Le premier road-movie espagnol?

Une jeune fille de 18 ans s'essaye à l'écriture et imagine ses propres péripéties au cours d'un voyage en Andalousie. Sa cousine corrige ses écrits au fil de l'aventure, donnant droit à une réécriture de la fiction que l'on peut suivre au fil de leurs idées partagées. Toute proportion gardée, ce scénario fait un peu penser à celui de l'hilarant "Le Magnifique" de De Broca.
Jess Franco qui signe encore Jesus Franco écrit et réalise ce film en 1959. Le scénario astucieux lui permet de mélanger plusieurs genres (comédie à l'italienne, road-movie, documentaire, drame, romance, fantastique,...) et il semble prendre beaucoup de plaisir à expérimenter des techniques et des modes narratifs. L'ensemble est un peu foutrarque car on s'emmêle parfois les pinceaux entre fiction et réalité mais amuse encore par le côté outrancier de certains personnages incarnés d'ailleurs par un même acteur (l'arnaqueur, la grande gueule, le gros lourd qui raconte des blagues nulles, le bandit en cavale, le châtelain tueur) qui s'en donne à coeur joie dans ses différents rôles.
La fiction: deux cousines madrilènes de 18 ans profitent de l'absence momentanée des parents (en visite à Paris) pour organiser un voyage vers l'Andalousie. Leur cousin, arnaqueur sans scrupule, les escroque au maximum en leur vendant une épave, ainsi qu'un maximum de matériel inutile et ridicule (tente à une seule porte pour éviter les courants d'air, hibou pour éloigner les loups éventuels, cartes obsolètes , etc...) Les deux filles, en victimes consentantes, s'embarquent enfin pour ce voyage vers le Sud. Leur première étape est Despenaperros où elles picniquent en laissant leur imagination rêver de brigands au grand coeur. Elles se rendent ensuite à Jaen puis Rota (Cadix) où on leur vole leur voiture. Elle continuent leur voyage en bateau vers Séville puis Sanlucar de Barrameda. Les scènes de voyage sont l'occasion de nous montrer de belles images de cette Andalousie d'époque, qu'on croiraient sorties d'un documentaire, avec du flamenco en musique de fond. Les genres alternent au gré de l'humeur des jeunes écrivaines pour un final doux-amer par rapport au début du métrage, celui-ci étant clairement abordé sous le ton humoristique pour glisser d'abord vers le documentaire fictionnel, un épisode fantastique qui préfigure la future carrière de Franco et un final caustique au cours duquel sont évoquées les stigmates de la guerre d'Espagne. Ca sent le bouillonnement d'idées, peut-être un peu trop pour un seul film mais la générosité est présente et se ressent. Le film a certainement du divertir plus d'un spectateur à sa sortie.
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