Quand le scénariste de Ring s'intéresse aux recoins les plus mystérieux du cerveau humain

Un film étonnamment mal noté de manière générale, 6e opus de la série "J-Horror Theater", qui s'est pourtant révélé une bonne surprise au visionnage, notamment sur le plan scénaristique (on a tout de même affaire au scénariste de Ring, donc le Monsieur sait trousser un scénario!), mais aussi, de façon plus surprenante, par quelques séquences, sur le plan esthétique.
L'originalité de cette production, en 2010, soit à une date où le genre de la J-Horror (surtout connu pour son recyclage à l'infini des mêmes lieux communs fondateurs) est totalement sur le déclin, voire même en déliquescence, serait déjà à saluer. Le réalisateur / scénariste ne nous ressert pas un n-ième pastiche de Ring (il aurait pourtant été le mieux placé pour le faire) mais développe un récit inspiré d'un livre de Machen "Le Grand Dieu Pan" (qui fait également penser au "From Beyond" de Stuart Gordon), fondé sur le postulat selon lequel une légère opération en un endroit bien défini du cerveau serait en mesure de mettre en contact des cobayes humains avec des phénomènes paranormaux outrepassant nos 5 sens habituels (thème relativement classique du fantastique européen de la 2e moitié du XIXe siècle et du début du XXe). En mêlant ce point de départ avec une histoire familiale bien tordue et même un film maudit (!), le récit démarre lentement (et même assez maladroitement ai-je trouvé) mais monte crescendo en puissance jusqu'à une séquence finale mémorable (dans un hôpital abandonné comme il se doit! Chassez le poncif, il reviendra par la fenêtre). Certains éléments reste (volontairement) dans le flou, tout cela reste, dans le détail, assez mystérieux, mais le tout reste tout de même largement compréhensible dans l'ensemble pour quiconque y met un peu de bonne volonté (contrairement à ce que j'ai pu lire). Là où le film fait fort selon moi, c'est qu'il parvient à distiller une vraie terreur, non basée sur du jump-scare et du gore, mais bien en instillant un sentiment de malaise, une peur fondamentale face à l'Inconnu (avec un grand I), ce qui nous dépasse, nous pauvres petits êtres humains. En ce sens, le film évoque d'autres références tout à fait honorables comme Lovecraft.
Sur le plan esthétique, le tout est très inégal; l'image fait en général davantage penser à un téléfilm qu'à une superproduction (budget limité sans doute), mais le film se permet parfois, sur ses séquences oniriques notamment, et surtout dans un final tout en couleur à la Argento (la dernière scène entre les deux sœurs dans la forêt), des audaces très réussies, qui laisseraient presque à penser que nous entrevoyons nous aussi, à notre tour, un univers aussi démoniaque que dissimulé à nos sens.
Petit bémol néanmoins sur la toute dernière séquence (je ne spoile pas) qui remet en cause quasiment tout ce à quoi nous avons assisté précédemment. Je n'ai rien contre ce procédé scénaristique en soi, mais il est ici, selon moi, bien mal maîtrisé, et même sans doute hors de propos: à quoi bon rajouter une dose d'hermétisme et de mystère à un récit qui n'en manquait vraiment pas jusque-là? Là encore, peut-être s'agit-il d'un poncif tardif de la J-Horror, car ce même procédé horripilant était déjà utilisé à la fin de "One Missed Call" (aka "La mort en ligne") de Takashi Miike.
Ce détail mis à part, je conseille très sincèrement ce film, véritable chant du cygne de la J-Horror des années 1990, à quiconque s'intéresse au genre!

Tibulle85
8
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le 8 sept. 2017

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