The Insider reflète d'une certaine manière l'âge d'or du cinéma américain, lorsque chaque plan, chaque scène avaient un but précis, les dialogues étaient fins et poignants, et les personnages comme les événements étaient d'un naturel parfois désarmant.
Le film présente plusieurs problématiques qui ont pour but de soulever des interrogations chez le spectateur, et dans le même temps l'amener à creuser davantage sa réflexion. L'histoire avance ici un rythme soutenu malgré sa durée, et requiert chez nous la plus vive attention envers chaque mot et image pour en saisir toutes les dimensions.
Russell Crowe disparaît derrière son personnage de Jeffrey Wigand, personnage non-fictif ancien chef de la R&D du cigarettier géant qu'est Brown & Williamson et qui fut renvoyé après s'être opposé à la volonté de la direction de booster l'addiction à la cigarette en favorisant l’absorption de nicotine par le fumeur au détriment de la santé publique. Wigand est contacté par le producteur de l'émission '60 minutes' Lowell Bergman (Al Pacino) qui le convainc de raconter son histoire aux 30 millions de téléspectateurs malgré les poursuites en justice et les menaces de la part de son ex-employeur planant au-dessus de lui et sa famille.
Michael Mann prend le temps d'installer son histoire et ses personnages: il fait bien attention à inclure des touches de drame afin d'intensifier la démarche de Wigand et on doit finalement patauger au milieu de nombreux incidents avant d'aborder le véritable problème, à savoir le refus de CBS de diffuser l'interview dû aux pressions exercées par le cigarettier. Il est d'ailleurs précisé avant le générique de fin que des éléments ont été dramatisés pour les besoins du film. Peut-être un poil trop.
Les performances des acteurs, qui portent véritablement le film, sont mémorables. Al Pacino illustre parfaitement l'impuissance du producteur qui d'une part ressent beaucoup d'empathie pour Wigand mais dans le même temps sent que sa propre carrière est en jeu. L'éthique et la morale ne sont pas ses priorités, mais il est prêt à mourir en martyr pour ses principes.
De son côté, Christopher Plummer livre une performance digne d'un Oscar du meilleur 2nd role en tant que Mike Wallace, présentateur du show (qu'il n'a pas eu, en revanche il a remporté le BSFC, le LAFSCA, et le NSFC, il doit être ravi). Philip Baker mérite également une mention et le cas d'un Crowe époustouflant a été évoqué plus haut.
Bien qu'astucieusement écrit et assemblé, The Insider est un peu trop long (2h38). En effet, le film met au moins une heure avant de prendre ses aises, bien qu'il soit par la suite captivant et même émouvant.
A voir, ne serait-ce que pour comprendre ce scandale qui a secoué les USA au milieu des années 90, et pour les performances du trio principal.