Dans une petite ville des États-Unis laissée à son triste sort, un parrain local pétri d'idéologies racistes harcèle une veuve immigrée et ses enfants pour mettre la main sur leurs terres. Alors que la situation ne fait qu'empirer, la famille recueille une nuit un étrange vagabond caché dans leur grange...
Accrocheur, "Sunrise" l'est assurément dès ses premières minutes en nous emportant dans les vapeurs de son irrépressible atmosphère mortifère, où le son permanent de croassements lugubres semble délaver ce cadre rural américain de toutes couleurs un tant soit peu vives, à part bien sûr celle du sang. Si, comme les panneaux d'ouverture du film nous en avertissent, quelque chose a aspiré depuis des lustres les lueurs d'espoir en ces lieux, c'est aujourd'hui le personnage de Guy Pearce et ses sbires un brin rednecks qui y règnent en maître, emmenés par les discours nauséabonds de ce leader prêt à tout pour éradiquer une présence étrangère qui irait à l'encontre de ses plans ou ses principes.
Intrigant, le long-métrage d'Andrew Baird continue de l'être en posant les différents niveaux de sa nébuleuse de protagonistes concernés, pris dans cet engrenage de violence et de haine amené à connaître un inéluctable point de non-retour dans un contexte où l'horreur/fantastique vient fatalement mêler ses propres ténèbres à ceux des Hommes. Évidemment, les contours codifiés d'un récit de revenge-movie se dessinent assez vite avec l'arrivée de l'étrange vagabond interprété par Alex Pettyfer au sein de ce noyau familial brimé mais, en jouant avec le caractère forcément hors-norme de ce personnage placé au milieu d'enjeux tragiques rationnels et, surtout, présent pour rappeler avec force à celui de Guy Pearce combien le sang est bien le même en chaque être humain (quelque soit ses origines), "Sunrise" promet une confrontation possiblement explosive à défaut d'être imprévisible.
Et puis, inexplicablement après tous ces efforts alléchants, Andrew Baird paraît soudain abandonner la barre de son propre récit, le laissant tout simplement s'éterniser vers ses points les plus attendus (les flashbacks pas foufous sur le fond et la forme, notamment en termes de mise en scène, quand la caméra cherche à partager le ressenti de l'étranger) et lentement dériver jusqu'à perdre de vue la concrétisation tant espéré de son potentiel pourtant si séduisant.
Dès lors, "Sunrise" donnera le sentiment d'un film sans gouvernail, restant à l'aube de ce qui aurait pu être ses arguments les plus forts pour se contenter d'un étrange minimum syndical, même pas capable de produire le brasier crépusculaire tant désiré entre tous les pions placés au milieu de sa toile (et ce n'était pas si compliqué !) ou rendre justice à son sympathique casting -à commencer par Guy Pearce, monstrueux dans tous les sens du terme- par ses virages scénaristiques synonymes d'une constante perte d'intérêt chez le spectateur, en plus de répéter inlassablement sa métaphore "sanguine" et à nous en lasser in fine.
Non pas que l'on en attendait énormément mais les qualités de l'exposition sombre de "Sunrise" pouvait laisser espérer à bien plus en se situant à une frontière de registres aguichante, il en restera l'impression d'un long-métrage les désagrégeant sur la durée faute d'avoir su les exploiter à leur pleine mesure. Dommage, vraiment, il y avait tellement mieux à faire de tout ça...