Niquedouille

Robin des Bois a très souvent une place particulière dans le coeur des gens. Il est vrai que c'est un film amusant, frais, aux dialogues savoureux, avec un rythme bien maîtrisé. C'est un divertissement agréable, qui permet de passer assurémment un bon moment, et il est même excellent pour les enfants, puisque sans violence aucune et plein d'humour. Mais il lui manque tout de même beaucoup de choses pour égaler ses prédecesseurs.

Bien sur, Robin des Bois reste un Disney dans la plus pure tradition. En cela, il repose sur un scénario divertissant, qui ravit les enfants et n'ennuie pas les adultes, et rassemble en lui toutes les générations. L'histoire, tout le monde la connaît, est celle de la legende anglaise de Robin Hood (et pas Robin Wood, mais Robin des bois, c'est vrai que c'est plus joli !) dont on raconte qu'il vola souvent aux riches pour redistribuer aux pauvres. On retrouve donc dans ce Disney tous les éléments de la legende : les compagnons de Robin des Bois, le prince Jean, la Belle Marianne... mais repris avec des animaux, et globalement respectée. La réussite du film est majoritairement sur deux plans : la beauté intrinsèque des décors, et la représentation impeccable du Moyen-Age, sans anachronismes, et dont même les dialogues, très intelligents, nous plongent dans l'ambiance (en plus d'être amusant.) Mais malheureusement, si les décors sont beaux, ils sont aussi banals et si les personnages parlent bien, ils manquent de consistance ou, du moins, de moyens d'être reellement marquants. Ils ne sont pas désagréables, mais ils assurent le minimum, sans réelle personnalité visible, à part celle que leur donne l'inconscient collectif, sans ajouts et sans profondeur supplémentaire. Ils en sont donc modérémment attachants. Pire, même, certains viennent directement du "Livre de la Jungle". Le physique de Petit Jean est ainsi exactement le même que celui de Baloo, sauf qu'il est brun, avec la même voix, les mêmes séquences, une sorte de Baloo Bis qui n'en a pas l'aura. Persifleur, lui, est repris en tout points de Kaa, mais lui, au moins, est un personnage remarquable, d'une drôlerie irrésistible, pour lequel on a beaucoup d'affection. Sa relation avec son maître (et bourreau) le Prince Jean est l'une des meilleures trouvailles du film, puisque là où Persifleur est intelligent et avertit son roi des dangers, ce dernier à la bien mauvaise foi ne cesse de s'en prendre à lui. Néanmoins, Persifleur ne se laisse pas faire et se montre particulièrement drôle et attachant. Robin des Bois et Marianne sont, quant à eux, des "hommes" et "femme" typique du studio sans prolongements ni nouveautés, idem, d'ailleurs, pour le petit lapin Bobby qui est une représentation bien typique de petit garçon. En réalité, ici, tout est policé, et la recette Disney, auparavent toujours capable de se renouveller, stagne dans ses poncifs, de peur de dénaturer l'oeuvre originale (un défaut qu'il n'est pas seul a avoir, puisque pratiquement tous ceux de la période ont ce travers.). Le résultat est un scénario classique, sans étincelles, et quelque peu pauvre par moments, manquant par exemple énormemment d'émotions, positives ou non, bien qu'il ne manque pas d'actions et de scènes humoristiques.

Mais ce qui est le plus gênant dans "Robin des Bois", c'est le recyclage. Depuis plusieurs films déjà, les studios par souci d'économie réemploient des anciennes poses et anciens modèles, mais cette utilisation était alors modérée, on pouvait aisémment passer au-dessus de l'unique (ou des quelques) scènes identiques. Mais ici, ce sont des scènes entières qui ont été réutilisées, la plus flagrante étant celle de la danse, ou on va retrouver Blanche-Neige, Le Livre de la Jungle ou encore les Aristochats... tout cela donnant finalement un film dont on sent qu'il a été assez rapidement éxécuté, ce que semblent d'ailleurs confirmer les très nombreuses erreurs que l'on repère (certes, il y en a dans tous les films, surtout récents, mais là, c'en est flagrant). L'animation reste de bonne qualité, et n'est pas décalée avec le décor comme cela pouvait être le cas dans certains anciens films, en bénéficiant en plus du charme des coups de crayon visibles. Un beau travail a également été réalisé sur la caractérisation des personnages animaux en fonction du caractère des humains qu'ils représentent.

Enfin, notons que la musique du long-métrage a un grand potentiel, mais ne l'exploite que très peu. On sent bien que l'effort a été fait pour y introduire des sons à tendance moyennageuse, mais la musique passe malgré tout inaperçue, et les chansons sont d'interprétation maladroite. Je n'ai jamais pu entendre les versions originales, cette maladresse ne s'applique peut-être qu'à la version française, je ne sais, toujours est-il qu'elles ne sont pas particulièrement marquante, ce qui est bien dommage.

Robin des bois fait passer un bon moment, là n'est pas le problème. Le souci est que il n'est "que" un bon divertissement. Sans éclat artistique ni scénaristique particuliers, il est un condensé trop timoré de la recette Disney, représentatif de la période oû il est né. Néanmoins, il n'y a pas, non plus, de raisons de le bouder...