Home Sweet Home
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"Un homme doit avoir des principes." Cette petite phrase glissée lors d'une scène d'introduction qui lèvera en quelques minutes au maximum le curseur d'ambiance noire de ce polar réussi n'aura rien d'anodine. Tout comme ce discours excessif et caricatural d'un prêcheur à la radio, entendu plus tard dans le film et se désolant de la disparition d'une certaine idée de la moralité en Amérique. Dans ce paysage assombri d'Alaska où se déroule "Sweet Virginia" (le paradoxe du titre n'est pas forfuit), le quatuor de personnages évoluant en son sein semble, en effet, plongé dans l'obscurité éternelle de leur petite ville où les plaies encore ouvertes du passé, la cupidité, la culpabilité de l'adultère, la vengeance et le meurtre ont absorbé la moindre lueur d'espoir des décors dans lesquels ils interagissent.
S'il pouvait être déjà être considéré comme une sorte de manifestation ultime de la perdition de cette ville et de ses habitants, l'acte meurtrier inexpliqué par lequel le film débute n'en est pourtant qu'une simple étincelle, allumant la mèche d'un engrenage encore bien plus dangereux à l'intérieur duquel vont se retrouver pris au piège un gérant de motel et ancienne gloire de rodéo, deux veuves réunies dans l'épreuve et un tueur au bord de l'implosion. Dès lors, "Sweet Virginia" ne fera que détailler un peu plus la toile complexe et inattendu reliant ces quatre personnages par leurs actes, leurs fautes et leurs blessures. Si, globalement, les terminaisons de l'intrigue se dessineront assez vite et une ou deux facilités viendront ternir la qualité de l'ensemble (un certain choix bizarre de T-shirt notamment), la force de "Sweet Virginia" résidera bel et bien dans la manière que le film aura de faire s'entrecroiser les défaillances de ces quatre protagonistes dans une forme de désespérance ambiante où tout paraît susceptible de nous emmener vers une explosion dont on ne parvient à déterminer le moment de la détonation. Chaque dialogue dévoilant un peu plus la douleur, chaque interaction parfois aussi inattendue qu'incongrue au gré du hasard d'une rencontre deviennent ainsi capitaux dans la route à cet instant fatidique où la déflagration interviendra pour emporter tout ce petit monde dans son sillage.
Paradoxalement et pour en revenir au sens de notre introduction, ce sera d'ailleurs le retour à certains principes, à des valeurs de respect nées d'un passé commun et fortuit en dehors de cette petite ville, qui causera la chute et la renaissance de certains personnages dans une onde de choc n'épargnant personne. Les nuages sur les montagnes de cette Alaska sombre comme ses nuits sans fin se dissiperont alors quelque peu sur ceux qui méritent enfin de pouvoir regarder leur passé et les épreuves vécues en face pour tenter de reconstruire un futur.
"Sweet Virginia" ne brille peut-être pas par l'originalité globale de son intrigue mais sa construction en forme de bombe à retardement où le spectateur en deviendrait peu à peu le démineur pris au dépourvu est, elle, imparable. Bien aidé par son casting quatre étoiles (Jon Bernthal, Rosemarie DeWitt, Imogen Poots et Christopher Abbott), ce deuxième long-métrage de Jamie M. Dagg ("River") est un polar très habilement mené où l'on se laisse agréablement aspirer dans la spirale infernale engendrée par le chaos entourant ses quatre personnages principaux.
Créée
le 17 juil. 2018
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