C'est bel et bien un véritable coup de cœur. Ce film est évidemment culte mais je développe quand même ce pourquoi j'ai adoré. Surtout quand j'entends certains dire qu'il ne se passe rien ou qu'ils n'ont pas compris. Au contraire, il s'y passe tout et dans la plus grande simplicité. Taxi Driver c'est certes l'histoire d'un homme qui tourne mal, d'une sorte de psychopathe tourmenté qui s'enferme dans son monde. Mais c'est d'abord l'histoire d'une ville en décadence, le New-York des années 70. Et c'est surtout l'entrée la plus profonde et la plus touchante dans la psychologie humaine. Pas la psychologie de comptoir où l'on se plait à imaginer que tous les êtres humains suivent plus ou moins une même manière de vivre et une même manière de penser. Inutile de dire que c'est la performance de Robert de Niro qui nous permet de toucher au plus près la psychologie du personnage, plus qu'incroyable et qui mérite de revoir la scène culte - semi-improvisée - autant de fois qu'il est possible. En offrant un film avec quasiment un unique personnage à l'écran, on s'attache à comprendre le raisonnement d'un paumé, d'un mec qu'on aimerait certes pas du tout croiser et qui pourtant n'est pas si différent. Seulement quelqu'un qui n'a pas intégré les codes de la société comme la société l'aurait voulu. Ma scène préférée est sans doute celle où Travis emmène la blonde voir un porno. Le décalage criant entre la vie du personnage, ses codes, sa socialisation et ce que nous considérons comme normal. Avec en même temps la sincérité et les valeurs tout de même intégrées par le personnage. L'abîme qui sépare tout à coup un individu de la société entière alors même qu'il pense en avoir compris les ressorts, lui qui connait tout sur tout de la vie new-yorkaise à travers la vitre de son taxi jaune.
Bref, je pense que je pourrais parler des heures et des heures sur ce film. Mais ce qui est sûr c'est que les chefs-d'oeuvre sont souvent ceux qui s'attaquent à la psychologie du criminel et le film m'a rappelé évidemment L'étranger, d'Albert Camus, mais aussi Le Parfum, de Patrick Süskind, deux de mes livres préférés.
A ceci près que le film se termine sur une note singulièrement différente puisque Travis aura grandi de son expérience, et on pourrait presque comparer le film à un roman d'apprentissage. Après tout, Travis finit par rentrer dans le rang et c'est de cette façon que la société s'en souvient et le considère. Travis aurait pu devenir un psychopathe. Il est peut-être simplement l'un d'entre nous.
En bref : Un film à voir et revoir pour appréhender tout ce qui en fait un chef-d'oeuvre, de la psychologie du personnage à la performance de De Niro, du New-York des années 70 à la manière de filmer de Scorsese. A vos écrans, bon sang !