Le genre de projet dément qui ne pouvait naître que dans la caboche un peu fêlée de Robert Stigwood (après Saturday Night Fever, Grease et Jesus Christ Superstar) : une comédie musicale dont les chansons des Beatles constitueraient la trame, avec Peter Frampton et les Bee Gees dans les rôles principaux.
Sans surprise, ça ne marche pas. L'intrigue est complètement barrée, totalement dépourvue de logique et souvent confuse comme un épisode de Lost, ce qui était prévisible : comment construire une histoire à partir de chansons disjointes aux paroles écrites sous acide ? Autre problème, récurrent dans ce genre de production : les acteurs chantent mal et les musiciens jouent mal, mais ici, c'est encore pire, vu que les acteurs jouent mal aussi. C'est un véritable concours de cabotinage que disputent le délirant Donald Pleasence en imprésario véreux et un Frankie Howerd hystérique en Mean Mr. Mustard, mais il suffit à Steve Martin des cinq minutes de Maxwell's Silver Hammer pour les enfoncer tous les deux jusqu'au centre de la Terre. De l'autre côté, Frampton est insipide, mais les pitreries des frères Gibb (qui jouent remarquablement bien les ahuris de service) pourront arracher un sourire ou deux aux plus indulgents, et Billy Preston dans la scène finale... ne peut être décrit par des mots. (!!)
Tout ça serait pardonnable si la bande son assurait... mais là aussi, ça coince. Reprendre un groupe du calibre des Beatles est un exercice périlleux sur lequel plus d'un musicien s'est cassé les dents. Ici, la plupart des interprétations manquent tout simplement de l'étincelle qui rendait les Fab Four Fab : malgré les voix toujours magnifiques des Bee Gees (Barry sur A Day in the Life, superbe), il n'y a pas de fantaisie, pas d'audace, et les arrangements accusent méchamment leur âge, souvent dans une veine soft-rock mollassonne qui vire parfois au ringard absolu (les robots qui chantent, il n'y a que Kraftwerk qui puisse faire ça au premier degré). Ils ont au moins le mérite de faire ressortir par contraste le caractère immortel des originaux. Quelques reprises se détachent du lot, comme ce Because grogné par un Alice Cooper en roue libre ou le solide Got to Get You into My Life des Earth, Wind & Fire, mais c'est bien peu.
Au final... meh, disons. Le côté kitsch séduira les fans de déviances filmiques (ce n'est pas pour rien que ce film est chroniqué sur Nanarland), mais le gros manque de rythme de la chose suscitera quelques bâillements : j'ai souvent décroché, alors que j'aime les Beatles ET les Bee Gees ET les nanars. Un 4 tout de même pour ces trois raisons.