/!\ AVERTISSEMENT : CETTE CRITIQUE CONTIENT DES SPOILERS /!\
SPOILERS
SPOILERS
SPOILERS
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SPOILERS
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Maintenant que vous êtes prévenus, on va pouvoir rentrer dans le vif du sujet et SPOILER comme des malpropres.
Un petit film indépendant de science fiction est sorti sur nos écrans il y a plusieurs jours. Je me suis dit que ce serait intéressant d'en faire le sujet de ma première critique sur ce site.
Plus sérieusement, j'attendais la sortie de ce huitième opus avec une impatience pas (du tout) dissimulée. Star Wars a toujours été bien plus qu'une saga pour moi. Et après un épisode VII que j'avais beaucoup aimé malgré ses défauts, suivi d'un épisode spin-off qui m'avait encore plus convaincue, l'attente était énorme. En valait-elle le coup? Au vu de ma note, vous vous doutez déjà de la réponse. J'ai tout simplement adoré les prises de risque et les nouveautés proposées par le film. Et ce, à plein de niveaux.
J'aborderai d'abord le côté purement technique pour ensuite parler de ce qui me passionne le plus : les personnages et les thématiques de cet univers.
La réalisation: inventivité et dynamisme
Dès que j'ai appris que Rian Johnson réaliserait l'épisode VIII, mon enthousiasme a grimpé de plusieurs crans. J'avais adoré son précédent film, Looper, qui m'avait marquée par sa transcription assez contemporaine de la SF (en n'hésitant pas à placer l'action au sein de champs de blé par exemple), ses thématiques universelles, ses plans superbes, son originalité pour un thème du genre pourtant vu et revu (le voyage temporel) ...
Son Star Wars comporte de bonnes idées de mise en scène. On sent qu'il est passionné de photographie et a le sens du grandiose. Parmi les éléments qui m'ont le plus marquée:
=> La bataille d'introduction au-dessus de D'Qar, quand Paige doit larguer ses bombes sur le Premier Ordre : toute la tension qui précède est accentuée par l'utilisation de ralentis et par le silence total du côté des personnages et de leur environnement, le tout magnifié par la musique de John Williams traduisant ce sentiment d'urgence. Plus tard, une autre séquence spatiale utilise à nouveau le silence; mais de façon totale cette fois: pas un seul bruit,aucune musique lorsque le vaisseau amiral fonce à vitesse lumière pour en fendre un autre en deux morceaux nets; un clin d’œil amusé aux détracteurs de la saga qui mettent en avant le manque de cohérence scientifique car il n'y a pas de bruit dans l'espace?
=> Sur Ach-To, des travelling aériens viennent souligner le côté imposant et intemporel de l'île. J'ai aimé ce plan où la caméra tourne autour de Rey au loin lorsqu'elle s'entraîne au sabre sur la falaise, immédiatement suivi d'un plan rapproché sur elle.
=> La connexion entre Rey et Ben, rendue efficace par des plans qui se répondent parfaitement, là où il aurait été de mauvais goût d'avoir recours au split-screen.
=> Toute la séquence finale sur Crait est un régal pour les yeux et si certains plans rappellent l'Empire contre-attaque (les Rebelles dans les tranchées se battant contre les quadripodes), il n'en est rien pour l'immense partie de la scène. Le rouge caché sous le sel symbolisant le sang et la guerre au fur et à mesure que les deux camps s'affrontent. Le duel final entre Luke et Ben, qui emprunte à la fois des codes au westerns et aux films de samouraïs, avec une touche de modernité (un petit côté Matrix?) et une photographie à couper le souffle, dans des tons de rouge toujours. Cette utilisation de la couleur rouge est d'ailleurs remarquablement maîtrisée pendant tout le film, et ce depuis son titre et son affiche. La salle du trône de Snoke. Sa garde prétorienne (d'ailleurs l'un des gardes finit broyé dans une sorte de puits et on voit alors jaillir des morceaux de son armure rouge, métaphore plutôt gore pour un film tous publics, j'ai beaucoup apprécié). La caverne de cristaux rouges sur Crait... Johnson donne une identité visuelle singulière qui est la bienvenue dans un univers qui a besoin de se renouveler.
=> La mort de Luke sur Ach-To : mise en scène simple mais efficace alternant plans serrés sur Luke et plans montrant le coucher de soleil, preuve que notre héros a toujours « les yeux rivés vers
l'horizon » jusque dans ses derniers instants. Est-ce que j'ai pleuré toutes les larmes de mon corps pendant cette scène ? Vous avez le choix entre « je vais m'en remettre » et « c'est la faute de mon voisin de siège, il a épluché des oignons dans la salle à ce moment-là ».
Là où la mise en scène de JJ Abrams était belle mais un peu trop scolaire, Johnson ose faire évoluer discrètement l'identité visuelle et filmique de la saga. C'est le premier Star Wars où l'action reprend exactement là où elle s'était arrêtée dans le précédent. On a droit à notre premier flash-back dans la saga. A l'inverse de tous les opus précédents, le film se termine sur un personnage qui ne fait pas partie des héros et dont on ne sait rien si ce n'est qu'il est esclave sur Canto Bight : une perspective inédite qui introduit la nouvelle trilogie de Johnson en chantier ? Quant à la narration, elle enchaîne les coups de théâtre dès le milieu du film, sans temps morts : c'est d'ailleurs en partie pour cette raison que j'ai eu du mal à me remettre du premier visionnage, j'étais submergée par ces révélations en cascade. Je reconnais que l'arc narratif de Finn et Rose n'est pas le point fort du film mais je ne l'ai pas détesté pour autant car il permet malgré tout de faire évoluer les personnages.
Dernier petit point, sur l'humour: est-il abusif? Je reconnais avoir mal digéré la vision de Luke jetant son sabre par-dessus son épaule la toute première fois. La seconde fois j'en ai eu une toute autre impression: l'effet de surprise était passé,je n'avais plus cette attente démesurée de la scène en question et le geste ne me semblait plus ridicule mais au contraire cohérent avec le personnage de Luke et le propos du film. D'une manière générale, hormis sur quelques scènes, j'ai trouvé que l'humour était bien dosé et n'avait au passage rien de nouveau dans Star Wars. Le fait que Hux soit présenté comme ridicule et serve littéralement de punching-ball ne m'a pas dérangée, je le trouvais déjà pitoyable dans l'épisode VII: ce "roquet enragé" (dixit le Supreme Leader Snoke) a un développement cohérent avec ce qui avait été commencé par Abrams.
Les personnages: "ce ne sont pas les héros que vous recherchez"
Luke: Pour contextualiser la chose, il s'agit de mon personnage préféré tous épisodes confondus. Cet opus nous introduit un Luke brisé, complètement dépassé par les événements. C'est une évolution réaliste quand on considère tout ce qui lui est arrivé depuis l'épisode IV. Récapitulons donc chronologiquement: Luke ne connaît pas ses parents, apprend du jour au lendemain que son père était en fait un Jedi assassiné par Dark Vador, perd dans la même journée son oncle sa tante et son nouveau mentor, manque de mourir d'hypothermie, a des visions de ses amis se faisant torturer, apprend que Vador son ennemi juré est en fait son père, se fait trancher la main, voit Yoda mourir, se bat à nouveau contre son père mais dans un contexte tout à fait différent symboliquement, tranche la main de son paternel dans un bref passage vers le côté obscur, frôle la mort par la foudre de l'Empereur, voit son père mourir et termine en héros de la Rébellion. Les années ont passé, Luke a décidé d'entraîner Ben Solo son neveu et une poignée d'élèves pour créer la nouvelle académie Jedi. Il est témoin d'un retour du côté obscur en la personne de Ben, manipulé par Snoke; il est terrifié à l'idée de perdre à nouveau des êtres chers. Luke est certes un héros mais pas un surhomme pour autant: qu'il perde les pédales à cet instant en songeant à tuer Ben l'espace d'une seconde, que cette pensée ait suffi à créer un quiproquo et soit responsable partiellement de la création de Kylo Ren, c'est tragique et cohérent. Et ça suffit à expliquer la situation dans laquelle se retrouve Luke: il a non seulement perdu espoir mais se sent on ne peut plus coupable et responsable. Une fois sorti de force de son isolement par Rey, Chewbacca et R2 (Rey étant l'avenir, R2 et Chewie son passé), il va petit à petit retrouver un sens à son existence et rééquilibrer sa vision de la Force et des Jedi, passant de "il est temps pour les Jedi d'en finir" à "je ne serai pas le Dernier Jedi", redevenant à la fin le héros qu'on connaît. Luke se sacrifie littéralement corps et et âme pour sauver la Rébellion, sa sœur (le passé) et Rey (l'avenir). Il a repris sa destinée en main et son voyage du héros se termine de la façon la plus poétique possible, les yeux « rivés sur l'horizon » avec ces deux soleils venant rappeler le tout début de son cheminement. Pour moi, il n'y a donc pas de trahison du personnage, bien au contraire. Mark Hamill nous livre sa plus belle prestation, quand bien même il n'était pas d'accord avec le destin réservé à Luke.
Ben et Rey : Leur relation à la fois étrange et touchante est une des plus grandes réussites du film. Ils sont à la fois alliés et ennemis, se trouvent tous les deux à des moments charnières de leur parcours où ils se sentent seuls au monde et n'arrivent pas à trouver leur place dans la galaxie (Rey car elle ne connaît pas ses origines, Ben car il s'est aliéné sa propre famille). Une certaine tension ponctue leurs interactions, difficile de définir ce qu'ils éprouvent réellement l'un pour l'autre: un mélange ambigu entre amitié et attirance amoureuse, teintée de manipulation ? Quoiqu'il en soit, chacun de son côté a franchi une grande étape :
- Ben : Le fils de Han et Leia est officiellement devenu mon personnage
préféré dans cette nouvelle trilogie. Son hésitation constante, son
éternel tiraillement entre le côté obscur et le côté lumieux donnent
une nouvelle dimension aux « méchants » de Star Wars : il suscite de
l'empathie chez le spectateur. Les premières scènes nous le
présentent brisé intérieurement après avoir tué son propre père, puis
humilié méthodiquement par son maître, « tu n'es pas Vador : tu n'es
qu'un enfant portant un masque » lui dit ce dernier. Un parallèle
avec les critiques qui lui reprochent cet aspect « ado pourri gâté en
pleine crise existentielle ». Je le vois plutôt comme un être enfermé
dans un cercle infernal, manipulé par les mauvaises personnes et
piégé dans un rôle qui n'est pas le sien, virant de plus en plus
nihiliste pour justifier ses actions, quitte à y perdre son âme et
ceux qu'il aime. Adam Driver est la meilleure idée de casting de la
postlogie, il parvient à nous faire ressentir tous les tourments de
Kylo Ren, ses hésitations, ses colères, ses faiblesses mais également
ses bons côtés (capacité d'empathie envers Rey, instants de
lucidité ; je pense notamment au moment où il est sur le point de
faire feu sur Leia et se ravise). Les dernières scènes marquent le
début de la fin pour Ben alors que ce dernier semble s'engager de
façon inéluctable vers le côté obscur : sa propre mère a totalement
perdu foi en lui et considère qu'il est perdu, son oncle lui donne
une leçon qu'il n'est pas prêt d'oublier et Rey coupe leur connexion
psychique. Hormis son statut de Supreme Leader et la victoire du
Premier Ordre, il perd tout à la fin, jusqu'aux dés du Faucon qui se
désagrègent sous ses yeux : le désespoir est palpable. J'ai hâte de
voir ce qu'on nous réserve pour ce personnage pour le prochain
épisode maintenant qu'il a pris la place de son maître … Un fait
inédit au passage pour la saga, Vador avait certes tué l'Empereur
mais assez tardivement dans la saga et n'avait pas survécu pour
prendre sa place. Serait-ce le fameux « je finirai ce que vous avez
commencé » lorsque Ben parle au casque de Vador dans l'épisode VII ,
renverser le pouvoir en place et en devenir le leader ? Sans doute
pas (vraiment pas) mais ce serait amusant que ce soit le cas.
- Rey : Son cheminement rappelle celui de Luke mais en version
accélérée et avec une quête existentielle trouvant une réponse
opposée. Là où Luke terminait son affrontement avec Vador en
apprenant son lien de parenté avec de dernier ; Rey achève sa quête
d'identité en apprenant au contraire qu'elle n'est la fille de
« personne » (sa pire crainte à en juger la scène de la caverne) et
doit construire sa propre légende et la Rébellion à partir de cette
simple mais terrible vérité. La lumière n'ayant pas été totalement
faite sur son personnage compte tenu du fait qu'il reste encore un
épisode, je ne sais quoi penser de la révélation sur ses parents pour
le moment. J'avoue que j'aime assez la réponse qui nous est proposée
car elle est à contre-courant de ce à quoi nous sommes habitués et
est cohérente si on considère que Rey s'est menti à elle-même (le
flash-back du VII serait donc un leurre ou un souvenir plus flou
qu'il n'y paraît?) ; mais je ne serais pas non plus étonnée qu'on
apprenne que Ben lui a tout simplement menti. A l'instar du Luke de
l'Empire contre-attaque, on voit une Rey plus fragile qu'avant, en proie au doute. Cependant elle ne se laisse pas abattre, à la fin du
film : là où Luke terminait l'épisode V profondément marqué par la
révélation sur son lien de parenté, en manquant d'y rester et sauvé
de justesse par Leia, Rey repart tout de suite au combat après ses
désillusions sur le vaisseau de Snoke. Elle a bel et bien « trouvé sa
place dans tout ça » et prend le flambeau de Luke, prête à se battre
pour la Rébellion. Elle semble également voyager avec plus de
facilité que lui entre les deux côtés de la Force.
Leia : Bien qu'elle soit beaucoup moins présente que son frère pour une raison simple (dans le coma suite à l'attaque de son vaisseau par le Premier Ordre), j'ai aimé son évolution, Générale classieuse et déterminée passant petit à petit le flambeau à Poe Dameron. Carrie Fisher nous ayant quittés l'année dernière, chaque scène où elle apparaît a été un pincement au cœur et c'est d'autant plus vrai lorsque l'on croit Leia morte, flottant dans l'espace après avoir été éjectée de son vaisseau lors d'une explosion. Faire utiliser la Force à Leia de façon aussi impressionnante était un pari très (très) risqué mais je trouve cette scène très belle symboliquement et considère qu'elle est dans la continuité logique de la saga, surtout quand on nous fait comprendre depuis un bon moment que la Force est puissante en elle. Sinon, comment expliquer le fait qu'elle résiste à l'interrogatoire de Vador, qu'elle entend l'appel de Luke sur Bespin, qu'elle a des souvenirs de sa mère alors que cette dernière est morte en couches, qu'elle ressent d'une manière générale si un être qui lui est cher est mort ou vivant ? En trente ans Leia a eu le temps de développer de nouvelles capacités/sensibilités à la Force. D'autant plus qu'elle se trouve en danger de mort imminente dans cette scène, une situation qui décuple ses réflexes de survie et lui fait utiliser la Force de façon encore jamais vue dans les films. Cette scène fonctionne également pour appuyer un des propos du film : la Force n'est pas l'apanage des individus ayant reçu une formation Jedi et vient à toute personne sachant faire appel à elle (comme l'enfant esclave sur Canto Bight par exemple). J'ai sincèrement aimé la prise de risque même si le rendu visuel aurait pu être davantage travaillé.
Je ne mets bien sûr pas de côté les autres personnages, aussi bien les « anciens » que les nouveaux. Eux aussi ont eu droit à leur développement, j'ai simplement moins à dire sur eux.
- Finn m'a étrangement paru plus effacé dans cet épisode alors qu'il
évolue malgré tout. L'ancien stormtrooper découvre petit à petit la
galaxie en dehors de la propagande que le Premier Ordre lui a
inculquée toute sa vie. A la fin il est prêt à se sacrifier
volontairement pour la Rébellion (là où il se battait contre Kylo Ren
à la fin du VII mais pas franchement par choix...). Il reste un
personnage touchant mais n'est pas le point fort du film niveau
écriture, j'ai la sensation qu'il fait un peu de surplace.
- Poe entre en conflit avec ses supérieures (Leia et Holdo) prend du
galon et nous fait voir ses défauts (en l'occurrence son côté
impétueux). Lui qui était un rôle secondaire dans Le Réveil de la
Force est beaucoup plus présent. Son duo avec BB8 est toujours aussi
attachant (BB8 est un hybride chien – hamster, il faut se rendre à
l'évidence).
- Rose est une mécanicienne dont l'idéalisme plaît ou déplaît mais elle
apporte en tout cas de la fraîcheur au film et va permettre à Finn
d'évoluer en lui ouvrant les yeux sur certaines réalités dont il n'a
pas encore conscience.
- Holdo m'a beaucoup surprise par les revirements successifs de son
personnage, passant d'Amirale digne mais un poil cassante, à
traîtresse puis martyre de la cause Rebelle.
- Hux est le punching-ball de service et comme je l'ai dit plus haut,
ça ne me pose aucun problème (pour être tout à fait honnête j'en
rêvais depuis l'épisode VII)
"Laisse mourir le passé?"
Thématiquement Les Derniers Jedi propose des axes nouveaux pour la saga ou s'amuse à les revisiter :
"Détruire" pour mieux reconstruire: Au premier degré, ce Star Wars détruirait les fondations de la saga en faisant de la Force une puissance qui n'est plus l'apanage des Jedi, en désacralisant ces derniers (responsables partiellement de la création de l'Empire et de Dark Vador) et en faisant mourir Luke. Or on nous prépare depuis plusieurs films à une remise en question de la Force : les épisodes V et VI présentaient déjà une Leia la maîtrisant dans son versant psychique ; l'épisode VII nous a introduit Maz Kanata et Lor San Tekka (personnages très secondaires mais ressentant et défendant cette puissance sans pour autant être des Jedi) et Rogue One nous a carrément mis en scène un fervent croyant, Chirrut Inwe Gardien des Whills, capable d'accomplir des prodiges sans sabre laser ni même pouvoirs de télékinésie. Il est logique que la Force évolue au fil de la saga: par leur rigidité, les Jedi de l'ancien ordre dans la prélogie étaient quelque part dans l'erreur, chose que fait judicieusement remarquer Luke à Rey lors de la « deuxième leçon ». Luke est justement un personnage qui avait déjà commencé à faire évoluer la voie du Jedi (en désobéissant au présumé bon sens de Yoda et Obi Wan dans la trilogie, pour parfois le pire mais surtout le meilleur!), il se perd en route mais termine son voyage avec sagesse et humilité : sa mort n'est que le commencement du renouveau (« La Rébellion a ressuscité aujourd'hui, et je ne serai pas le Dernier Jedi » assène-t-il à Ben). D'ailleurs, lorsqu'il a l'occasion de tout détruire en incendiant la bibliothèque Jedi (sans savoir que Rey a en fait déjà pris les livres avec elle) et hésite au dernier instant ; un des propos les plus importants du film, selon moi, est résumé: on ne peut construire l'avenir en faisant comme si le passé n'existait pas ("Laisse mourir le passé" est bel et bien l'adage de Ben Solo) et cette idée est accentuée par la réplique de Yoda "Nous somme le socle sur lequel ils croissent". Les Jedi ne doivent pas en finir mais doivent plutôt évoluer en transmettant leur enseignement (remis au goût du jour) au plus grand nombre comme le suggèrent les toutes dernières images du film.
Chacun à sa manière, les quatre nouveaux personnages s'affranchissent du passé et succèdent à leurs mentors respectifs :
- Rey : Désobéit à Luke et décide de se fier à ses intuitions pour
compléter son entraînement Jedi
- Ben : Tue son maître et prend sa place
- Poe : Succède à Leia de façon officieuse et va très probablement
devenir le chef de la Rébellion
- Finn : Tue Phasma et s'affirme en tant que Rebelle
Ils vont pouvoir aller de l'avant et devenir ce qu'ils doivent être. Pour le meilleur... et pour le pire (Ben sait-il vraiment ce qu'il doit devenir ? Il est le seul à ne pas être satisfait de son évolution à la fin).
L'échec formateur : Pour reprendre comme exemple la scène de l'incendie de la bibliothèque par Yoda, ce dernier dit à Luke « l'échec, apprends-leur l'échec ». Et de l'échec, il y en a dans Les Derniers Jedi, chez tous les personnages. Mais ce qui importe c'est la façon dont chacun va apprendre de ses échecs pour ensuite évoluer et trouver sa véritable place.
- Rey : Ben finit par quand même passer du côté obscur, après un faux
espoir
- Ben : Rey ne le rejoint pas et le laisse plus seul que jamais
- Finn : Son plan échoue car il a fait confiance à la mauvaise personne
(DJ)
- Poe : Son plan échoue car il a douté de la bonne personne (Holdo)
- Luke : S'est tellement laissé influencer par sa peur qu'il en a perdu
Ben et a failli perdre Rey
- Snoke : A échoué par son orgueil démesuré
Et ainsi de suite … Tout le monde a, en un sens, échoué, mais chacun a appris de son échec et va de l'avant par la suite. Sauf Snoke et Ben. Snoke est mort de son échec ; Ben survit mais dans le fond n'a pas appris de sa défaite et est totalement perdu. Vu l'importance de cette notion dans le film j'irais même jusqu'à dire que l'échec est considéré comme nécessaire pour évoluer. C'est un thème qui n'a rien de nouveau mais j'aime le traitement que lui donne Rian Johnson dans la saga.
La vérité sous plusieurs angles : A chacun sa vérité ; Obi Wan le sous-entendait dans Le Retour du Jedi lorsqu'il répond aux reproches de Luke « ce que j'ai t'ai dit était vrai … d'un certain point de vue ». Cet opus nous présente le tout premier flash-back de la saga : le fameux moment où Ben Solo s'est retourné contre son maître d'alors, Luke, pour ensuite massacrer les élèves de l'Académie. Il sera montré au spectateur dans le désordre, il va ainsi pouvoir découvrir la situation de plusieurs point de vue : d'abord objectif / extérieur (le dénouement) puis subjectif / intérieur (le souvenir vécu par Ben puis par Luke). On commence par nous montrer le dénouement, plutôt flou, de la scène : suite à une « dispute », Luke supplie Ben de ne pas faire ce qu'il s'apprête à faire puis se retrouve coincé sous des débris, contemplant son échec. La seconde fois, c'est Ben qui raconte l'histoire : selon lui, Luke aurait tenté de le tuer dans son sommeil et il s'est, en toute logique, défendu. La version finale est narrée par Luke lui-même : il admet avoir fait une erreur en se laissant détruire par sa peur du côté obscur à ce moment-là et son hésitation d'une seconde, sabre dégainé alors qu'il n'aurait jamais été capable de passer à l'acte, suffit à engendrer ce tragique quiproquo chez Ben. La vérité est subjective et chacun voit ce qu'il veut bien voir. Les deux ont à la fois raison et tort et c'est justement ce qui rend cette scène si troublante.
En quelques mots ...
Ce huitième épisode est dans la droite lignée de la saga, que l'on parle de continuité aussi bien narrative que thématique, tout en faisant évoluer les schémas traditionnels, le développement des personnages et l'univers dans sa globalité, y apportant davantage de nuances bienvenues : petit à petit, la dualité côté lumineux / côté obscur se mue en complémentarité. Au niveau de l'intrigue, tout n'est pas parfait et des incohérences subsistent, mais quel épisode en est exempt ? Celles que j'ai relevées ne m'empêchent en rien d'aimer le film. Certaines questions n'ont certes pas encore trouvé leur réponse mais n'oublions pas qu'il reste un épisode pour résoudre les plus importantes.
Rian Johnson a pris le public à contre-courant sans pour autant dénaturer Star Wars et j'en suis ravie : non seulement toute la mythologie (la Force, les Jedi, les sabres laser) et les thématiques phares de la saga y sont bel et bien présentes mais j'ai été surprise de bout en bout, et c'est ce que je pouvais espérer de mieux. Bien sûr, c'est seulement quand l'épisode IX de JJ Abrams sera sorti que l'on pourra se faire un avis définitif sur l'intérêt de cette postlogie, mais pour ma part, c'est plutôt (très) bien parti.
Bonus pour les plus motivés: attentes / spéculations pour la suite
- Quid de la carte menant à Luke puisqu'il nous dit explicitement
s'être rendu sur Ach-To pour y mourir. Qui a créé cette carte ? Lor
San Tekka (le vieux sage du début du Réveil de la Force) ? Mais
surtout, qui a fragmenté cette carte, Luke (ne voulant pas qu'on le
retrouve) ou un autre personnage ? Cette question me taraude depuis
l'épisode VII personnellement...
- Nous dévoiler la vérité (ou pas) sur les parents de Rey
- Avoir des informations sur les origines de Snoke ou au moins en
apprendre davantage sur la façon dont il s'y est pris pour manipuler
Ben
- Voir les Chevaliers de Ren
- Leia. Comment faire partir Leia dans l'épisode IX sans ressentir de la frustration après le rôle qu'elle a eu ? Carrie Fisher ne sera pas recréée par images de synthèse, son personnage sera-t-il recasté ou aura-t-il « droit » à une mort hors champ ?
- Luke revenant en fantôme de la Force mais pour hanter Ben et lui donner la fessée
- Maz Kanata expliquant comment elle a récupéré le sabre laser de Luke sur Bespin (elle l'a promis dans Le Réveil de la Force après tout)
- Ben et Rey vivant heureux jusqu'à la fin des temps et ayant beaucoup d'enf...Pardon, mauvaise saga
- Le triple triangle amoureux de la mort qui tue : Finn – Rose – Rey ;
Rey – Ben – Finn ; Poe- Finn– Rey ….. Pardon, mauvaise saga, deuxième édition
- C3PO et R2D2 vont-ils enfin se mettre en couple?
May the Force be with you : )