Avec The Deep House, engouffrez-vous dans l’angoisse d’une exploration d’urbex aquatique. A travers son pitch de maison hantée classique, le film place ses pions dans les eaux tourmentées et piégeuses, qui emprisonnent les personnages et le spectateur au plus profond de la maison.
Nouvelle plongée dans le genre horrifique pour le duo francophone d’Alexandre Bustillo et Julien Maury, qui confirme une fois de plus la volonté du cinéma français de franchir cette année un cap, dans des genres tels que l’horreur, le fantastique ou la science-fiction. Parmi des films souvent emprunts de naturalisme et de message social, notamment La Nuée de Just Philippot ou le tout fraîchement sorti Teddy de Ludovic et Zoran Boukherma, The Deep House parvient à se démarquer parce qu'il est plus emprunt d’une cinéphilie aux références américaines.
Tout au long de leur filmographie, les deux réalisateurs n’auront cessé de s’aventurer sur le terrain de l’horreur, depuis A l’intérieur sortie en 2007. Malgré un échec au box-office, le film leur aura permis de se faire une place dans le cœur des fans du genre horrifique, cherchant par là même à s’éloigner des carcans traditionnels du cinéma français, à la manière d’autres réalisateurs tels que Pascal Laugier. Et bien que la suite de leur filmographie n'ait pas toujours été à la hauteur des attentes des spectateurs, la promesse du sixième film d’Alexandre Bustillo et Julien Maury semblait de bon présage. Les deux réalisateurs cherchant ici à innover, en immergeant le concept de maison hanté au fond d’un lac pour raconter l’histoire d’un jeune couple de Youtubeurs spécialisés dans les vidéos d’exploration urbaine, interprétés par Camille Rowe et James Jagger, plongeant dans un lac français isolé afin de visiter les ruines d’un manoir immergé. D’abord spectateurs d’une découverte unique, puis très vite victimes d’un cauchemar lorsque la maison commence progressivement à révéler sa mystique, faite de cérémonies sataniques et de sacrifices humains.
Théâtre aquatique de l’horreur
Qui n’a jamais ressenti l’angoisse, en nageant face au noir des fonds marins, de l’inconnu qui guette et se cache dans les profondeurs, invisible ? C’est avant tout cette peur que le film cherchera à réveiller chez le spectateur, et qu’il combinera à des peurs plus habituelles, telles que le paranormal ou la claustrophobie. Plus qu’un film de maison hanté, les deux réalisateurs cherchent ici à innover techniquement en nous offrant une plongée de près d’une heure au fond d’un lac, dans le décor incroyable d’une maison bourgeoise figée dans l’horreur d’un drame. Ce décor, conçu et patiné par le chef décorateur Hubert Pouille, filmé dans un bassin de tournage dédié, près de Bruxelles - sans effets numériques à six mètres de profondeur -, opérant avec le directeur de la photographie Jacques Ballard, spécialiste des captations marines ayant travaillé entre-autre sur Le Chant du Loup.
Les deux réalisateurs creusant ainsi l’apparente linéarité de la narration par une mise en scène usant par à-coups du found-footage pour augmenter l’immersion du spectateur, au risque par instant de frôler l’illisibilité des images. Car en traitant l’urbex sous un point de vue subaquatique, Bustillo et Maury insufflent une véritable singularité dans leur proposition, ouvrant à un jeu malsain et imprévisible entre le public et le film, pour construire une atmosphère oppressante et étouffante prenant aux tripes. Dans les eaux profondes et sinueuses, par ses bouteilles d’oxygène qui se vident inexorablement, The Deep House consume lentement sa chandelle, introduisant d’abord un contexte réaliste et crédible pour qu’il puisse à chaque instant envoyer valser les attentes.
Un scénario qui prend l’eau
On ne criera cependant pas au génie, le film comportant son lot de faiblesses, notamment un scénario assez convenu et peu surprenant, laissant peu de doute sur l'issue des protagonistes, eux-mêmes des stéréotypes malgré une prestation plutôt convaincante du casting. Mais n’est-ce donc pas en un sens la parfaite recette d’un film de la Blumhouse ? Un concept original, mêlé à une histoire de maison hantée relativement bien ficelée. Cela ne fait aucun doute, et c’est visiblement ce qu'a dû penser la société de Jason Blum qui a racheté le film pour une distribution à l’international.
Ainsi, Alexandre Bustillo et Julien Maury donnent corps à un concept, qui, même s’il manque de profondeur et d’idées particulièrement saisissantes à l’écriture, s’aventure dans un voyage aquatique hors des sentiers battus pour redonner une nouvelle bouffée d’oxygène au film de maison hanté, jouant physiquement avec nos peurs les plus primaires afin de distiller son lot de frissons. Plongeant ses protagonistes dans une promenade humide et putride, aussi menaçante qu’inquiétante, The Deep House nage entre les sous-genres de l’horreur pour venir y implanter sa graine d’inventivité visuelle et d’imagerie morbide.
Ici dans les profondeurs, comme dans l’espace, l’Homme ne tire aucun avantage, et devient ainsi rapidement la proie de toute menace imaginable par des scénaristes cherchant toujours de nouvelles façon de terrifier son spectateur. La proposition saura ainsi nous rendre curieux de découvrir le prochain film des deux réalisateurs, Kandisha, disponible en vidéo à la demande depuis le 29 juillet sur toutes les plateformes.