Un Amour Impossible

Écrivant cette critique tout en écoutant "Sospetti E Tenerezze" d'Ennio Morricone, je me souviens de la douceur et de l’amour qui se dégagent du film Senza Sapere Niente Di Lei, toujours ponctué par quelque chose de plus méfiante qui se cache en dessous, et on a du mal à définir le genre, tellement lié aux résonances de Vertigo d'Hitchcock, de Blow Up d'Antonioni et même de Breakfast at Tiffany’s de Blake Edwards. Tous ces films ont précédé sa sortie en 1969, et c’est un film qui semble être passé inaperçu jusqu'à sa sortie en 2024 par Les Films Camelia en collaboration avec la Cinémathèque de Bologne et L’immagine Ritrovata.

Il y a une rapidité et une dissonance entre le doublage italien et la nuance légèrement différente des sous-titres français, ce qui a rendu ma vision fragmentée mais profondément émue et portée par les thèmes d'actualité. « Suicide assisté» ou « Assassinat » commis par des membres de la famille ? Cela est remis en question lorsqu'une femme est retrouvée morte quelques heures avant l'expiration de son assurance vie. Le détective Nanni Brà, interprété par Philippe Leroy, est envoyé enquêter sur la fille de la famille, Cinzia. Plutôt que de la suivre et de la surveiller, l'intrigue prend un tournant lorsque cet agent sous couverture finit par la ramener chez lui et que les deux finissent par « tomber amoureux ».

Philippe Leroy joue presque contre son type, un acteur habituellement choisi pour sa remarquable présence physique. Son tempérament oscille entre l'ingénuité ou l'ingéniosité, rendant difficile de savoir s'il fait son travail, s'il a des motifs cachés ou s'il est simplement frappé par les grands yeux de biche de Cinzia, interprétée par la grande actrice italienne Paola Pitagora, qui n’a pas reçu la reconnaissance que son talent mérite. Pour 1969, c’est un portrait étonnamment fort et profond d’une femme qui porte un mystère que le détective Brà et les spectateurs ont du mal à saisir.

De plus, ses répliques comme « stronzo » et « squalida » réussissent à choquer et faire rire en 2024. La scène de bain est surtout un choc à plus d’un titre, le téléphone au design surréaliste comme seul confident de détective Brà avec le monde extérieur, tandis qu'il garde Cinzia comme quoi ? Proie ? Victime ? Assassin ? Est-ce sa confession, selon laquelle il l'a suivie, qui l'a poussée à s'enfermer dans la salle de bain et à se couper les poignets, ou sont-ce les dynamiques familiales toxiques et oppressives auxquelles son existence l'a soumise ?

Dans un style de renaissance à la Pulp Fiction, avec l'aide du docteur de la clinique en bas, elle est ressuscitée. Mais au lieu d'appeler une ambulance, Brà réagit avec colère et incrédulité, lui demandant pourquoi elle aurait fait cela si elle l'aimait vraiment. Il ne semble remettre en question son acte de trahison que plus tard, bien que tout ce temps il ne téléphone pas à sa maîtresse, dont il parle à Cinzia pendant leur promenade au parc. Peut-être dans une scène de jalousie, elle demande si « l’étincelle n’est pas encore éteinte », cet amour impossible est-il possible à sauver après le bain de sabotage, ou peuvent-ils s’embrasser et se réconcilier pour partir hors de la grisaille de Milan ? Ou est-ce que les autres vont d'abord saboter cela ? A voir et à revoir ...