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A comparer avec 50 nuances de grey pour mesurer nos progrès en cynisme, libertinisme et beauferie
Les jeunes années d'une reine révélait aux européens Romy Schneider (issue des 'heimatfilm', des productions folkloriques allemandes), la trilogie Sissi va la conforter dans son rôle d'aristocrate taillée pour les jeunes filles, les ménagères rêveuses et les ravis de la crèche. Les ingrédients et références sont identiques : leçons pour [futures] femmes respectables, luxe et tapisseries, identité masquée des deux tourtereaux royaux, les grandes affaires de l'Histoire sous filtre 'intime' et rose bonbon, le tout sous la houlette de Marischka. Comble du décalque, des acteurs communs campent des personnages équivalents. Le premier opus de Sissi s'avère simplement moins confiné, son prédécesseur et les deux suivants se déroulent davantage au sein des palais.
Il offre une vue typique mais spécifiquement féminine du traditionalisme naturalisant (et romantisant) l'ordre social durement établi pour mieux le justifier. Tout est déjà écrit et installé – mais tout de même il faut placer Sissi, en général et dans sa rencontre avec le prince, en posture 'spontanée' ; comme si leur position et leur relation n'était pas due aux convenances, mais pré-déterminée. Les légitimités naturelle et sentimentale sont mises en avant pour omettre et donc ne pas trop questionner celles sociale et politique. En bons conservateurs accomplis et non ouvertement fanatisés, on chérit de petites 'permissivités' et 'outrances' : pour les membres de la noblesse, cela signifie s'abaisser à 'mettre la main à la pâte' – quasiment à travailler – au fil de son envie seulement, tout de même pas en endossant le 'devoir' qui revient aux autres classes. Ainsi Sissi sert les chevaux, papa cultive ses affinités avec la forêt.
La platitude excessive ne gêne pas la projection et les sentiments niaiseux, mais pour un public éloigné dans le temps, pragmatique ou masculin, la séance risque d'être rude. D'autant que la tension est nulle, alimentée par un scénario sans complexité, conflits ou contradictions – hormis cette maldonne autour de Sissi et Hélène ainsi que les timides états d'âme de la première. Les concurrents contemporains en costume sont creux aussi mais savent généralement mieux doper les aventures, voire resserrer l'écriture – comme le 'très moyen' Prisonnier de Zenda. Le film marque des points grâce aux excellents décors [naturels] et à son aspect 'chiffons' haut-de-gamme. Le renforcement par la technique Agfacolor est particulièrement manifeste lors d'une scène où des femmes en robes verte, bleu nuit et rouge discutent cote-à-cote.
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Créée
le 20 août 2019
Critique lue 463 fois
3 j'aime
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