tous les travailleurs sociaux, qui forment une véritable chaîne de solidarité pour le bien de l'enfant, de son accouchement à sa prise en charge dans une famille d'accueil temporaire, jusqu'à son adoption définitive. Le scénario instructif savamment orchestré ne tombe jamais dans le mièvre n'éludant aucune difficulté, ni certaines dissensions entre les services, et montre avec une pédagogie non didactique le périlleux parcours du nouveau né pour arriver à bon pore, la peau de sa future maman.

La chair prend vie dans chaque plan, où les étreintes et les échanges de regards deviennent un véritable cordon ombilical de substitution pour que l'enfant puisse se développer en créant un lien émotionnel avec chacun d'entre eux. En parallèle nous suivons également avec sensibilité le chemin périlleux, entre embûches personnelles et incertitudes, d'une candidate à l'adoption. Cette intrigue chorale met judicieusement au cœur de son récit l'importance du langage pour l'enfant dès son premier jour. Jamais auparavant dans une fiction cinématographique la psychologie du bébé aura autant pris corps à l'écran, notamment sur le trouble de l'attachement que peut ressentir un nouveau venu au monde.

La sensible mise en scène lumineuse et élégante confirme d'entrée cette volonté pudique pour décliner en douceur toutes ces destins qui s'entremêlent et se répercutent dans chaque vie quotidienne de tous les intervenants. La réalisation saisit régulièrement au plus près, mais avec délicatesse les mimiques et attitudes absolument craquantes du nourrisson, ainsi que toutes les attentions des nombreux adultes, penchés comme de bonnes fées sur le berceau de sa destinée. L'auteur s'appuie avec sincérité sur sa splendide narration d'une justesse d'écriture assez rare dans le cinéma contemporain, et bénéficie d'un impeccable casting émouvant (Gilles Lellouche, Élodie Bouchez, Sandrine Kiberlain, Clotilde Mollet, Miou-Miou notamment), dont chaque rôle précis si bien incarné, intensifie les différentes émotions de l'intrigue, soutenues par une splendide partition musicale.

Venez adopter avec bienveillance cet hommage au dévouement des travailleurs sociaux, à travers une odyssée de l'intime au sein de l'intense Pupille. Humain. Nécessaire. Bouleversant. Universel. Un vrai coup de cœur !

seb2046
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le 4 déc. 2018

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