Runaway Nightmare est petit film indépendant américain de la fin des années 70 qui ne sortira finalement qu'en 1982 , c'est dire si sa gestation fût longue pour son créateur. Le film est l'œuvre unique de Mike Cartel qui disparaitra ensuite plus ou moins des radars mais qui occupe ici les postes de réalisateur, scénariste, acteur, producteur, cascadeur et même un peu chef décorateur puisque une partie du film se tournera chez lui durant de nombreux week-end. Un petit film fauché tourné avec des ami(e)s, des amateurs et amatrices ce qui donne à l'ensemble une certaine et joyeuse inconsistance. Mais loin de n'être que mauvais Runaway Nightmare tire aussi son épingle du jeu par son humour à froid qui fait des merveilles et ses aspects bricolés qui lui donne une bien étrange atmosphère.
Runaway Nightmare raconte l'histoire de deux potes qui élèvent des lombrics et des escargots dans le désert . Un jour alors qu'ils glandent dans le désert, ils sauvent une jeune femme qui venait tout juste de se faire enterrée vivante mais inconsciente dans le sable. Alors qu'ils ont ramenés la malheureuse chez eux ils sont attaqués par une secte de femmes venue récupérer leur amie et qui vont les kidnapper pour les embarquer ensuite dans une rocambolesque affaire de vol de mallette de platine à la mafia (si on dit platine durant 95% du film c'est en fait du plutonium)
Runaway Nightmare n'est ni un très mauvais film du fait qu'il comporte suffisamment de qualités, ni un nanar car son humour est globalement ciblé et volontaire mais pas un bon film non plus tant le manque de moyen est souvent flagrant à l'écran. Le film de Mike Cartel est peut être tout simplement un petit film à la naïveté touchante et dont l'humour pince sans rire et absurde permet de quasiment tout faire passer. Nos deux lascars vont donc se retrouver séquestrés par une bande d'amazones étranges souvent très portées sur le sexe mais n'espérer pas pour autant une débauche de séquences érotiques, une bonne partie de l'humour venant du flegme et du nonchalant désintérêt de nos deux anti-héros pour les galipettes. Qu'ils se brossent les dents imperturbables tandis que deux filles se frottent sous la douche ou qu'ils préfèrent terminer de regarder un programme Tv plutôt que de satisfaire une fille chaudement entreprenante les deux personnages jouent à merveille deux crétins lunaires paumés chez les amazones. Quant à cette secte aux étranges coutumes moitié gang moitié sorcières elle comporte entre autres une grosse qui rigole très fort puis s'arrête net, une jeune fille stone les trois quart du temps et qui voit des jolies couleurs partout, une sorte de femme vampire, une adepte du couteau, une femme proche de la misandrie qui rêve de buter et torturer tous les hommes et une sorte de chef de meute appelée Hesperia qui distribue de patates de camionneurs. Une sorte de bande tellement étrange qu'elle provoque autant le rire qu'une certaine crispation, en tout cas notre héros plein de bon sens se proposera de les aider une fois sorti de cette mésaventure en leur trouvant des places en asile psychiatrique. Le film baigne dans une ambiance très étrange d'humour à froid et stupide comme lorsque les deux héros échafaudent à voix haute et devant elle, un plan pour se débarrasser de la fille qui les tient en joue. Autre petit moment qui m'aura beaucoup fait rire lorsque Hesperia la chef du gang déclare lors d'une soirée qu'il n-y a rien de bizarre ici et que l'on voit à l'arrière plan une fille passée dans la maison en moto.
Runaway Nightmare tire aussi une bonne partie de son atmosphère un peu surréaliste de ses aspects les plus fauchés comme lorsque l'une des filles se fait exploser la tête lors d'un duel digne d'un western et que faute d'assister à la scène on devra se contenter des commentaires des autres filles totalement monocordes, insensibles et impassibles . On nous parlera aussi des lombrics devenus plus gros que des hamsters à cause des radiations mais encore une fois on ne verra strictement rien à l'écran faute de budget. Si certains effets sont bien ringards comme un fil à peine dissimulé faisant bouger le couvercle d'une boîte, Mike Cartel nous offre aussi de nombreux jolis plans très travaillés avec un beau jeu d'ombres et de lumières et quelques petites idées de mise en scène pas désagréables. Si une première version du film semblait durer près de deux heures( de nombreux plans de la bande annonce témoigne de coupes) Mike Cartel a bien eu raison de trancher dans le gras tant cette version de 90 minutes bien qu'assez drôle semble déjà parfois tirer un peu en longueur.
Runaway Nightmare est une sympathique curiosité finalement assez agréable à regarder à tel point que l'on regretterait presque que ce soit le seul film de son réalisateur/acteur qui de toute évidence possédait un certain sens du cinéma doublé d'un sacré sens de l'humour à froid.