Contient des spoils
Ayant vu les six premiers épisodes de la saga Star Wars, je ne pouvais pas ne pas aller voir le septième. Fan des trois premiers (dans l’ordre de réalisation et non pas dans l’ordre chronologique), je ne pouvais pas ne pas faire de critique sur ce nouvel opus non signé de la main de George Lucas, fondateur de cette série de films qui a bercé de nombreuses générations. Sans être une fan inconditionnelle de l’univers, il y a tout de même quelques éléments de ce film que je ne peux décemment pas laisser passer.
Star Wars : le réveil de la Force se déroule quelques années après la fin du Retour du Jedi (si on ne se plante pas trop dans l’évaluation morphologique de Kylo Ren et Rey, on peut tabler sur vingt piges (bon, en fait c’est 30, parce qu’il en fallu dix pour pondre les marmots)) et pourtant, une foule de choses s’est passée dans ce très court laps de temps (sur une échelle géologique, c’est un pet de mouche et même sur une échelle humaine, c’est le quart d’une vie). La Rébellion est devenue la Résistance, l’Empire est devenu le Premier Ordre, les Jedis sont devenus des mythes (en 30 ans, c’est tout de même pas mal…), les Siths ont été supplantés par les Ren (dont personne n’avait jamais entendu parler) et la Force n’est plus qu’un vague concept qu’on raconte aux enfants entre une petite souris et un Père Noël. Et là, je ne vous évoque pas tout…
SW : lrdlF, ce sont aussi de nouveaux personnages et des anciens. De nouveaux invités dans la saga interstellaire, avec :
- Rey : détrousseuse de carcasses de vaisseaux impériaux pour gagner son pain moisi lyophilisé, à l’instinct de pilote hors pair, qui vit sur une planète désertique nommée Jakku ;
- Kylo Ren : seigneur des Rens, combattant du Premier Ordre tout de noir vêtu, au visage dissimulé sous un masque de métal qui déforme sa voix, au sabre-laser rouge vif crépitant et au caractère de chien ;
- Poe : le meilleur pilote de la Résistance à l’apparence de flambeur et toujours accompagné de son fidèle droïde, BB-8 (un robot en bonhomme de neige dont la tête tient par la grâce de la Sainte Force) ;
- FN-1234 (©OdieuxConnard) : Stormtrooper qui a raté sa formation, naïf, peu dégourdi, qui n’a qu’un objectif dans la vie : se barrer très très loin de cette mélasse en emportant Rey sous son bras.
Et puis des anciens dont je tairais le nom pour laisser la surprise aux rares qui ne seraient pas au courant malgré tout le ramdam fait par Disney. Des anciens avec quelques kilos supplémentaires, des cheveux blancs et une apparence subtilement différente pour faire genre « les années ont passé, z’avez vu ? » (bon, en l’occurrence, c’est la vérité mais il y a un peu de plus de trente ans qui sont passés donc on peut se dire que les voyages supra-luminiques, ça laisse des traces).
SW : lrdlF, c’est un scénario… pas du tout inédit. Si vous avez une forte impression de déjà-vu qui vous explose en pleine face dès les premières minutes du film, rassurez-vous, ça veut dire que votre cerveau est en parfait état de marche (contrairement à celui des scénaristes). Soyons franc, cet opus est un condensé des épisodes IV à VI, en zappant tout le côté apprentissage sur Dagobah, en gommant le triangle « amoureux » Luke/Han/Leïa et en supprimant tout le côté épique de la chasse à l’homme des trois films en question. Concrètement, les scénaristes ont repris la même base qu’il y a 35 ans, retiré tout ce qui était intéressant, pour aller directement au feu d’artifice final (avec une planète plus grosse et moins de sauts périlleux que dans les épisodes I à III). De même, tout le côté mystères et grandes découvertes (lien de parenté Luke/Leïa/Vador, lien Paletartine/Empereur, etc.) est passé totalement à la trappe. On sait en deux minutes chrono qui est qui, qui va faire quoi et qui va mourir dans la scène suivante. De fait, en deux heures dix-neuf minutes, on se fait un tout petit peu suer (pour ne pas dire qu’on bâille carrément).
SW : lrdlF, c’est aussi toute une foule d’incohérences qui entraîne un ballet de haussements de sourcils chez les spectateurs. Entre cette créature des sables qui a capturé BB-8 avant de le laisser tomber aux mains de Rey sous prétexte qu’elle a un peu haussé le ton (pour information, sur cette planète, le seul moyen de manger, c’est de vendre du métal), cette autre créature tentaculaire dont j’ai oublié le nom qui boulotte tout le monde sauf FN-4567 (visiblement, elle comptait se le garder pour plus tard), ces deux zozos qui racontent au premier péquin qu’ils croisent qu’ils ont en leur possession des plans ultra-secrets pour la Résistance (c’est pas comme si il pouvait y avoir des gens à la solde du Premier Ordre répartis un peu partout dans l’espace) ou encore ce Stormtrooper en charge de la collecte des ordures qui se trouvaient dans un bataillon de soldats et qui connaît tous les plans de l’Etoile de la Mort bis comme sa poche.
Je vous passe Rey qui apprend à utiliser la Force toute seule, comme une grande, juste parce qu’on lui a dit que la Force existait toujours (comme dirait une amie qui était avec moi lors de la séance : « Moi aussi quand on me montre une photo de soufflé, je sais le faire »). Les X-Wing de la Résistance qui dégomment tous les Stormtroopers sans toucher les gentils qui sont pourtant au milieu du bataillon. Ce Kylo Ren qui porte un masque pour aucune raison apparente vu qu’il ne ressemble même pas à ses parents (à part qu’il est moche, je ne vois pas…). Ce même Kylo Ren qui dessoude un ordinateur à coup de sabre laser sans que cela n’ait le moindre impact sur le fonctionnement du vaisseau (il faut croire que l’interface était là juste pour faire joli). Ce Stormtrooper tout de métal fait qui, je suppose, à la base devait bien en imposer (un peu à la manière d’un Grevious ou Boba Fett) mais qui est rangé aux ordures en deux coups de canif. Et cette planète de métal (parce que c’est un vaisseau normalement, à l’image de l’Etoile de la Mort) qui est couverte de montagnes et de forêts (moi aussi, je fais pousser des bonzaïs dans ma poêle à frire). Et ainsi de suite… Des non-sens de ce style, il y en a toutes les dix minutes dans le film.
SW : lrdlF ensuite, c’est une histoire écrite avec des gros bouts de corde. Tout est tellement énorme que l’on pourrait réécrire mot pour mot le script des scénaristes, à la virgule près. Tout est tellement fait pour ne pas fatiguer le cerveau des spectateurs que ça en devient énervant : le Stormtrooper marqué de sang pour qu’on puisse le différencier des autres (et dont on sait qu’il va trahir le Premier Ordre en sauvant Poe à la minute où Kylo Ren le regarde en biais), ce même Stormtrooper qui s’avère être noir juste pour satisfaire les quotas américains (et qui est donc affublé de tous les clichés de l’homme de couleur des films états-uniens), ce rabâchage permanent des mêmes informations (on le saura que BB-8 a les plans, que Kylo est le fils de Han et Leïa, et que Poe et Rey sont des super pilotes), le monde entier qui se regroupe à Jakku (Poe, BB-8, Rey, FN-8910, le Faucon Millénium, etc.), Mama Alien qui comme de par hasard possède le sabre-laser de Luke (pourquoi elle ? Pourquoi pas Leïa alors que ce serait autrement plus logique ?), et je parie une pastèque sur le lien fraternel entre Poe et Rey (deux personnages à l’instinct de pilote hors pair, dont un qui a un lien de parenté évident avec Luke, ça fait beaucoup de coïncidences pour être totalement fortuit). Bref, c’est pénible parce que dès les premières minutes, on sait ce qu’il va se passer et, pire, dès le premier film, on sait ce qui va se passer dans les suivants.
SW : lrdlF enfin, c’est du pilonnage en règle de tout ce qui avait été posé dans la première trilogie. Certes JJ Abrams nous fait des centaines de clins d’œil à la saga d’origine en faisant réapparaître des croiseurs impériaux, des AT-AT, des casques de chasseurs de la Rébellion, des personnages et même le scénario originel (il a juste modifié les noms), mais il piétine joyeusement tout le reste. Comme dit au-dessus, toute la partie apprentissage du maniement de la Force que Luke avait subi sur Dagobah via Yoda, tout comme l’apprentissage d’Anakin via Obi-Wan ou celui de ce dernier par Qui-Gon, sont mis au rebut par le fait que, finalement, on peut apprendre à manipuler la Force en un battement de cil (c’est ce que Rey fait). Les Siths, qui m’apparaissaient pourtant comme être le pendant obscur des Jedis, sont jetés aux orties pour être remplacés par des Rens. Tous les Stormtroopers qui devaient être des clones de Jango Fett ne le sont plus (maintenant, ce sont des mômes enlevés qui sont conditionnés). Moff Tarkin est singé par un blondinet sans envergure qui se prend pour Hitler. La place du grand méchant, autrefois occupée par Dark Vador, est prise par un adolescent boutonneux qui boude, pleurniche et est déstabilisé par un rien. Et le méchant encore plus méchant qui naguère fut l’Empereur (une petite créature ridée, sournoise et sans pitié) a été supplanté par un hologramme démesuré d’une créature dont j’ai complètement oublié le nom mais qui a manifestement quelque chose à compenser (plus grand ne veut pas dire plus charismatique, monsieur Abrams). D’une manière plus triviale, les pirouettes incongrues que les Jedis savaient faire dans la seconde trilogie (la plus récente) n’ont plus cours ici : chacun reste bien campés sur ses pieds, fait deux-trois moulinets pour faire style et puis dès qu’une crevasse se forme entre les deux combattants, le duel est fini (m’est avis qu’avant, ça n’aurait pas posé de problème).
Bref, pour être concise, je me suis ennuyée. Le film ne commence à décoller que dans le dernier quart de l’œuvre sans parvenir à s’élever très haut (une hauteur de cheville, à peu près). Les nouveaux personnages sont creux et fades. Les effets spéciaux bon marchés (sérieux, vous avez vu comment se déplace cette monture sur Jakku : même le Tauntaun sur Hoth était plus vif). La musique est insipide. C’est vide, sans intérêt, plat, morne, nul.
Remplacer des noms par d’autres ne signifie pas que l’on est créatif. Effacer toutes les bases posées il y a trente ans, ne fait pas d’un scénariste un génie. Et multiplier les clins d’œil aux fans de la première génération ne fait pas d’un scénario plein de trous un meilleur gruyère. Pour moi, c’est un échec.