Une intrigue passionnante et morbide qui passionne.
The Devil’s Path, un peu à la manière d’un Cold Fish, s’inspire d’une histoire vraie qui nous plonge dans la misère et dans le glauque au quotidien. Dans les deux cas, il y est question de meurtres, de manipulation, et d’argent. Ici, pas de tueur en série qui enchaînent les victimes en les démembrant (quoi que…) et se cachant derrière un magasin de poissons tropicaux, mais l’histoire vraie du sensei. Un homme d’affaire travaillant dans l’immobilier et surtout travaillant main dans la main avec les Yakuza pour être certain d’être payé, quitte à tuer les membres de la famille de quiconque lui doit de l’argent afin de toucher l’assurance vie et ainsi d’être remboursé. Le genre de personnage que l’on n’aimerait assurément pas croiser au coin de la rue, et qui pourtant, aux premiers abords, paraît être sympathique et normal, avec une belle maison, une vie de famille ainsi qu’un travail stable. Le film qui s’inspire de cette histoire vraie nous raconte donc l’histoire d’un journaliste, Fujii Shûichi, joué par Yamada Takayuki (Crows Zero, Gantz, 13 Assassins, Lesson of the Evil), qui va enquêter sur cette sombre affaire après que le journal pour lequel il travaille ne reçoive la requête d’un Yakuza, emprisonné et condamné. Il se rend sur place, et malgré l’ordre de ses supérieurs pour arrêter son enquête/article, il ne va pouvoir s’empêcher d’y retourner à chaque fois, plongeant corps et âme dans le travail, en oubliant presque sa vie auprès de sa femme et de sa mère, qui n’est pas rose non plus.
Car dans The Devil’s Path, tout est noir. Très noir même. Les personnages sont soit déprimés, soit des enfoirés de première pour une raison x ou y, plus l’intrigue avance plus les situations se font dures (voir la scène hallucinante avec le grand-père), et rien ne viendra nous sortir la tête de l’eau bien au contraire. Si certaines situations peuvent utiliser un certain second degré, ce qui ressort de l’ensemble est plutôt dérangeant, puisque l’histoire que l’on regarde est une histoire vraie, et que les personnages, du moins le plus important, le sensei, se cache derrière une image bien propre pour faire les pires atrocités. Une violence réfléchie, totalement voulue, qu’il cache, tandis que son homme de main, Yakuza, qui sera le premier à faire ses atrocités en lui obéissant, fera appel à une violence beaucoup plus brute, moins surprenante, mais tout aussi percutante. L’on suit donc d’un côté le passé et les atrocités commisses par ses deux personnages détestables et de l’autre l’enquête du journaliste, revenant sur les lieux des crimes, allant parler aux témoins, en apprenant plus en se rendant en prison, tout en essayant de gérer (ou de fuir plutôt) sa situation familiale, difficile avec sa mère malade.
L’alternance entre les flashbacks et les scènes de l’enquête est très bien faite, l’ensemble se fait fluide et absolument sans fausse note. Le casting y est pour quelque chose. En premier lieu, Yamada Takayuki, comme toujours parfait, jouant là bel et bien son rôle le plus sombre et dépressif. Il ne quittera jamais son regard triste, pas une fois de tout le film. Et comme c’est le seul personnage auquel le spectateur a la chance de pouvoir s’identifier, on peut dire que la descente aux enfers est longue et douloureuse. Dans le rôle du Yakuza en prison, Pièru Taki, que l’on est plus habitué à voir dans des registres légers (Moteki le film, 10 Promises to My Dog), même s’il avait prêté sa voix à un personnage du jeu Forbidden Siren 2 en 2006. Mais la palme revient bien entendu à Riri Furanki (Lily Franky), impressionnant dans le rôle du Sensei. Pour l’avoir vu uniquement dans le drama puis le film Moteki dans un rôle comique, je ne m’attendais pas à une telle prestation de sa part dans un tel rôle. Il est glaçant, un peu à l’image du tueur de Cold Fish justement, auquel le film se rapproche beaucoup par certains aspects, tout en se faisant moins sanglant visuellement, mais tout aussi dur dans son propos. Je suis sorti emballé par la vision de The Devil’s Path. Sobre dans sa mise en scène tout en étant travaillé et parfois ingénieux, passionnant et glaçant, le film tient la route sur toute la durée.