La (mauvaise) sitcom du futur.

Il est parfois difficile de mettre en mots le gâchis immense que représente un film. Et pourtant je veux essayer. Je veux essayer parce que j'en ai assez qu'on nous fasse passer des produits consensuels, sans surprise ni prises de risque, pour de la science fiction, qui plus est pour de l'anticipation.
Ces sept sœurs n'ont pas été accouchées par un auteur, par une personne dotée d'une vision cinématographique, ou possédée par l'angoisse de ce que pourrait devenir notre société. Le film n'a pas d'autre ambition que celle de se tenir à son postulat de base : faire jouer 7 Noomi Rapace (en espérant que la campagne de com' arrivera à vendre ça comme du jamais vu, et donc quelque chose de foncièrement intéressant).

L'introduction du film vend déjà la mèche : le réal s'en fout. Il introduit sa planète surpeuplée et en proie à la famine par une voix-off didactique, et hop hop hop, on enchaîne. Dès le début, on sait qu'on à affaire à "film d'anticipation numéro 4567". Non pas que chaque dystopie doive s'offrir une entrée en matière aussi magistrale que "Children of Men", mais quand même. Découvrir un futur alternatif par le biais de personnages, de situations, c'est quand même bien plus immersif que juste une note de synthèse.
On alterne ensuite entre passé et présent pour introduire les sept sœurs. Allez, à la limite. C'est pas original, c'est plan-plan, mais y a Willem Dafoe.
Et puis, les scènes de foules et de checkpoints sont assez prenantes pour nous laisser imaginer ce que représente la perte d'individualité de ces femmes, contraintes de s'effacer derrière un masque (et surtout une perruque) pour survivre.

Et puis viennent les scènes sensées nous révéler la personnalité des sœurs. On en arrive donc au titre de ma critique, ce film ressemble à une mauvaise sitcom du futur. Générique.
"Une blonde un peu co-conne, une geek à lunettes, une fêtarde, une brune sportive et une rebelle partagent un appart. Entre amour et disputes, découvrez le quotidien de ces filles aux caractères bien trempés !"
Oui, les sept sœurs sont des clichés ambulants. En fait, la prod s'est retrouvée prise au piège par son idée de les faire correspondre aux jours de la semaine. Sept personnages principaux à traiter, ça fait beaucoup, et du coup, on est tenté par la faciliter pour les caractériser.
Et franchement, tapez moi dessus mais... Noomi Rapace joue pas bien du tout. Les scènes sensées être émouvantes sont d'un malaise... bref.

Résumons. On a donc pour l'instant : un postulat jeté à la gueule du spectateur sans aucune conviction et des caricatures en guise de protagonistes. Mais alors, les péripéties ?
Elles sont toutes plus invraisemblables les unes que les autres. Absolument RIEN ne tient debout dans ce film, rien n'est crédible. Je veux pas divulgacher mais quand même :
- Les actions des ennemis sont incohérentes, tout comme la réaction des sœurs face à l'adversité (rester planqué chez soi quand on t'a déjà envoyé un commando, c'est pas ultra malin...)
- Toutes les idées qui font avancer le scénario sont d'une facilité à se frapper la tête contre un mur (le bracelet de l'employé du bureau qui permet d'accéder à TOUS les plans et caméras du QG, l'une des sœurs qui arrive à se faire passer pour morte afin d'entrer dans l'un des bâtiments les mieux gardés du monde alors qu'il aurait suffi de passer le corps au détecteur thermique ou cardiaque, le mec qui couche avec la sœur de sa copine et qui capte pas du tout qu'elle a pas les mêmes réactions ni la même personnalité...)

Restent les scènes d'actions. Pas bien lisibles, pas franchement fun, elles ont le mérite de ne pas édulcorer la violence, ce qui est plutôt le bienvenu dans une production aussi calibrée. Les personnages qui meurent meurent de façon très crue et ça permet de ressentir un peu de tension, par instants, avant que tout ne s'effondre sous le poids d'une nouvelle tonne d'incohérences.

Ah, et le fameux "vous ne devinerez jamais la fin." Bon, sans revenir sur le caractère complètement putaclic de la chose... SI. On la devine même très tôt. Alors après, c'est toujours intéressant d'avoir les motivations exactes, blabla... (pas bien crédibles, encore une fois).

"Seven Sisters" c'est donc : Un film d'action linéaire (qui n'a absolument rien d'un thriller d'anticipation) pas follement réalisé, incohérent jusqu'à l'hilarité (allez, disons le : très très con), servi par des personnages caricaturaux, à la fin prévisible.
Pour les réflexions sur le futur, sur l'impact de l'être humain sur la planète, sur l'eugénisme, et tout ça, circulez, y a rien à voir.

On est donc sur de la bonne daube qui se fait passer pour de la SF intelligente. Oui, parce que si le film assumait complètement son statut de délire décomplexé et WTF (un peu à la Besson), il s'en donnerait les moyens. La réal ne serait pas invisible, les scènes d'actions seraient fun, y aurait pas de ralentis avec de la zolie musique pour souligner toute l'émotion qu'on est sensés ressentir, et on nous gaverait pas avec des réflexions pseudo-méta sur l'humanité, le devoir de sacrifice, et toutes ces conneries...