Intéressons nous cette fois-ci à un film sinon inconnu de la majorité des bisseux, tout du moins en marge des thématiques habituellement franciennes qui feront date parmi les amateurs de cinéma-bis : The Devil Came from Akasava. Ce long-métrage, sorti la même année que le culte Vampyros Lesbos, avec également l'inoubliable Soledad Miranda, s'éloigne de l'érotisme et de l'épouvante qui firent la renommée du cinéaste madrilène à l'orée des seventies pour proposer une autre facette du talent multi-disciplinaire de son auteur : le film d'espionnage décalé, mais n'allons pas trop vite...

L'assistant du professeur Forrester trouve dans une caverne isolée une pierre radioactive, pierre extrêmement convoitée si on en croit les tirs de carabine qui accueillent celui-ci à la sortie de la grotte. De retour chez le professeur, gravement blessé, Forrester s'empresse de demander secours au docteur Thorrsen (Horst Tappert), la vie de son assistant ne tenant plus qu'à un fil. Mais en attendant l'arrivée du (bon?) docteur, l'archéologue découvre le cadavre irradié de son suppléant, et la disparition de la pierre... avant que ce dernier ne s'évanouisse également dans la nature. Or au même moment, à 9000 km de là, son bureau à Londres devient le théâtre d'un meurtre. Quelque temps plus tard, le dénommé Rex Forrester (Fred Williams), neveu du professeur, débarque à Akasava pour enquêter sur la mystérieuse disparition de son oncle, suivi de près par Jane Morgan (Soledad Miranda) et Tino Celli (Jesús Franco), tous deux agents secrets...

Librement inspiré par une nouvelle d'Edgar Wallace, The Akasava, cette production germanique, en relation avec Les nuits de Dracula qui permirent au cinéaste espagnol d'ouvrir une nouvelle boîte de Pandore fantasmagorique, clôt le chapitre d'un genre typiquement sixties plusieurs fois revisité au cours de la décennie passée par Franco (Agent 077 opération Jamaïque (1964) ou Opération Re Mida (1967)). Franco solde les comptes, s'écarte des bonderies premier degré et offre ainsi une facette rarement exploitée dans son abondante filmographie : un film oscillant entre le thriller fantastique mâtiné d'espionnage et une atmosphère sexy entre coolitude et détachement, le tout filmé avec les moyens du bord ; quelques enregistrements sonores, un jardin des plantes ibérique, des cadrages suffisamment serrés, et vous obtenez une jungle africaine des plus franciennes... so what? This is a Jess Franco movie.

Entouré comme à l'accoutumée d'acteurs fidèles, tels le placide Paul Muller et le fourbe Howard Vernon par exemple, Franco assume pleinement son propos divertissant et l'aspect décomplexé de l'intrigue (comprendre ne pas s'attendre à une Lettre du Kremlin francienne). Au contraire, cette distance salvatrice sans toutefois tendre vers la parodie du film d'espionnage apporte une fraîcheur appréciable, le charme et la beauté de Soledad Miranda faisant évidemment le reste une toute dernière fois. Tourné dans le même laps de temps que Vampyros Lesbos et She Killed in Ecstasy, The Devil Came from Akasava sera ainsi le dernier film de la muse de Jesús avant son tragique accident de voiture en août 1970 ; juste le temps de nous laisser profiter d'une dernière danse...

Une poupée psychédélique, un film groovy à l'image de sa bande-originale composée par la paire Odón Alonso/Sigi Schwab, dont le second est en partie responsable de la musique de Vampyros Lesbos, Akasava empruntant nombre de thèmes provenant de ce film : Dedicated to Love en ouverture, Ballad of a Fair Singer, Kamasutra, et autre Necronomania... what else?

Loin des thématiques habituellement horrifiques de Franco, ce diable venant d'Akasava surprendra donc dans un premier temps celui (ou celle) venu(e) réclamer sa pitance déviante, avant de s'amuser finalement devant cet hommage déguisé au cinéma populaire d'espionnage de la décennie 60's par l'un des maîtres du cinéma-bis du XXème siècle.
Claire-Magenta
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le 25 déc. 2013

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