Ce film, j’ai mis vingt-six ans à le voir et j’ai encore en tête les discussions de mes potes de collège sur ce super-flic trop cool. Discussions qui me laissaient sur le carreau, entre désir de faire semblant de l’avoir vu au risque de passer pour le dernier des blaireaux et désir d’assumer mon ignorance façon grand prince qui se hisse au-dessus de la mêlée. Au final, je fuyais ces discussions comme la peste, ce qui n’a jamais aidé à une bonne intégration.

Robocop pour moi peut se résumer à un élément du film qui m’a marqué autant que la première fille nue que j’ai pu voir pour de vrai, avec à peu près les mêmes effets. C’est ce son juste magique et presque sexuel des pas de Robocop, un son sourd, mécanique et lourd tout en étant presque tranchant, sonnant comme un avertissement. Dès que j’ai entendu ça j’ai pris un pied pas possible, ce son c’est toute la puissance de Robocop, sa détermination et son invulnérabilité, mais aussi la force gigantesque qui l’anime et qui fait vite comprendre qu’avec lui, on ne discute pas le respect de la loi. D’ailleurs, lorsqu’il débarque pour la première fois dans son ancien commissariat, c’est par ce bruit de pas que ses collègues ont le premier contact, un bruit qui ébranle, au propre comme au figuré, ce lieu sacré de l’application de la loi.

Verhoeven signe mine de rien un film politique et engagé, à travers cette question qui se pose un peu plus chaque jour, de la délégation de la justice et de la police à des entreprises privées. On voit ici d’hallucinants golden boys traiter de la question de la sécurité comme de la vente de serviettes hygiéniques pour vieux, on a un produit, on doit le vendre et en tirer un maximum de profit. S’il y a un ou deux trucs qui merdent un peu en cours de route, on passera ça par pertes et profits, au pire on trouvera un bouc-émissaire…

Robocop c’est la mise en garde ultime face à une justice déléguée, automatisée et devenue aveugle. C’est la puissance de la machine face à l’intelligence de l’homme, mais aussi l’intrusion de cette machine dans le corps humain. La société dans ce film perd ses repères et l’homme redevient une bête prête à toutes les prédations, l’ultra-violence ne faisant plus peur à grand monde. Un film pour tous, qu’ils soient amateurs d’action ou de réflexions profondes que certains jugeront déviantes, mais comme toujours avec Verhoeven, un bon coup de pied dans la fourmilière.
Jambalaya
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le 6 avr. 2014

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Jambalaya

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