Making murderers
Melina Matsoukas s’est fait connaître depuis une quinzaine d’années pour sa réalisation de clips musicaux. Avec Queen & Slim, elle réalise un premier film ambitieux quoique parfois maladroit dans...
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Melina Matsoukas s’est fait connaître depuis une quinzaine d’années pour sa réalisation de clips musicaux. Avec Queen & Slim, elle réalise un premier film ambitieux quoique parfois maladroit dans son écriture : une cavale à travers une Amérique hantée les violences faites aux Noirs.
Black Queen and white pawn
Queen, jeune avocate noire, vient d’apprendre que son client était condamné à mort. Autant dire qu’elle n’a pas le cœur à la bagatelle lorsqu’elle rencarde le soir même un gentil garçon trouvé sur Tinder et répondant au pseudo de Slim. Mais, lorsqu’à la suite d’une infraction routière insignifiante un flic les arrête sans ménagement, son tempérament d’insoumise reprend le dessus. Le flic s’énerve, sort son flingue – on est quand même à Cleveland, Ohio – mais embrasse l’asphalte le premier, une balle dans la tête. Slim a beau plaider la légitime défense auprès de sa Reine d’un soir, elle sait qu’ils n’ont aucune chance devant les tribunaux. Les deux amants optent pour la fuite et c’est le début d’une cavale plein sud.
Road movie
Melina Matsoukas donne à l’odyssée de ses deux héros une valeur de fable. Ainsi, les personnages croisés au fil du périple rejoindront ou non le camp des fugitifs : un shérif altruiste, un garagiste méfiant ou un oncle cyclothymique. Côté paysages, la Géorgie et la Louisiane offrent un décor tout en déshérence flirtant par moment avec le fantastique. Comme cette parenthèse sensuelle dans un club de jazz haut en couleur. La clippeuse d’expérience accompagne par ailleurs son road-movie d’une bande originale aux petits oignons. Une atmosphère électrisante. En revanche, le film souffre de sérieuses baisses de rythme, notamment au cours d’une deuxième heure où les invraisemblances du scénar rendent la cavale de nos Bonnie and Clyde aussi improbable que rocambolesque.
This is America
Si Melina Matsoukas décide avec ce film de raconter le quotidien compliqué des Afro-américains, Queen & Slim dénonce en creux les contradictions qui traversent la société américaine. Et se faisant, elle peint un tableau particulièrement sombre de son pays qui déborde de richesses mais laisse des quartiers entiers partir en ruines ; de ce peuple qui accorde à Dieu une place centrale, telle cette petite croix omniprésente dans le champ de la caméra, mais dont le dogme le plus sacré réside dans la liberté du port d'arme ; enfin de cette culture dite du melting-pot qui remet le couvert de la question "raciale" de façon obsessionnelle. Un passage marquant du film, construit en montage alterné, illustre parfaitement ce télescopage des contraires. Les amants s'étreignent lascivement dans leur voiture tandis qu'éclate une émeute où un ado des plus paisibles se transforme en tueur incontrôlable. Tout est dit.
Un beau premier film d'une réalisatrice à suivre.
7.5/10
<3
Critique publiée sur le MagduCiné
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Lumière d'été, Histoires de cheveux, Une affiche à l'image du film, "Les emmerdes ça vole toujours en escadrille" (spoiler) et Pour le MagduCiné
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le 13 févr. 2020
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