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Pour son 36 ème long-métrage, Steven Spielberg nous offre son propre biopic sur sa jeunesse et son adolescence, en nous montrant la génèse de sa passion pour le cinéma, et ce dans un contexte familial douloureux avec la grave crise affective qu'ont connue ses parents à cette époque.

C'est à la fois courageux et très risqué de la part de cet immense réalisateur, comme s'il éprouvait le besoin, maintenant, d'expliquer pourquoi il a embrassé cette fabuleuse carrière de cinéaste ! C'est assurément un film très particulier, intimiste, à la limite du voyeurisme, et qui ne ressemble à aucune autre de ses 35 réalisations précédentes.

En nous montrant que l'art et la famille sont indissociables, Steven Spielberg nous fait comprendre que le cinéma peut être, tour à tour, l'imitation de la réalité, la révélation de situations qu'on ne soupçonne pas, la déformation de la réalité pour mettre en exergue certains comportements, ou de la pure fiction..., bref que le cinéma est un moyen de s'inventer un monde différent de celui qu'on a vécu et qui nous a en partie déçu.

Ainsi le scénario du film suit-il simplement et efficacement la vie et les drames de la famille juive Fabelman, depuis les 8 ans de Sammy/Steven jusqu'à ses 18 ans en 1964, année où il démarre véritablement sa carrière de réalisateur avec son premier long métrage.

L'art chez les Fabelman, c'est du côté de la mère Mitzi (jouée par Michelle William très présente dans le film pour ses enfants avec une tendance au surjeu dans ses comportements, cachant ainsi son mal-être), très bonne pianiste, mais qui sacrifie sa carrière pour garder ses 4 enfants, Sammy/Steven et ses 3 soeurs... Dès lors que Sammy/Steven aura une caméra en mains, à 8 ans, pour reproduire et dédramatiser une scène violente de sa première séance de cinéma pour voir "Sous le plus grand chapiteau du monde", sa mère n'arrêtera pas de l'encourager à filmer des scènes de famille ou des fictions... Sammy/Steven adolescent est subtilement joué et avec beaucoup d'enthousiasme par Gabriel LaBelle.

Le père c'est Burt Fabelman (joué par Paul Dano qui manque hélas de relief dans ce film, mais il semble tellement loin de la passion de son fils), un scientifique émérite dans l'électronique et l'informatique, menant une brillante carrière; il fait déménager sa famille du New Jersey vers l'Arizona puis en Californie, où il sera recruté par IBM à l'époque de la construction des premiers grands ordinateurs... Persuadé que cette carrière prestigieuse doit rendre sa famille heureuse, il pense que le cinéma ne peut être qu'un hobby et ne s'intéresse à une caméra que par son aspect technique.

Burt est accompagné d'un ami et collègue de travail Bennie Loewy (Seth Rogen); présent dans l'environnement familial, Sammy/Steven va découvrir lui-même et avec effarement la relation que Bennie entretient avec sa mère, en les filmant lors d'un séjour en camping en Arizona...

Devant ce contexte familial très difficile, on voit Sammy/Steven se concentrer sur son apprentissage du cinéma, entre inspirations de la réalité et fictions diverses, apprenant très vite à réaliser des effets spéciaux et à monter ses films, selon l'approche artisanale des années 50, et c'est parfaitement rendu.

Sammy/Steven va aussi rencontrer Boris (joué par un Judd Hirsch très convainquant), l'oncle de Mitzi. Ayant travaillé dans le cinéma, Boris le prévient qu'il sera amené à être tiraillé entre son amour pour sa famille et sa passion pour le septème art... Cet épisode très court mais intense et bien mené trouve chez Sammy/Steven un écho à ce qu'il vit, le poussant encore plus à se réfugier dans le cinéma.

Au-delà de voir Sammy/Steven faire son apprentissage caméra au poing, l'intérêt du film, de son intrigue et de sa dramaturgie arrivent véritablement avec le déménagement de la famille en Californie.

Tout d'abord, la crise affective entres ses parents va crescendo, éclatant bientôt au grand jour, d'autant que Bennie n'a pas pu les suivre en Californie. Même le singe Bennie qu'elle achète ne pourra pas le remplacer (drôle et pathétique à la fois) !! Mitzi exhorte par ailleurs Burt de laisser Sammy/Steven poursuivre sa passion pour le cinéma, ce qui rajoute à leur conflit... Dès lors leur séparation est-elle inéluctable ?

En parallèle le jeune Sammy/Steven s'intègre très mal dans son université, victime de harcèlements antisémites violents par deux étudiants prétentieux Logan et Chad. Très exagérées et insistant beaucoup (trop ?) sur le rôle des juifs dans la mort de Jésus, ces scènes montrent combien le réalisateur en a souffert à cette époque...

Il trouvera un réconfort momentané avec la pieuse Monica (Chloe East dont le jeu de midinette est hélas loin d'être inoubliable).

Délaissant un temps sa caméra depuis la déception infligée par la découverte de sa mère infidèle, Sammy/Steven va finalement accepter de filmer le Ditch Day de son université (journée de relâche à la plage), avec une caméra prêtée par le père de Monica... Présenté au bal de fin d'année et applaudi, le film présente Logan et Chad sous un jour inattendu, ce qui apporte au jeune réalisateur une forme de revanche, nous montrant ainsi le pouvoir du cinéaste !

Devant la grande difficulté de Sammy/Steven à poursuivre ses études universitaires, Burt finit par accepter qu'il se dirige vers le cinéma. Sammy/Steven obyient une offre d'assistant débutant pour le tournage de séries télévisées chez CBS...

Arrivé aux studios, Sammy/Steven a la formidable opportunité de rencontrer brièvement John Ford (joué par le grand David Lynch étonnant et méconnaissable), qui lui prodique quelques conseils pour réaliser un film; c'est une scène magnifique et presque d'anthologie, quand on sait comment Steven Spielberg a été inspiré par ce monstre sacré du cinéma. Elle met Sammy/Steven aux anges, une forme d'adoubement pour sa future carrière...

The Fabelmans n'est sans doute pas le meilleur film de Steven Spielberg, mais son côté très intimiste et sensible ne manque pas de nous délivrer une grande émotion; on peut même se demander si une suite à cet auto-biopic ne pourrait pas relater tout ou partie de la carrière de ce grand réalisateur !

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le 7 mars 2023

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Azur-Uno

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