Sweetheart
5.5
Sweetheart

Film de J.D. Dillard (2019)

Drôle de constat : certaines des pires productions Blumhouse arrivent à se frayer inexplicablement un chemin jusque dans les salles de cinéma (coucou "Black Christmas", "Action ou Vérité" & co !) pendant que d'autres bien meilleures ne sont visibles pour ainsi dire nulle part ! Sorti en VOD aux États-Unis, la bonne surprise qu'est "Sweetheart" fait clairement partie de cette deuxième catégorie. Alors, attention, le long-métrage de J.D. Dillard n'a sans doute pas la prétention de devenir un incontournable en son genre à cause de ses limites mais, bon sang, en tant que représentant de la petite série B de monstre, on peut dire qu'il a le mérite de prendre au sérieux sa catégorie à bien des égards !


Une jeune fille s'échoue en compagnie d'un ami blessé sur une petite île perdue au milieu du Pacifique. Alors qu'elle commence tout juste à essayer de s'en sortir, une mystérieuse présence se met à rôder autour d'elle la nuit...


Et voilà, en partant de ce pitch somme toute rudimentaire mais ô combien attractif, J.D. Dillard va réussir à naviguer entre les eaux du pur survival, du film de monstre ou encore de la portée métaphorique de l'ensemble, et ce sans jamais trop boire la tasse !
Prenant le parti gonflé d'être quasiment muet pendant les deux tiers de sa durée, "Sweetheart" s'attache en premier lieu à nous faire partager et ressentir les conditions de survie de son héroïne incarnée par la toujours impeccable Kiersey Clemons. Déboussolée par la violence de son arrivée, la jeune femme va vite se révéler débrouillarde en prenant conscience de sa situation mais ne sera jamais montrée comme infaillible. Avec quelques aides matérielles en cours de route, ses agissements témoigneront en permanence de sa détermination à assurer sa survie sans pour autant tomber dans le cliché de la candidate de Koh-Lanta ultime, des erreurs de jugement comme sa première tentative de fuite par la mer viendront ainsi nous rappeler le désespoir bien humain qui l'anime.
Tout va évidemment prendre une tournure bien plus dangereuse avec l'arrivée de la créature. Des premiers signes trahissant sa présence à ses ballades nocturnes sur la plage, J.D. Dillard fait bien monter la sauce autour de cette présence en la dévoilant le moins possible. Les premières confrontations centrées simplement sur le visage de Clemons terrifiée par des bruits inhumains réserveront de jolis moments de tension et, même lorsque l'affrontement sera plus frontale, la mise en scène sera assez astucieuse pour ne pas trop en montrer, gardant de fait notre attention à scruter le moindre indice sur son apparence (rassurez-vous, votre curiosité sera satisfaite un peu plus tard).
Arrivé à un certain point, il faudra bien avouer que "Sweetheart" se met dangereusement à tourner en rond dans le duel entre le prédateur et sa victime. Fort heureusement, J.D. Dillard et ses coscénaristes nous sortiront un rebondissement de leur chapeau qui va considérablement changer les facteurs de l'équation et, par la même occasion, chercher à donner un peu de profondeur à cette affaire très directe depuis ses débuts. Une certaine redondance de cavités nous laissait déjà penser que cette héroïne encourait le risque de se laisser entraîner dans les ténèbres de ses peurs, ces dernières seront désormais un peu plus explicitées : la créature en sera bien sûr l'incarnation la plus flagrante mais leur emprise sur la jeune femme se traduira surtout par une nouvelle, mettant à pied d'égalité le pire de l'humanité et la bête en suggérant l'innommable (le titre du film prendra tout son sens et un certain ustensile sera la preuve qui scellera cet état de fait). Bref, dans un final plus attendu mais incontestablement généreux notamment par son orientation à recourir à des effets spéciaux "à l'ancienne" et non à d'affreux CGI, "Sweetheart" se fera l'écho de l'émancipation dans la violence d'une héroïne qui n'a plus rien à perdre.


Amateurs de films de monstre, "Sweetheart" est fait pour vous ! D'une courte durée de 1h20 mais malgré tout assez dense car plutôt bien gérée, le long-métrage de J.D. Dillard trouve bien entendu des limites à chacun des trois niveaux que l'on a abordés par des contours parfois trop simples, toutefois, rien ne peut vraiment nous empêcher de bouder notre plaisir devant ce sympathique petit film idéal pour un bon samedi soir !

RedArrow
6
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le 24 janv. 2020

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