GNAP!
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Rogue confirme l’intérêt que porte le cinéma de Greg McLean aux monstres mythiques contre lesquelles buttent les individus : le film présente d’emblée son monstre comme une créature mythique, les crocodiles de mer étant « les descendants directs des dinosaures ». Nous pouvons voir, dessiné sur la roche des parois, un gigantesque spécimen qui apparaît ici comme le gardien de cette partie du territoire australien ouverte au braconnage et au tourisme, deux fléaux auxquels le crocodile apporte une solution.
Nous pouvons interpréter les attaques selon deux angles concurrents : elles rétablissent une harmonie en purgeant l’espace de ses maux, rappelant aux hommes leur fragilité intrinsèque ainsi que leur place dans une chaîne alimentaire qui les dépasse ; elles mettent à l’épreuve l’individu qui, suivant un parcours christique, en ressortira héros, sens à donner au mouvement de caméra qui se rapproche du mur aux trophées pour cadrer la photo du « rebelle » (l’une des traductions possibles du titre du long métrage), Peter McKell. C’est ainsi qu’il faut interpréter le sauvetage de la guide touristique en détresse par le brave homme en chemise blanche : il s’agit d’un cliché, la substitution illusoire d’une légende humaine au mythe qu’il pense avoir tué. La clausule atteste une ironie diffuse, s’attache à filmer le brancard sur lequel Kate Ryan flotte dans les airs comme s’il s’agissait d’une scène d’élévation biblique, puis casse sa trajectoire en filmant un mur en gros plan, seule mémoire de l’exploit humain.
Dit autrement, Rogue met en scène le résultat du combat opposant l’homme solitaire et la divinité collective comme le grand prix d’un concours de pêche, érige en légende locale un héros au sens mythologique du terme. Preuve également que les mythes du territoire australien ne meurent jamais vraiment, qu’ils perdurent dans l’âme de ses canyons, et qu’un crocodile, aussi monstrueux puisse-t-il être, peut en cacher un autre tout aussi redoutable.
Tout en étant un excellent survival, parfaitement rythmé et efficacement mis en scène, bénéficiant en outre d’effets visuels superbes, Rogue nous invite à réfléchir sur le besoin des hommes à se construire des fictions dans lesquelles se raconter et auxquelles se mesurer, sur la propension d’un territoire à bercer un imaginaire primitif, cruel et violent en réactions aux images idylliques remplissant les catalogues de tourisme.
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le 29 mars 2020
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