Elle et l’un, lui puis l’autre, elle et lui.
Revoir ce film provoque une nostalgie particulière dans son rapport au temps. Dans une perspective cinématographique, il s’inscrit clairement dans une tradition (la comédie romantique new-yorkaise), qu’il réactive à la suite des classiques des années 50 (Léo McCarey, par exemple), eux-mêmes revisités par Woody Allen, en témoigne le recours au jazz notamment. Dans une perspective personnelle, c’est un film des années 80, et donc de mon enfance, et dont les stigmates sont visibles, particulièrement dans le look des personnages, Meg Ryan en tête.
Alors oui, quelques réserves demeurent, notamment dans le jeu de la blonde au mignon minois, ou dans la linéarité d’un scénario dont on connait la fin dès le départ. Mais après tout, c’est bien là l’idée tout à fait assumée du film (notamment par le recours aux témoignages des vieux couples qui le ponctuent) que de nous montrer les voies de traverse nécessaires pour qu’advienne un amour que tout le monde a pressenti, sauf les principaux intéressés.
Le charme de cette comédie provient sans conteste des scénettes qui jalonnent son (absence d’)intrigue. Les dialogues sont percutants, et le jeu de Billy Crystal impeccable : chien battu de l’existence, cynique et poli à la fois, il débite ses leçons de vie avec un flegme on ne peut plus charismatique. Le film est tout entier tourné autour du dialogue amoureux, qui depuis Marivaux, n’a pas beaucoup évolué, et dont on retrouve ici la vigueur et les circonvolutions. Les artifices de mise en scène, comme le split screen, sont intelligemment mis au service de ces discussions sans fin auxquelles on associe les confidents, amis à la fois exemplaires dans leur réussite matrimoniale et menaces sur la routine amoureuse tapie dans l’ombre.
Décomplexé, frais, souvent assez drôle, Quand Harry rencontre Sally est la preuve que la comédie romantique recèle un vrai potentiel, pour peu qu’on sache y insuffler une écriture intelligente et y injecter la juste et indispensable dose de cynisme pour en délayer le sucre.