Remake d'un film culte avec Dustin Hoffman, Les Chiens de paille, en son temps, avait fait un flop au box-office mais est devenu un classique depuis surtout grâce à son sujet et le traitement extrême. Je ne l'ai jamais vu, juste entendu parler, c'est donc vierge de tout à priori que j'ai lancé la lecture de ce remake. En plus, coup de bol, comme le film n'est pas sorti au cinéma, je n'ai vu aucune bande annonce, ni lu aucun article dessus. C'est le genre de film que je découvre vraiment (c'est tellement rare de nos jours que cela vaut la peine d'être souligné).

Doté d'un beau casting, Straw Dogs nous met directement dans le bain en diffusant des images des paysages du sud. Ce même sud où un jeune couple va emménager dans la ville imaginaire de Blackwater d'où est originaire la jeune femme Amy Summer. Une bourgade surnommée « affectueusement » de trou du cul du monde par cette même femme jouée par Kate Bosworth.

Le film ne perd pas de temps et met en place les protagonistes dès la première expédition en ville où le jeune couple va déjeuner dans le bar de la ville. On fait la connaissance avec Charlie, l'ex d'Amy et une tension palpable s'installe déjà. Car la carrure de Charlie éclipse aisément celle de David, le mari d'Amy sans compter que Charlie peut compter sur la présence de ses trois amis. Un rapport de force s'installe d'office même si David tente à tout prix de le désamorcer. Ce rapport de force est typique même celui entre le bouseux et l'intellectuel. On s'inquiète vraiment pour le couple car paumé dans un bled où un shérif seul fait office de représentant de la loi, comment s'en sortir donc face à quatre hommes? Sans compter que la maison où habite le couple est vraiment isolé.

On peut être surpris par le choix de James Marsden pour incarner l'intellectuel vu qu'il avait incarné le grand leader des X-Men, Cyclope, et on connaît sa carrure physique (dans de nombreuses comédies romantiques, il avait fait tomber la chemise). Déjà on peut compter un bon point pour l'original qui avait choisi le frêle Dustin Hoffman, rendant exigu le rapport de force mais de toute façon, c'est un débat stérile car Charlie joué par Alexander Skarsgård est un monstre physique surpassant sans problème James Marsden (1m78 contre 1m93, l'écart est flagrant). Surtout que le réalisateur exhibe les muscles saillants de Charlie tandis que David est tout le temps camouflé sous des vêtements et des lunettes rondes le rendant faible.

Pour le rôle de la femme, Kate Bosworth est un excellent choix car elle arrive sans peine à concilier fragilité, sexytude et force, la femme moderne en somme. Elle est même celle qui est au cœur des enjeux entre David et Charlie.

Par ailleurs, le film s'attache aussi à examiner progressivement l'escalade de la violence en décortiquant des petits faits séparant le monde citadin de celui de la campagne. Le tout commence avec la décision de David d'engager Charlie pour rénover sa grange. Étant un parisien, je me suis bien plus facilement rangé du côté de David, choqué comme lui lorsque l'un des amis/ouvriers de Charlie débarque dans la maison pour récupérer des bières. Impensable en ville, beaucoup moins en campagne.

J'ai beaucoup aimé le fait que le film conserve de bout en bout une tension palpable pour arriver à son paroxysme à l'heure et dégénérer totalement vers la fin avec un siège mémorable (le Maman, j'ai raté l'avion version adulte). Je sentais mes tripes se remuer par l'extrême violence psychologique qui se dégageait. J'ai été également très surpris par la classification Accord parental souhaitable pour le film alors que l'original était Interdit aux moins de 16 ans. Après visionnage, j'aurais tout de même mis une interdiction aux moins de 16 ans (à minima 12 quand même) car si la violence graphique n'est pas énorme, quelques gouttes de sang par-ci et par-là, la pression psychologique malsaine qui s'en dégage est hard et trouve même une scène de viol insoutenable aussi tranchante que celle de la version originale de Millenium ou celle d'Un dimanche à Kigali (la scène de viol la plus horrible vue au cinéma).

SPOILER
Sans compter le côté malsain où Amy gémit de plaisir lors de son viol.
FIN SPOILER


L'histoire secondaire avec le frère de Michael dans Prison Break, Dominic Purcell, se révèle extrêmement anecdotique malgré un retournement de situation inattendu, elle a la faiblesse de n'être que catalyseur des évènements finaux. Dommage quand on voit l'excellent trio porté par James Wood au cœur de cette intrigue.

Le film a au moins le mérite d'interpeller et de questionner par son sujet et sa résolution extrême. Difficile de ne pas engager le débat et étudier la cascade de violence avec votre camarade.


SPOILER
Personnellement, je trouve que le personnage d'Amy est assez inconscient. Elle se montre nue devant les ouvriers, elle devrait probablement se douter que telle action ne devrait pas être sans conséquence. On peut néanmoins se dire qu'elle voulait rétablir une relation sexuelle avec David vue que la scène de viol est nettement plus douce que celle avec l'ami de David.

Amy, un personnage trouble qui interpelle à l'heure actuelle où le débat des jeunes femmes violées n'a jamais été aussi fort surtout avec la question : « Pourquoi s'habiller comme des prostituées ? ». Par mon expérience personnelle, j'étais parfois choqué par les vêtements de jeunes filles de mon âge lorsque j'étais au collège (surtout souvent, ces filles revenaient avec des problèmes de viols).

L'autre point du film concerne le personnage non violent David qui tente à tout prix d'atténuer les conflits avec David. Ce qu'on pourrait percevoir comme de la faiblesse, d'ailleurs Amy le lui reproche plusieurs fois, n'est qu'en fait un précepte à la non-violence. Le final met en valeur cette capacité de Charlie à succomber à son instinct de survie en déployant une panoplie de sadisme inattendue (ponctué par un dernier meurtre choquant, franchement je ne m'attendais pas à ce que le piège soit jeté sur la tête). La parallèle avec Stalingrad est d'ailleurs bien trouvé.
FIN SPOILER
Marvelll
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le 17 févr. 2012

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Marvelll

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