Précédé d’une réputation peu flatteuse, Serenity débarque en France sur Netflix. Alors, le ratage est-il si désastreux ou le film de Steven Knight a-t-il quelque chose à offrir ?
Sur la petite île de Plymouth où tout le monde connaît tout le monde, le capitaine Baker Dill embarque sur son bateau des touristes qui veulent pêcher de gros poissons. Cette vie au soleil comporte quelques points noirs pour le bonhomme. Obnubilé par un poisson coriace qu’il ne parvient jamais à attraper, il doit en plus composer avec son ex-femme qui a réussi à retrouver sa trace. Elle l’implore de l’aider à faire disparaître son nouveau compagnon, habitué à lever la main sur elle.
C’est alors qu’on comprend que Baker a eu un enfant avec cette femme, et que celui-ci se trouvera sans cesse en danger tant que son beau-père sera de ce monde. Tiraillé entre son passé et le présent, le capitaine va sérieusement envisager de faire disparaître cet élément perturbateur en pleine mer, avec la complicité des requins. Le synopsis de base tel qu’on vous le vend n’a foncièrement rien d’horrible. Un petit thriller exotique, qui plus porté par deux stars réputées, à savoir Matthew McConaughey et Anne Hathaway.
En effet dans son premier acte, ce Serenity n’a rien de navrant. Ni d’époustouflant. L’ambiance paradisiaque donne un cachet au film, et même si l’écriture – surtout dans la caractérisation – ne s’embête pas avec la finesse, on embarque alors avec le maigre espoir d’assister à une série B respectable. Pourtant, les très alarmants avis en provenance des USA nous avaient mis la puce à l’oreille. On attend juste de savoir à partir de quand le navire va entamer son naufrage.
Déjà avec son premier film, Locke, Steven Knight avait démontré qu’il était soucieux de vouloir proposer un cinéma que l’on remarque. Dans ce huis clos instauré dans une bagnole en marche, le réalisateur et scénariste, n’arrivait jamais à sublimer son concept par sa mise en scène. Tant et si bien qu’on le soupçonnait d’être juste un petit malin en quête d’une reconnaissance. Mais encore faut-il respecter le public.Rebelote avec Serenity, Knigth se charge de la mise en scène pour porter à l’écran un script qu’il a lui-même conçu. Son gros trait pour brosser des personnages et des traumas ne nous surprend pas. C’est, en revanche, lorsque son histoire prend une tournure très particulière, que sa proposition en devient un immense ratage. On serait tenté de s’attarder sur les différents twists – et il y a à dire, croyez-nous – pour décrypter les raisons d’un tel fiasco, mais nous ne le ferons pas.
Serenity dépasse son postulat de thriller conjugal pour lorgner du côté de la SF. Et là, plus rien ne va. Steven Knight se lance dans une entreprise qui accumule les mauvaises idées. Comme ce pauvre Matthew McConaughey qui erre, tourmenté, sans trop comprendre ce qui se passe, le spectateur contemple avec une certaine fascination mal-placée un objet qui s’imagine plus intelligent qu’il ne l’est.
Steve Knight rate tellement les choses qu’il entreprend que son film
n’est même pas capable de postuler au titre de nanar de l’année.
Réflexion sur la paternité, sur le Bien et le Mal, et sur d’autres sujets qui trahiraient le mystère du film si on les évoquait, Serenity a au moins le mérite de faire ce qu’il veut avec un premier degré qui aurait pu être salutaire si un scénariste plus subtil en avait programmé les grandes lignes. Malheureusement pour nous, il ne s’agit que Steven Knight. À chaque twist, on l’imagine nous asséner une tape sur l’épaule, le sourire auto-satisfait, pour s’assurer que l’on remarque ses gesticulations grotesques.
Comme un enfant, un peu trop bruyant, qui ne demande que de l’attention. Sauf que son premier degré se retourne totalement contre lui, sans cette petite légèreté qui aurait pu faire de Serenity une sorte de plaisir coupable que l’on regarde avec une certaine affection. Knight se prend tellement au sérieux que son film n’est même pas capable de postuler au titre de nanar de l’année.
Maxime Bedini
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